L’inquiétude monte parmi les promoteurs immobiliers. Non seulement la plupart des chantiers sont à l’arrêt, mais il ne se vend plus un seul logement depuis près de deux mois, et le nombre de logements invendus se situerait autour de 35.000 –voire plus pour certains.
A l’instar du reste de l’économie, la promotion immobilière est en difficulté. Peut-être même sensiblement plus que les autres activités. Plusieurs opérateurs de ce secteur en ont fait le constat mardi 1er mars 2011, à l’initiative d’ORSAF, la société organisatrice du Salon de l’Immobilier Tunisien à Paris (SITAP). «Nous applaudissons tous la révolution et la transition démocratique, mais nous sommes tous préoccupés par la situation du secteur», résume Hamadi Lahmar. Le responsable de la communication d’ORSAF explique les raisons de ce malaise: «On compte aujourd’hui 35.000 invendus. Depuis deux mois, il n’y a pas de candidats à l’achat de logements. Les chantiers sont en panne. L’administration n’étudie plus les dossiers d’autorisation de bâtir. Bon nombre d’opérateurs de ce secteur sont lourdement endettés».
Anis Ben Jemaa rappelle que ce sont «toutes les activités qui tournent au ralenti ou sont à l’arrêt: les Tunisiens n’achètent plus de voitures, aussi, et ne dépensent plus que pour l’alimentation, et, peut-être un peu, pour se distraire». Ce jeune promoteur pense même que le nombre de logements invendus est supérieur à 35.000. Et il impute l’augmentation de ce stock à l’arrivée sur le marché de ce qu’il appelle «les intrus» -agriculteurs, industriels, médecins, etc., qui «ont commencé», il y a quelques années, à investir dans ce secteur.
«A un moment donné, on ne comptait en Tunisie que 10 promoteurs immobiliers pour 9 millions d’habitants. Aujourd’hui on en a 2.000 pour 11 millions de Tunisiens. Ce n’est pas normal qu’on donne des agréments avec autant de facilité». Et s’il y a aujourd’hui des chantiers à l’arrêt, ce promoteur pense qu’il s’agit justement de ceux des intrus ou de promoteurs qui «ont une dizaine de chantiers en même temps et sont confrontés à la pénurie de maçons dont une bonne partie est partie en Libye».
Bien qu’il ne croie pas que le stock de logements invendus ait atteint les 35.000 unités, Faouzi Ayadi de bourseimmo.com.tn constate que les promoteurs immobiliers et les autres opérateurs de ce secteur, notamment les agences immobilières, sont «depuis janvier en chômage technique».
Même son de cloche chez Abderrazak Ben Mahmoud, doyen du secteur qui, sans contester le chiffre avancé par Hamadi Lahmar concernant les logements invendus, voudrait que les promoteurs évitent de crier cette vérité sur les toits, «car tous les secteurs sont en difficulté et tout le monde a peur». Et puis, observe-t-il, «la question des invendus n’est pas nouvelle» et la mévente ne touche pas toutes les catégories.
S’il concède que dans le haut de gamme, où les prix vont «de 300.000 à 500.000 dinars, on ne peut pas vendre facilement», le doyen des promoteurs immobiliers en Tunisie affirme qu’«il n’y a pas de problème de vente des logements économiques».
Ce qui ne l’empêche pas de révéler que «les banques ont peur» et que certaines d’entre elles «ont suspendu leurs préfinancements».