à Bai Chay, le 18 février 2011 (Photo : Hoang Dinh Nam) |
[20/02/2011 10:41:55] HANOI (AFP) Le naufrage d’un bateau dans la baie d’Halong, qui a fait douze morts, la plupart des touristes étrangers, est le résultat d’un tourisme qui vise les routards sans gros moyens, en leur proposant des prix défiant toute concurrence, mais au mépris de la sécurité.
“Vous savez pourquoi autant de jeunes sont morts? Parce que c’était une promenade très bon marché”, déclare un agent de voyage ne souhaitant pas être cité, installé dans le Old Quarter, le quartier touristique de Hanoi.
Dix touristes étrangers venus des Etats-Unis, de Suède, de Russie, de Grande-Bretagne, du Japon, de France et de Suisse sont morts jeudi lorsque leur bateau a coulé avant l’aube, les surprenant dans leur sommeil.
Les deux autres victimes sont un Australien d’origine vietnamienne et un guide vietnamien.
Selon des informations de la police locale, le bateau “Dream Voyage”, qui a été repêché vendredi, a sombré en raison de la rupture de la coque inférieure.
Les touristes peuvent trouver des excursions de deux jours sur la baie d’Halong à 35 dollars US (25,50 euros), mais les bateaux ont alors des normes de sécurité au rabais, soulignent plusieurs agents.
George Fosmire, qui est l’un des neuf touristes survivants –mais dont la compagne a péri–, avait payé 42 USD cette excursion.
“Si les gens veulent l’excursion premier prix, je leur dis que le bateau est vieux et que la nourriture n’est souvent pas suffisante”, déclare à l’AFP l’agent de voyage de Old Quarter.
“Si vous voulez un tour bon marché, je peux vous le trouver, mais le bateau n’est pas bon, la nourriture n’est pas bonne et le guide est grincheux”, renchérit un autre agent, de l’agence Friendly Hotel Travel.
Il montre un album avec les photos d’un bateau plus récent, dont les excursions sont proposées au prix de 83 USD pour deux jours. “Avec ce bateau, il n’y a jamais eu d’accident”, déclare-t-il.
Les bateaux offrant les excursions bon marché sont souvent en bois et ressemblent à des jonques chinoises, mais elles chavirent facilement en cas d’orage, ne disposent d’aucun équipement électronique d’alerte et l’équipage n’a pas de formation en cas de difficulté, explique sous couvert d’anonymat un connaisseur des pratiques marines dans la baie d’Halong.
Ce haut lieu du tourisme vietnamien compte quelque 400 bateaux d’excursion, dont une vingtaine de luxe.
Kurt Walter, directeur des excursions haut de gamme à bord de l’Emeraude, un navire de sept ans à la coque d’acier, estime que cet accident devrait faire prendre conscience de la nécessité de réelles mesures de sécurité.
“Nous avons des exercices d’urgence et d’alerte à l’incendie tous les mois. Nous avons sans doute le meilleur équipement possible pour naviguer sur la baie par zéro visibilité”, et le capitaine, français, du navire a quarante ans expérience, déclare M. Walter.
Mais à 209 USD pour la promenade la moins chère, les prix de l’Emeraude sont hors de portée de la foule des jeunes routards qui se pressent dans les rues d’Old Quarter.
Plusieurs jeunes touristes ont du coup renoncé à passer la nuit sur un bateau, sans savoir que de toute façon les excursions de nuit avaient été provisoirement suspendues.
“Nous allons sur la baie d’Halong demain mais nous ne passerons pas la nuit sur un bateau”, déclare Axel von Bergen, un Suédois de 22 ans. “Ces bateaux de nuit me font peur”.
Même son de cloche chez Carter Keith, un Américain de 25 ans. Ce genre d’accident “vous y fait réfléchir à deux fois”, dit-il.