Foot : pionniers de la cotation, les clubs anglais boudent désormais la Bourse

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à Newcastle le 22 janvier 2001 (Photo : Graham Stuart)

[03/02/2011 11:58:17] LONDRES (AFP) Premiers à entrer en Bourse dès les années 1980, vingt ans avant l’Olympique lyonnais, les clubs anglais de football y ont connu des fortunes contrastées et se sont pour certains retirés de la cote, rachetés par des milliardaires étrangers.

Coté dès 1983, Tottenham a été suivi de Sheffield United, Sunderland et Leeds United en 1989, avant une rafale d’introductions au milieu des années 1990, déclenchée par un accord lucratif sur les droits de retransmission télé avec le bouquet satellitaire BSkyB.

En quelques années, Manchester United, Chelsea, Arsenal et Newcastle sont venus gonfler les rangs, tandis qu’à l’étranger certains clubs italiens et turcs, ainsi que l’Ajax d’Amsterdam et le Borussia Dortmund (Allemagne), leur ont emboîté le pas.

Créé en 1992, le DJ Stoxx Football Index a ainsi compté jusqu’à 33 clubs de 17 pays différents, contre 23 aujourd’hui. Mais ses performances se sont avérées décevantes, avec d’incessantes fluctuations et une rentabilité inférieure à celle du marché.

“Bien que le prétexte à l’entrée en Bourse ait souvent été la construction d’un nouveau stade ou d’un centre commercial, les clubs anglais ont surtout utilisé leurs revenus boursiers pour recruter de nouveaux joueurs”, gonflant ainsi leur masse salariale, expliquait en 2008 l’économiste Michel Aglietta.

Dans la Revue d’économie politique, il déplorait par ailleurs la difficulté à déterminer la “valeur fondamentale” de ces sociétés, qui “fluctue avec les résultats sportifs, la forme et les humeurs des joueurs, leur relation avec l’entraîneur et le président”.

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à Everton à Londres le 1er février 2011 (Photo : Carl de Souza)

Après l’effervescence des années 1990, la tendance s’est inversée lorsque certaines vedettes de la Premier League sont passées aux mains d’investisseurs étrangers, à l’image de Chelsea, racheté dès 2003 par le Russe Roman Abramovitch, puis Manchester United, repris en 2005 par l’Américain Malcolm Glazer.

Résumant à lui seul ce mouvement, Manchester City, entré en Bourse en 1995, en est sorti en 2007 après son rachat par l’ex-premier ministre thaïlandais Thaksin Shinawatra, avant que ce dernier ne revende le club en 2008 au Cheikh Mansour, de la famille régnante d’Abu Dhabi, qui multiplie depuis les achats de joueurs.

Après le retrait fin 2009 de Birmingham City, repris par le millionnaire hongkongais Carson Yeung, il ne reste plus de club coté sur le marché principal de la Bourse de Londres, et ceux qui sont restés en Bourse sont désormais relégués sur des marchés dédiés aux PME, comme l’Alternative Investment Market.

Parmi les quelques clubs restants, on compte des équipes d’envergure très variable, des clubs de l’élite comme Arsenal ou Tottenham à des formations plus obscures comme Watford.

Si l’exemple anglais a calmé les ardeurs boursières en Europe, où la dernière introduction d’envergure reste celle du club français de l’Olympique lyonnais en février 2007, la Bourse séduit désormais sur d’autres continents: ainsi l’Accra Hearts of Oak, champion du Ghana, s’est-il lancé en mai 2010 sur les marchés.

Reste que pour Michel Aglietta, le football demeure “structurellement” problématique pour un investisseur: gestion défaillante, “absence de supervision financière” par l’UEFA, salaires exubérants et “prolifération d’intermédiaires non réglementés et pénétrés par les mafias”.