Le terminal de Fos-sur-Mer le 21 janvier 2011 (Photo : Anne-Christine Poujoulat) |
[23/01/2011 11:24:47] MARSEILLE (AFP) Moins de trois mois après une grève historique, le port de Marseille est de nouveau confronté à un mouvement de blocage, une récurrence à laquelle les acteurs du secteur refusent de s’habituer, certains appelant à un “Yalta du port”.
Fin octobre, l’une des plus longues grèves du port de Marseille, liée à la fois à la contestation de la réforme nationale des retraites et aux négociations sur la réforme portuaire, s’achevait.
Les quelque 80 navires bloqués, pour certains pendant plus de trois semaines, pouvaient reprendre le déchargement de leurs marchandises, tant sur les bassins Est (situés au coeur de Marseille) que Ouest (à Fos-sur-Mer).
Depuis vendredi et au moins jusqu’à lundi, un mouvement de blocage, à l’initiative des dockers et des agents portuaires, touche de nouveau les installations marseillaises.
Après une année 2010 très difficile, 2011 ne démarre donc pas sous les meilleurs auspices. “On se croirait dans une mauvaise série américaine”, ironise un spécialiste marseillais du secteur portuaire.
Mais cette fois, la situation s’avère d’autant moins compréhensible que patronat et syndicats semblaient avoir trouvé un terrain d’entente autour de la délicate réforme de leur secteur.
Le terminal de Fos-sur-Mer le 21 janvier 2011 (Photo : Anne-Christine Poujoulat) |
Des deux côtés, sur un ton différent, on met en cause l’attitude du gouvernement qui a décidé de ne pas accepter l’accord entre partenaires sociaux sur la prise en compte de la pénibilité des professions portuaires, estimant qu’il était incompatible avec la réforme des retraites.
“C’est du +foutage de gueule+, une véritable provocation”, tempête Serge Coutouris, responsable de la CGT des dockers du golfe de Fos.
Selon lui, “après sa victoire sur les retraites, le gouvernement essaie d’accrocher une autre médaille” et cherche à pousser son avantage. “Alors qu’il a réussi à faire plier des millions de salariés, il ne va pas s’emmerder avec les 5.000 salariés du secteur portuaire”, poursuit-il.
Côté patronal, l’incompréhension est également de mise. “Cela fait quand même des mois et des mois qu’on avait des discussions sur ce sujet (la pénibilité, NDLR), on ne peut pas nous faire croire qu’au plus haut niveau de l’Etat, on n’était pas au courant”, souligne Marc Reverchon, président de l’Union maritime et fluviale (UMF) qui fédère les entreprises du secteur.
Cette nouvelle péripétie de la réforme nationale des ports prend un relief encore plus douloureux pour le port marseillais car si les bassins Ouest poursuivent bon an mal an leur développement (un nouveau terminal conteneurs, Fos 2XL, doit être opérationnel dans les mois à venir), la situation des bassins Est est décrite comme beaucoup plus difficile, voire catastrophique.
“Plus le temps passe, plus il est clair que pour ce port, s’il n’y a pas une véritable rupture, on n’y arrivera jamais”, estime Jacques Pfister, le président de la chambre de commerce Marseille-Provence, qui ajoute: “tant qu’on ne dit pas +Faisons un vrai Yalta du port+, on n’y arrivera pas”.
Grèves à répétition, fin de la réparation navale, départ de certains trafics importants (l’exportateur israélien de fruits et légumes, Agrexco, vers Sète notamment): les mauvaises nouvelles se sont accumulées ces dernières années pour ces bassins, certains souhaitant l’arrêt du port industriel au profit exclusif d’un port de tourisme.
“Le +tout Marina+ est aussi nul que de garder le port comme il l’est”, juge M. Pfister qui en appelle au “courage” de l’ensemble des acteurs: syndicats, patrons et politiques, pour donner un avenir à l’ensemble de l’enceinte portuaire marseillaise.