ût 2010 à Dijon. (Photo : Jeff Pachoud) |
[26/01/2011 17:29:27] PARIS (AFP) Le prix de l’électricité nucléaire fait l’objet d’une vive passe d’armes entre le groupe public EDF et son grand rival GDF Suez, à quelques mois de l’application d’une loi réformant en profondeur le marché français de l’électricité.
Censée entrer en application au 1er juillet, la loi sur la Nouvelle organisation du marché de l’électricité (Nome) constitue, selon les spécialistes, une des réformes les plus importantes du secteur depuis 1946.
Pour doper la concurrence, elle va en effet contraindre l’ancien monopole public à vendre jusqu’à un quart de la production de ses centrales nucléaires à ses rivaux: GDF Suez, Eon, Poweo, Direct Energie, etc…
Le prix auquel cette électricité sera vendue reste cependant inconnu. Sa fixation a été renvoyée à un arrêté ministériel, qui devrait intervenir dans les mois à venir.
C’est pourtant un point clé de la réforme, si ce n’est le plus important: un prix trop élevé viderait en effet la réforme de sa substance en empêchant les fournisseurs alternatifs de concurrencer EDF.
A contrario, un prix trop bas empêcherait EDF de réaliser les investissements nécessaires à la rénovation et à l’entretien des réacteurs nucléaires.
La loi précise seulement que ce prix doit refléter les “conditions économiques de production” des centrales nucléaires et qu’il devra être “en cohérence” avec un tarif spécifique aux entreprises, le Tartam (Tarif Réglementé Transitoire d?Ajustement au Marché).
Selon le président de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), Philippe de Ladoucette, cela laisse “une grande marge de manoeuvre” au gouvernement.
De fait, EDF et ses concurrents proposent des prix très éloignés. Le patron du groupe d’électricité, Henri Proglio, estime ainsi que vendre à moins de 42 euros par mégawattheure (MWh) reviendrait à du “pillage”.
Un niveau que Gérard Mestrallet juge “inacceptable”, le patron de GDF Suez militant en effet pour 35 euros, un prix selon lui “équitable” car c’est “le prix qu?EDF facture aux particuliers”.
“Il n?y aurait aucun pillage puisque EDF ne ferait pas de pertes, mais au contraire une marge”, a-t-il affirmé la semaine dernière devant les députés.
“Si l?on veut introduire de la concurrence tout en vendant aux concurrents à un prix supérieur à 35 euros, et a fortiori à 42, cela ne peut fonctionner! Nous n?achèterons pas à 42 pour revendre à 35!”, avait soutenu M. Mestrallet.
La polémique est montée d’un cran mercredi quand Henri Proglio a dénoncé les “bêtises”, les “contre-vérités” et les “stupidités” de son concurrent.
“Le nucléaire français n’est pas aujourd’hui en soldes. Je ne suis pas là pour brader le patrimoine national”, s’est-il énervé au cours d’une audition par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale.
“Qu’on m’impose déjà de vendre 25% de ma production au prix de revient, c’est une condamnation lourde. Mais pas de double peine!”, a asséné M. Proglio.
Obliger EDF à vendre son électricité en dessous de son prix de revient conduirait à “abîmer l’équilibre économique” du groupe “qui n’aurait d’autre solution pour en sortir que de demander une hausse des prix”, a-t-il prévenu.
Qu’EDF l’emporte ou non, la détermination du prix de gros de l’électricité nucléaire aura en effet immanquablement un impact sur les tarifs proposés aux particuliers. La question est tellement sensible qu’elle sera tranchée par le président de la République lui-même, avait annoncé le ministre de l’Energie Eric Besson mi-janvier.