Depuis le 14 janvier, nous ne cessons d’assister à une série de cafouillages dans l’appareil judiciaire, dont nous ne saisissons pas le pourquoi ni le comment.
«Devons-nous vivre sous la pression de l’Avenue Bab Bnet, bloquer les intérêts des groupes, toutes les entreprises tunisiennes en désignant des administrateurs judiciaires qui n’ont parfois pas les compétences nécessaires pour gérer une entreprise ou un groupe ou bloquer l’économie? Très grave», affirme Me Ramzi Jebeniani, avocat à la cour.
Tous les jugements qui ont instauré des administrateurs judiciaires après le 14 janvier ont suivi la même procédure sans aucun souci du détail ou de la spécificité de chaque entreprise. On a choisi la facilité au mépris des intérêts économiques. Car chaque cas a sa spécificité.
Une entreprise dont le capital est d’un million de dinars, dont 20% seulement des actions sont détenus par l’un des membres de la famille Ben Ali-Trabelsi, doit-elle subir les affres de la vindicte populaire entérinée par la justice? Une entreprise dont les comptes sont nickel et qui ne souffre aucune défaillance tant au niveau de la gestion qu’au niveau des ressources doit-elle être sanctionnée sous prétexte que le PDG a eu des relations de travail avec les Ben Ali-Trabelsi ou leur a été proche?
Un exemple, celui de la maison Peugeot dont les actionnaires ont été doublement victimes de la famille avant le 14 janvier et de la «révolution» après le 14 janvier.
Et finalement où donc était le Procureur de la République lorsque nombre de propriétaires ont été spoliés de leurs biens, lorsque les biens de l’Etat étaient volés, lorsque les administrations subissaient les ordres et contre ordres de la famille aux dépens des intérêts de l’Etat? Où étaient nos juges lorsque les particuliers se présentaient dans les tribunaux sans recouvrir leurs droits?
Et enfin, où était le groupe d’avocat qui s’attaque aujourd’hui à la Commission sur les malversations économiques et la corruption sous prétexte qu’ils agissaient en réponse aux revendications du peuple tunisien afin de protéger ses droits.
«Qui sont d’ailleurs ces avocats, je ne les connais pas personnellement, ils n’ont jamais, d’après ma connaissance, figuré parmi les défenseurs des droits de l’Homme, de la légalité et de la préservation des deniers publics. Leur acharnement sur la Commission sur les malversations économique suscite en moi certaines interrogations, pourquoi cet acharnement? Ils servent quel agenda? S’agit-il de manipulation? Serait-ce l’expression de la peur de ce que cette Commission peut découvrir? Car s’il y a corruption ou pots de vin au sein de l’appareil judiciaire, il y a au moins trois responsables: l’intermédiaire, celui qui défend et celui qui juge. Toutes les interprétations sont possibles», indique Me Bochra Belhaj Hamida.
Parmi nos juges et nos avocats, ils sont nombreux ceux qui sont honnêtes et intègres, il est temps pour eux de prendre les devants et défendre leur métier noble et leur statut de défenseurs des droits de l’Homme au sens large du terme.