Une Tunisie qui ment, une autre à laquelle on a menti; une Tunisie qui a spolié,
une autre qui a été spoliée; une Tunisie qui s’est enrichie, une autre qui s’est
appauvrie: voici l’image qui restera, sans doute, dans bien des esprits après
les révélations faites, depuis le 14 janvier 2011, sur les années du règne Ben
Ali. En précisant que la première Tunisie était composée de personnes sangsues
qui terrorisaient la deuxième.
Ben Ali a, force est de le constater, dessiné les contours d’une société
inégalitaire fruit d’une totale «schizophrénie politique» voulue qui ne prend
aucunement en compte les intérêts du pays. C’est pour ainsi dire «docteur Jekyll
et de M. Hyde»: «chef d’Etat» en apparence; dictateur, machiavélique, vil et
profondément escroc en réalité; ne pensant qu’à ses intérêts propres -bassement
mercantiles- et à ceux de sa famille et belle-famille.
Mensonge, d’abord, parce que Ben Ali a bien caché son jeu. Pour s’en convaincre,
il faut se remémorer ces discours, conseils des ministres, visites inopinées et
autres entretiens qui donnaient l’impression que l’heure était au travail. Que
ne nous a-t-on pas gargarisé de slogans creux comme ceux de «pays émergent», de
«décollage économique» et encore d’«Etat de doit et des institutions».
Certes les Tunisiens n’étaient pas dupes et savaient d’expérience que tout était
loin d’être parfait. Mais, il s’est avéré que c’était tout faux. Y compris les
statistiques de la Banque mondiales et autre Fonds monétaire international.
Tout le monde a fini, évidemment, par découvrir le pot aux roses. Ces
institutions publiaient des chiffres produits par des institutions tunisiennes à
la solde du pouvoir. Les statistiques «locales», présentées à longueur de
colonnes, faisaient, assure plus d’un, l’objet de manipulations. On «retardait»,
par exemple, des exportations à l’année suivante pour qu’elles ne décrivent que
«la réalité» voulue.
A une très grande échelle
Les révélations qui remplissent également aujourd’hui les colonnes des journaux
montrent que le vol se faisait à une très grande échelle. Il était systématique.
En témoignent ce trésor découvert dans les caches du Palais de Sidi Dhrif, du
côté de Sidi Bou Saïd. En témoignent également ces fermes, entreprises et
participations, terrains et autres biens exposés maintenant au vu et au su de
tout un chacun.
Comme ces pratiques d’esclavagisme d’un autre âge qui avaient droit de cité dans
un pays qui se vantait d’avoir réalisé de «grandes avancées» à tous les niveaux,
notamment au niveau social: scolarisation des enfants, espérances de vie,
participation des femmes, habitat, couverture sociale, croissance, exportation,
solidarité,…
Les nouveaux bâtiments et équipements sortis de terre, les lois et autres textes
réglementaires, jamais appliqués, étaient des mensonges qui faisaient croire que
le pays amorçait un réel démarrage pour asseoir une société meilleure. Bluffés
jusqu’à la lie, des citoyens ont été, le moins qu’on puisse dire, trahis.
Une honte!