L’UE se rapproche de sanctions à l’encontre du colonel Kadhafi

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étrangères Jean Asselborn et son homologue italien Franco Frattini à Bruxelles les 21 février 2011 (Photo : Georges Gobet)

[23/02/2011 13:39:47] BRUXELLES (AFP) L’Union européenne se rapproche de sanctions à l’encontre du colonel Mouammar Kadhafi et son régime face à la violence de la répression, actant l’échec de sa politique de rapprochement menée depuis des années avec le dirigeant libyen.

Après la Finlande et l’Allemagne, la France et le Luxembourg sont montés au créneau mercredi pour demander qu’on sévisse à l’encontre du dirigeant libyen et des auteurs de la sanglante répression dans le pays qui a fait plusieurs centaines de morts.

Le président français Nicolas Sarkozy s’est prononcé en faveur de “sanctions concrètes” de l’UE, ciblées contre des caciques du régime, et souhaité la suspension des relations économiques et financières avec Tripoli.

La veille pourtant, plusieurs grands Etats européens hésitaient encore, estimant que la priorité était l’évacuation de leurs ressortissants plutôt qu’à des sanctions. “Mais entretemps, Kadhafi a parlé et tout le monde partage la même analyse: ça tourne très mal sur place”, commente un diplomate européen.

“C’est un homme dérangé, un homme malade, qui a parlé, mais aussi un homme dangereux”, juge le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères Jean Asselborn pour qui des sanctions de l’UE sont imminentes.

L’Espagne a été le premier pays de l’UE mercredi à estimer que le colonel Kadhafi, au pouvoir depuis près de 42 ans, n’était plus un interlocuteur légitime pour l’Europe.

Même le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini a haussé le ton, après n’avoir cessé de plaider en faveur d’une extrême retenue face à la Libye du fait du risque d’un afflux d’immigrés clandestins sur les côtes de son pays. Il y a “une limite” au-delà de laquelle on ne peut “rester silencieux”, a-t-il dit mercredi.

La question de sanctions devait être abordée dans l’après-midi par les ambassadeurs permanents de l’UE à Bruxelles et “plusieurs idées” sont sur la table, a indiqué la porte-parole de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, Maja Kocijancik.

Outre un gel des avoirs et des interdictions de visa à l’encontre du clan Kadhafi, l’Europe dispose d’un levier potentiel autrement plus important: l’arrêt de ses importations d’hydrocarbures en provenance de ce pays.

Les livraisons de gaz à l’UE représentent 55% du Produit intérieur brut libyen, alors qu’à l’inverse pour l’UE elles ne représentent pas une part importante de ses importations, selon la Commission européenne.

L’Europe a d’ores et déjà suspendu mardi ses négociations sur un tout premier accord de partenariat avec la Libye, entamées en 2008. L’UE est aussi à l’initiative d’une session spéciale du Conseil des droits de l’homme de l’ONU qui aura lieu vendredi sur la situation en Libye.

Les Européens tournent ainsi sans gloire la page du réchauffement de leurs relations avec la Libye, entamé dans la foulée du renoncement officiel par Tripoli, en 2003, à ses programmes d’armes de destruction massive.

En 2007, Nicolas Sarkozy lui avait déroulé le tapis rouge à Paris en signant un accord de coopération nucléaire civile avec la Libye. Son homologue italien Silvio Berlusconi a signé en 2008 un important accord de coopération économique.

“Il est évident que toutes les mesures prises dans l’espoir que Kadhafi devienne un acteur responsable de la Méditerranée n’ont pas abouti au résultat recherché”, commente Alvaro de Vasconcelos, président de l’Institut d’étude de sécurité de l’UE.

A ses yeux, Mouammar Kadhafi n’accordera “aucune importance aux sanctions”. En revanche, “ce qui peut lui faire peur, c’est la menace d’une justice internationale et aussi l’utilisation de la force pour empêcher qu’il tue son propre peuple”.