Tunisie – Tribune : La nouvelle dictature

Dans le LAROUSSE, on lit la définition mot à mot de la Dictature du prolétariat:
«période transitoire durant laquelle les représentants du prolétariat devront
exercer tous les pouvoirs pour détruire l’Etat bourgeois et permettre le passage
à la société sans classes, dans le marxisme».

Ce qui se passe actuellement en Tunisie ne diffère guère de cette définition: un
groupe s’autoproclamant «Conseil de Protection de la Révolution» (on ne sait par
quelle légitimité?), essaie par l’intimidation de confisquer tous les pouvoirs
et d’imposer ses choix à tout un peuple sorti à peine d’une dictature
sanguinaire.

A écouter Hamma Hammami s’exprimer sur la démission de Mohamed Ghannouchi et
exiger le départ de tous les ministres «venant de France» et ayant des
orientations qui lui déplaisent, ainsi que le départ de Afif Chelbi ayant eu le
tort (?), d’après ses dires, d’avoir collaboré dans le processus de
privatisation de certaines entreprises publiques, on se demande si M. Hammami ne
considère pas que le peuple l’ait déjà élu président de la République et choisi
le Communisme comme doctrine pour gérer le pays? Une doctrine d’un autre âge que
défendent encore des gens vivant sur une autre planète!

L’extrême gauche et l’extrême droite se rejoignent

A écouter Rached Ghannouchi parler du nouveau Premier ministre Béji Caid Essebsi,
le décrivant comme sortant «des archives du Bey», on se demande s’il se croit
plus compétent et plus apte à ce poste que ce grand Monsieur dont l’intégrité,
l’expérience, le savoir-faire et le savoir-vivre sont plus que reconnus.

Rached G. oublie-t-il qu’il sort lui des archives du Moyen-âge, avec sa lecture
rétrograde de notre religion, un discours populiste des plus décevants et un
désir de vindicte qu’il nous dévoile désormais au grand jour. A-t-il été investi
d’une mission divine dont on n’est pas encore informé? Mission consistant à
mettre le pays à genoux et vivre alors d’amour et d’eau fraîche!

A écouter M. Brigui de l’UGTT réagir en direct sur Hannibal TV à la même
nomination en déclarant que «l’UGTT n’ayant pas été consultée, refuse cette
nomination et œuvrera à la chute du gouvernement», on se rend compte à quel
point lui et M. JRAD sont capables d’aller dans l’arrogance, l’entêtement et la
soif du pouvoir, quitte à mettre le pays à feu et à sang! Et on en oublierait
même que l’UGTT a approuvé toutes les décisions prises par l’ancien gouvernement
concernant les entreprises publiques et à leur tête celle concernant Tunisair.

Selon quelle légitimité ces messieurs se donnent-ils le droit d’arbitrer au nom
du peuple?

Messieurs R. Hammami, R. Ghannouchi, Brigui, Jrad et consorts seraient-ils plus
éclairés, plus nationalistes et plus patriotes que le reste du peuple tunisien?

Seraient-ils plus compétents et capables que M. Caid Essebsi pour redonner
confiance à la Communauté internationale dont nous avons grand besoin pour
reconstruire le pays?

Ce groupe jusqu’au-boutistes, déconnectés des réalités économiques, n’ayant
comme bagage que des slogans creux, entraînant derrière eux des lycéens et un
public facile à manipuler, se foutent des intérêts du peuple et du pays et
veulent imposer immédiatement et sans attendre le verdict des urnes, des choix
politiques et des orientations économiques aux conséquences désastreuses.

Le blocage qu’ils provoquent, alors qu’il n’existe en réalité aucun risque de
déviation ni retour en arrière sur les choix démocratiques, paralyse hauts
responsables, cadres, dirigeants en les empêchant de se concentrer sur leur
tâche et leur objectif de redressement de la situation et démoralise même les
ouvriers voyant leurs entreprises perdre des commandes.

Mais est-ce leur préoccupation ?

La persistance de l’insécurité et des incertitudes sont en train de provoquer
l’écroulement de pans entiers de notre économie et d’engendrer la fermeture de
dizaines (et bientôt de centaines) d’entreprises, de faire partir les
investisseurs étrangers et de mettre en péril des MILLIONS D’EMPLOIS!

Par leur égoïsme et leur irresponsabilité, ces démagogues de tous bords
assumeront seuls les conséquences de la débâcle que connaîtra le pays.

Ils assumeront seuls l’échec d’une révolution à laquelle tous les Tunisiens ont
contribué. Une révolution qui nous a donné tant d’espoir et suscité admiration
et sympathie dans le monde.

Mais même s’ils seront jugés pour leur crime et leur trahison dans quelques
années, en quoi cela nous avancerait-il?

Nous serions déjà dans l’abime.