Les combats en Libye commencent à toucher le pétrole, comme redouté

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est de la Libye, le 9 mars 2011 (Photo : Roberto Schmidt)

[10/03/2011 14:22:11] BENGHAZI (Libye) (AFP) Les scénarios pessimistes sur les conséquences de la crise en Libye sur la production pétrolière du pays commencent à se réaliser: la production a chuté de 66% selon le régime dont les frappes aériennes ont touché mercredi une installation pétrolière.

Le numéro un libyen Mouammar “Kadhafi montre ses véritables intentions. Soit il contrôle le pétrole, soit il se met à le bombarder”, a déclaré jeudi Fethi Faraj, conseiller auprès de la compagnie pétrolière Agoco (Arabian Gulf Oil Company), l’un des producteurs de brut en territoire libyen.

Il est aussi responsable du Comité civil, dirigeant Tobrouk depuis que la ville est tombée aux mains de l’insurrection qui contrôle la région pétrolifère de l’Est libyen. Tobrouk est situé à la frontière avec l’Egypte.

Des raids menés par l’aviation du régime libyen à Ras Lanouf, à 650 km à l’est de Tripoli, un très important terminal pétrolier du pays contrôlé par les rebelles depuis vendredi, ont touché des installations pétrolières.

“Ce que nous craignions depuis le début s’est produit avec le bombardement d’installations pétrolières par l’artillerie et les avions du régime Kadhafi”, a déploré le porte-parole du Conseil national de transition mis en place par l’opposition, Abdelhafez Ghoqa.

“Des puits de pétrole ont été bombardés, ainsi que des installations pétrolières”, selon lui.

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érence de presse à Tripoli le 9 mars 2011 (Photo : Mahmud Turkia)

Le chef de la Compagnie pétrolière nationale, Choukri Ghanem, a minimisé depuis Tripoli les dégâts, affirmant que seule une “petite installation de stockage”, qui contenait 200.000 barils de diesel, avait été touchée et que la production n’avait pas été affectée.

Il a toutefois reconnu que la production de pétrole avait été divisée par trois depuis le début de l’insurrection mi-février, passant de 1,6 million de barils par jour à 500.000 b/j.

Cette baisse considérable est due au manque de main d’oeuvre, les étrangers ayant quitté le pays et les Libyens restant chez eux en raison des violences, a-t-il indiqué.

Mais Fethi Faraj a avancé des chiffre plus alarmants encore.

“La production de brut a atteint un niveau historiquement bas, à environ 20%” de ce qu’elle était il y a moins d’un mois selon lui.

Sur la chaîne de télévision d’Etat, le colonel Kadhafi a accusé mercredi l’Occident de tramer un complot pour “contrôler le pétrole”.

Dans l’Est, seuls deux pétroliers ont embarqué du brut à destination de la Chine ces trois dernières semaines, et la production est très ralentie, selon M. Faraj.

A Tobrouk, “nous avons (produit) un million de barils, pour une capacité de stockage de cinq millions de barils,” indique-t-il. “A ce rythme, il nous faudra encore deux semaines avant de pouvoir exporter à nouveau du brut”.

Les prix du brut ont monté en flèche depuis le début le 15 février de l’insurrection contre Mouammar Kadhafi en Libye, pays membre de l’Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep), et quatrième exportateur de brut en Afrique, avec 1,8 millions de barils par jour.

Toutefois, les prix du pétrole se repliaient légèrement jeudi au cours d’échanges européens, après avoir bondi de près de trois dollars la veille à Londres. A New York, le baril de référence reculait égalementl.

La Libye exporte la majorité de son pétrole vers l’Europe: l’Italie (32% de sa production), l’Allemagne (14%), l’Espagne (10%) et la France (9%) sont ses principaux clients.

Selon l’agence JP Morgan, l’Europe, qui souffre d’une carence de 500.000 à 800.000 barils par jour en raison de la crise libyenne, pourrait se trouver dans une situation inconfortable si la pénurie venait à durer.

Selon des analystes de Barclays Capital, même en cas de consolidation de la situation, “un retour (de la Libye) sur le marché mondial serait difficile, et peut-être lent”.