informations en ligne Mediapart, en juillet 2010 (Photo : Martin Bureau) |
[22/02/2011 14:02:22] PARIS (AFP) En quête de nouvelles sources de financement, les médias en ligne français indépendants lancent début mars Jaimelinfo.fr, une plateforme de “crowdfunding” (financement collectif) qui permet aux lecteurs de financer directement reportages, enquêtes et projets de développements.
Porté par Rue89, qui a déjà associé une cinquantaine de sites ou blogs (Mediapart, TerraEco, OWNI, Arrêts sur images, Cafebabel, Myeurope …) au projet, Jaimelinfo s’inspire de Spot.us.
Lancé aux Etats-Unis en 2008, Spot permet aux internautes de donner de l’argent pour contribuer à la réalisation de reportages proposés par des journalistes indépendants. En 2009, une enquête sur un amas de déchets flottants dans le Pacifique, financée à hauteur de 6.000 dollars (4.400 euros), avait même valu à son auteur d’être ensuite publiée dans le New York Times.
Pour Jaimelinfo, le concept est toutefois plus large: ce sont les sites d’infos, et non des journalistes, qui vont proposer de financer des reportages, “mais également de contribuer à leur fonctionnement et à leur développement”, explique Laurent Mauriac, président de Jaimelinfo et journaliste à Rue89.
“Beaucoup de sites comme Rue89 ont bâti une communauté de lecteurs fidèles, explique-t-il. Celle-ci peut trouver de l’intérêt à participer à la construction du modèle économique”.
Pour autant, nul n’imagine que le porte-monnaie des internautes va du jour au lendemain bouleverser l’économie des médias en ligne.
“Il ne faut pas fantasmer”, prévient Laurent Mauriac. Selon lui, “la clé de la réussite, c’est d’avoir un modèle économique fondé sur plusieurs sources de revenus” et Jaimelinfo “peut être une source de revenus supplémentaires” qui, de surcroît, “aide à développer la qualité des contenus”.
“C’est expérimental, insiste-t-il, on ne sait pas trop ce que cela va donner. Ca va beaucoup dépendre de la manière dont la plate-forme va être promue” (par les sites partenaires).
Sur le terrain du “crowdfunding”, une expérience a cependant déjà été lancée fin octobre en France avec Glifpix.fr, une plate-forme similaire à Spot.us. Et son peu de succès invite encore plus à la prudence.
En quatre mois, une vingtaine de projets ont été proposés par des journalistes, mais aucun n’est aujourd’hui en mesure d’être réalisé. Le plus populaire – “De Bollywood à la France, parcours d’une culture épicée et édulcorée” – n’a récolté que 120 euros sur les 1.378 nécessaires à sa réalisation.
“C’est vraiment un essai. On n’est pas du tout sûr au départ qu’il y ait un marché pour ça en France. On s’est donné six mois pour apprendre et pour voir”, explique Hélène Huby, chef de projet Glifpix.
Selon elle, pour qu’un reportage soit mis en route, il faut que les journalistes “se donnent à fond et créent une dynamique” de promotion de leurs sujets. Mais, après quatre mois, le bilan est décevant.
“On n’a pas cette culture de promotion de ses propres projets comme aux Etats-Unis, et c’est particulièrement vrai avec les journalistes”, souligne Hélène Huby, qui relève une autre difficulté: “Ceux qui ont de très bons sujets ne vont pas forcément le mettre sur une plate-forme” afin de le réserver aux médias traditionnels.
Pour autant, la chef de projet ne conclut pas à un échec et réfléchit à de nouvelles orientations.
“On a commencé sans ligne éditoriale précise et la conclusion est très nette: tout ce qui est international et sujets généraux, ça ne fonctionne pas, dit-elle. Mais tout ce qui axé +sujet de communauté+ fonctionne mieux: lorsque des gens sont très intéressés par un thème, ils sont davantage prêts à le financer”.