Tunisie : La corruption à la Douane, choisie ou subie?

Parmi les revendications relevées récemment par les agents de la Société
tunisienne d’acconage et de manutention (STAM), l’ouverture d’une enquête sur la
corruption au sein de ladite société ainsi qu’à la Douane tunisienne, en
général. L’ampleur de cette pratique n’a cessé de s’amplifier au cours des
dernières années en Tunisie.

«C’est devenu, pour certains, une habitude quotidienne pour accomplir leurs
tâches. Cette corruption a continué à gagner du terrain chez de nombreux agents
administratifs de la STAM ainsi que des douaniers», nous a confié un agent de
port d’une société de transport maritime.

Notre interlocuteur explique que c’est la situation qui a prévalu durant
plusieurs années avec autant de surestaries à payer à cause d’une mauvaise
programmation d’arrivée, de passe-droit pour donner l’autorisation d’entrée au
quai à tel bâtiment plutôt qu’au premier arrivé… et la liste est longue.

Un peu gêné, un transitaire sous couvert de l’anonymat, nous a confié que la
lourdeur des procédures administratives pour passer la douane était devenue, ces
dernières années, caricaturale. «Prenons l’exemple d’une simple procédure pour
la préparation d’un manifeste. Dans ce cas, nous recevons soit un feu vert soit
un feu rouge pour libérer la marchandise. Pour un feu rouge, ce sera une autre
paire de manches. Nous étions obligés, dans ce cas, de passer par des dizaines
de signatures, en laissant bien entendu des petites sommes, à chaque fois, dans
les tiroirs», souligne le transitaire.

Des pratiques comme ça, il y en avait à la pelle. Toujours selon ce même
transitaire, aux seuls agents de la douane, mais aussi aux différents agents de
manutention, il suffisait de leur glisser quelles “billets“ pour voir son
travail finir plus vite et sans embûches, sinon c’est la galère. Selon nos
sources, la Douane a le droit, dans le doute, de tout faire. «Quelques billets
bien placés suffisent à dissiper les doutes. Je reconnais que la lourdeur et la
complexité de la procédure à suivre encouragent aussi, indirectement, la
corruption», précise un directeur d’exploitation d’une compagnie de transport
maritime.

Le directeur reconnaît, également, que le douanier de son magasin cale (magasin
sous douane) reçoit chaque mois une enveloppe outre des bons de carburant. En
contrepartie, le douanier accepte de fermer les yeux sur une marchandise
contrefaite, contre une fausse déclaration, un manque de conformité avec le
manifeste, etc.

La solution? «Aujourd’hui, seule une législation pourrait simplifier les
procédures et permettre peut-être de limiter ces fuites dangereuses pour la
sécurité publique. Il faut multiplier les campagnes de lutte contre la
corruption, et l’organisation des séminaires. La recherche de solution contre ce
fléau exige un redoublement des efforts, sinon on n’aboutira jamais à des
résultats satisfaisants», estime notre interlocuteur.