Publicité ciblée sur internet : le gouvernement va encadrer les cookies

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Une internaute (Photo : Frederic J. Brown)

[10/02/2011 17:17:13] PARIS (AFP) Le gouvernement va encadrer plus sévèrement l’utilisation des “cookies”, ces petits fichiers décriés qui suivent à la trace l’internaute et permettent de cibler très finement la publicité, en lui donnant la possibilité de les rejeter lorsqu’il navigue sur internet.

“Les cookies concernés sont ceux qui conservent les données personnelles des internautes, il ne s’agit pas de ceux servant à faciliter la navigation”, a-t-on précisé à l’AFP au ministère de l’Industrie.

Les cookies ou “témoins de connexion” sont de petits fichiers déposés sur l’ordinateur de l’internaute au moment où il se connecte sur des sites ou lorsque des publicités s’affichent. Ils permettent ensuite d’enregistrer chacun des sites qu’il visite, et les recherches qu’il effectue.

Les cookies sont souvent critiqués pour l’usage excessif qu’en font les régies publicitaires sur internet, qui créent à partir de ces “mouchards” une base de données recensant l’historique de la navigation de l’internaute et donc ses centres d’intérêt, afin d’afficher une publicité collant au plus près de ceux-ci : la publicité ciblée.

Au ministère, on fait toutefois valoir que nombre de cookies facilitant la navigation seront bien entendu permis : par exemple ceux permettant de sauvegarder dans un “panier” les commandes effectuées sur un site d’e-commerce, d’afficher automatiquement nom d’utilisateur et mot de passe sur un compte e-mail, ou de changer de page sur le site sécurisé d’une banque.

Ces nouvelles dispositions découlent d’une directive européenne qui doit être transposée avant le 25 mai dans la loi française. Le Sénat devrait autoriser jeudi, dans le cadre d’un projet de loi déjà voté en première lecture par l’Assemblée nationale, le gouvernement à le faire par voie d’ordonnance.

Une Commission mixte paritaire (sept sénateurs, sept députés) devra ensuite élaborer une version commune aux deux chambres avant un vote définitif.

Concrètement, “la loi obligera (les sites et régies publicitaires) à informer sur la finalité du cookie” puis à “demander l’accord préalable” avant de le déposer sur l’ordinateur de l’internaute, autrement dit, “lui donner les moyens de s’y opposer” en cliquant sur une fenêtre qui s’affichera, décrypte-t-on à Bercy.

Une perspective qui inquiète le secteur de la publicité en ligne, qui a réalisé en 2010 un chiffre d’affaires de 2,3 milliards d’euros en France.

Par certains aspects, ces restrictions “frisent l’aberration totale”, s’est ainsi indigné Jérôme de Labriffe, président du bureau de promotion de la communication interactive IAB France.

“Sur le principe de donner la main à l’utilisateur, je dis : +Oui+, car c’est le sens de l’histoire”, mais “imposer une restriction très contraignante sur les cookies est quasiment inapplicable: ça va devenir ingérable de devoir lui demander son assentiment à chaque fois qu’il ouvre une page !”, a-t-il prévenu.

Les connaisseurs du secteur s’attendent d’ailleurs à des batailles juridiques autour de la définition des cookies qui seront touchés par cette nouvelle réglementation.

“Il y a là une part d’interprétation juridique importante”, résume Alain Pannetrat, ingénieur-expert de la Commission nationale Informatique et Libertés.

“La directive prévoit plusieurs exceptions, que les opérateurs vont immédiatement prévoir dans leurs conditions générales, afin de contourner” la loi, regrette de son côté Jérémie Zimmerman, de La Quadrature du Net, association militant pour les droits sur internet.

“Cela pourrait donner lieu à des questionnements juridiques intéressants mais il y a fort à parier qu’ils vont s’engouffrer dans cette faille”, selon lui.