Russie : la folle envolée du prix des pommes de terre

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à Sochi (Russie), le 12 août 2010 (Photo : Mikhail Mordasov)

[17/02/2011 14:22:26] MOSCOU (AFP) Sur un marché du nord de Moscou, les clients se désolent: depuis l’été dernier, les prix du sarrasin, des pommes de terre ou encore du chou ne cessent de grimper, au point que ces produits, au coeur de l’alimentation russe, deviennent plus chers que certains fruits exotiques.

“Depuis cet été, les patates sont devenues hors de prix”, peste Marina, 30 ans, une habituée du marché. Et de fait: le kilo de pommes de terre a quasiment doublé, passant de 25 roubles à plus de 40 en l’espace de deux mois, confirme une vendeuse. Au supermarché, le prix peut atteindre 100 roubles (2,5 euros).

Un peu plus loin, devant un étal de fruits et légumes, Maria, retraitée, avoue réfléchir à deux fois avant de faire un achat. “Tout a augmenté: le saucisson, la viande, le lait… sans parler des légumes. Ca n’est plus possible! Du coup, j’achète moins de choses”, soupire-t-elle.

Comme elle, de nombreux acheteurs ont réduit leurs emplettes, au grand dam des commerçants, qui subissent eux aussi la hausse des prix de la part des fournisseurs.

“Quand un client m’achetait avant deux ou trois briques de lait, il n’en prend plus qu’une maintenant”, constate Ruben, un vendeur de produits laitiers.

Pas étonnant, reconnaît cet homme aux cheveux grisonnants: “en moyenne, un pack coûte aujourd’hui 37-38 roubles, contre 30-32 il y a deux mois”.

Et ce n’est pas le pire. “Cet été, le paquet de gruau de sarrasin coûtait environ 40 roubles. Aujourd’hui, il se vend 120 roubles”, indique Lida, derrière le comptoir de son épicerie.

La raison principale de cette hausse vertigineuse? La sécheresse sans précédent qui a frappé la Russie cet été et détruit un tiers des récoltes à travers le pays.

A la suite de cette catastrophe naturelle, “il y a eu plusieurs vagues de hausse des prix”, explique Natalia Orlova, économiste de la banque moscovite Alfa Bank. “D’abord, ceux du pain et du sarrasin, puis celui du lait et maintenant celui de la viande”.

Selon l’agence fédérale des statistiques Rosstat, le prix moyen du panier de la ménagère a augmenté sur le seul mois de janvier de 5,5%, pour s’établir à 2.769 roubles (70 euros environ), alors que le revenu moyen en septembre 2010 était de 18.240 roubles (460 euros environ).

L’inflation sur le marché mondial, provoquée par une mauvaise météo dans de nombreux pays et la hausse de la demande, notamment en Asie, pèse aussi lourdement sur la situation en Russie, explique Sergueï Aleksachenko, expert de l’Ecole supérieure d’Economie (HSE).

“Pour les céréales, la viande, l’huile de tournesol, pour le sucre, le lait, les prix russes sont fixés par rapport aux prix mondiaux”, dit-il.

D’autant que face aux pénuries occasionnées par les récoltes perdues, la Russie est contrainte d’importer certains produits de base. Rien qu’en décembre, les importations de pommes de terre ont été multipliées par dix et celles de choux par quinze.

Comble de l’absurde, le kilo de bananes, qui se vend entre 50 et 60 roubles, est ainsi bien souvent moins cher que celui de pommes de terre.

Un casse-tête pour les autorités russes, alors que des législatives et une présidentielle sont prévues en 2011-2012. Officiellement, le gouvernement continue de tabler sur une inflation annuelle maîtrisée à 6-7%.

La semaine dernière, le président russe Dmitri Medvedev mettait la pression sur la ministre du Développement économique Elvira Nabioullina, déclarant que la principale bataille du gouvernement était la maîtrise de l’inflation.

Fin janvier, le vice-ministre du Développement économique, Andreï Klepatch, indiquait ne pas exclure de plafonner les prix de certaines denrées.