Tunisie : Pourquoi les Tunisiens se rebellent-ils contre leurs patrons ?


ugtt-24012011-art.jpgAprès
la STAR (Société Tunisienne d’Assurance et de Réassurance), la SNDP (Société
Nationale de Distribution des Pétroles), la BT (Banque de Tunisie), l’Union
Tunisienne de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat (UTICA), Moncef Bouden
(secrétaire d’Etat auprès du ministre des Finances), à qui le tour? Car ce qui
pouvait, en début de semaine, sembler être un évènement exceptionnel –l’éviction
des présidents-directeurs généraux et dirigeants d’organisations- est en train
de devenir un véritable phénomène.

Inattendue, cette vague de limogeages est compréhensible. Elle est imputable à
la manière dont l’ancien président et son régime avaient pesé sur le pays,
l’avaient dominé, régenté et organisé dans le moindre détail, y compris dans le
choix des hommes.

C’était clair depuis très longtemps et cela l’est encore plus aujourd’hui: Ben
Ali a pris le pouvoir non pas pour servir le pays, les Tunisiens, mais pour se
servir, c’est-à-dire pour que lui et les siens puissent mettre le pays en coupe
réglée, s’en approprier les ressources et les richesses, au mépris de toute
morale et bon sens.

Pour qu’il puisse, avec sa famille, piller le pays de la manière éhontée qui a
été la leur, lui et sa famille, Ben Ali a mis en place un système au
fonctionnement très simple: la carotte et le bâton.

La première (la carotte) était réservée à ceux des Tunisiens qui acceptaient –et
ils étaient nombreux à l’accepter- de le servir dans la mise en œuvre de son
sombre dessein, et à commettre, pour cela, toutes les infractions, les violences
et les coups bas. Le second, le bâton en l’occurrence, était destiné aux
réfractaires, c’est-à-dire ceux qui non seulement refusaient de tremper dans le
pillage systématique du pays, mais également essaient de s’y opposer par la
parole et l’acte.

Pour arriver à leur fin, Ben Ali et sa clique ont mis en place un système
tentaculaire dont l’appareil sécuritaire était une composante essentielle. Mais
la domination était aussi politique et elle passait par un contrôle total et
tatillon exercée sur l’ensemble de la société civile. A l’exception de l’Ordre
des Avocats, de la Ligue Tunisienne de Défense des Droits de l’Homme (LTDH) et,
à un degré moindre de l’UGTT, toutes les organisations et associations
politiques, économiques, sociales, culturelles, etc. ont fini par être contrôlée
totalement.

Cette domination impliquait de nommer à la tête et aux postes clefs des
organisations des hommes liges pour qu’ils se chargent de garantir l’allégeance
de ces structures au pouvoir déchu et d’en faire des courroies de transmission
des ordres… totalement aux ordres.

Toutefois, ce jeu-là n’était très souvent pas le fait de la totalité des
responsables et membres de telle ou telle organisation, mais d’une minorité
–généralement le premier responsable et une garde rapprochée. C’est pour cette
raison, l’ancien président déchu parti, on est en train d’assister à ce
mouvement de renversement de p-dg et de responsables d’organisations coupables
aux yeux de l’opinion d’avoir été à la solde et au service du président déchu et
de sa famille.