L’or et l’argent flambent, les Français vident les fonds de tiroir

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une bague en or (Photo : Patricia de Melo Moreira)

[14/04/2011 07:20:57] PARIS (AFP) La flambée des cours des métaux précieux amène de nombreux Français à vendre de l’argenterie ou des bijoux de famille, voire des pièces d’or et d’argent retrouvées dans les recoins d’une cave ou d’une maison, selon les professionnels.

Depuis deux ans, “le nombre de clients a doublé”, confie Alexandre Lévy, 26 ans, qui les accueille chez Euro-Pièces d’or, l’un des nombreux bureaux de change spécialistes des métaux précieux, dans le quartier de la Bourse à Paris.

“Beaucoup de gens ramènent des couverts en argent, oubliés dans des tiroirs. Quand il se mettent à nettoyer une maison, ils trouvent aussi des pièces d’argent”, explique-t-il.

Les Français ont toujours aimé les métaux précieux, considérés comme un bon rempart contre les risques d’inflation, rappelle François de Lassus, du courtier CPoR. Et depuis quelques années, des inquiétudes persistantes concernant la valeur des emprunts d’Etat de la zone euro ont réveillé le marché.

En moins de dix ans, le prix de l’or a quintuplé, atteignant lundi un pic de 1.478,18 dollars l’once (32,3 euros le gramme) sur le marché de Londres. L’argent-métal n’est pas en reste, propulsé le même jour à 41,95 dollars l’once (1.480 euros le kilo), un sommet depuis 1980.

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îne en or (Photo : Patricia de Melo Moreira)

“Une simple fourchette en argent peut valoir vingt ou trente euros. Les gens sont très surpris quand on leur dit combien ça vaut”, souligne Philippe Chickli, 43 ans, qui a ouvert en janvier le minuscule Comptoir d’Or Réaumur.

Pour les bijoux anciens, “neuf fois sur dix, les vendeurs sont très agréablement” surpris par le prix offert. Résultat, la moitié d’entre eux reviennent, selon le “livre de police” dans lequel il répertorie toutes les transactions.

Chez Euro-Pièces d’or, les particuliers apportent aussi des “vieilles dents en or”, parfois “quatre ou cinq dans la journée”, mais surtout “beaucoup de bijoux anciens”, dont “de belles choses, des parures, qui doivent ensuite partir à la fonte”, faute d’un marché de l’occasion où les revendre, déplore Alexandre Lévy.

Certains avaient “oublié que leur grand-père leur avait laissé un rouleau de 50 pièces d’or (…) On trouve des pièces dans des cheminées, des pots, des cuisinières”, rapporte Patrick Merson, patron du cambiste Merson.

Dans une vieille maison, l’or déniché était parfois “caché à l’intérieur d’un mur”, se souvient Yan Longagna, cambiste à la Compagnie de la Bourse.

L’heureux découvreur tombe alors rarement sur des bijoux ou des lingots mais plutôt sur des “Napoléon”, ces pièces d’or de 20 francs à l’éffigie de l’Empereur ou de ses successeurs.

Près de 615 millions de “Nap” ont été frappés en France en deux siècles, soit “l’équivalent de 3.000 tonnes d’or”, cent milliards d’euros aux cours actuels, selon François de Lassus. Ces pièces représentent les deux tiers du stock total de métal fin détenu par les Français.

Une partie du pactole a été entre-temps fondue, ou vendue à l’étranger, pour financer l’effort de guerre en 1870, puis en 1914, rappelle-t-il.

Le Napoléon plaît particulièrement car il est plus abordable (196 euros) que le lingot d’un kilo d’or (32.329 euros), selon les cambistes, qui affirment recevoir autant d’acheteurs que de vendeurs.

L’or, considérée en 1923 comme une “relique barbare” par le célèbre économiste britannique John Maynard Keynes, semble même séduire les jeunes.

Alors que l’acheteur-type a longtemps été âgé de 50 à 70 ans, “maintenant vous en avez énormément de 30 à 45 ans”, des “jeunes cadres recherchant une sécurité” pour leurs placements, avec en mémoire “certaines actions achetées à la Bourse à vingt euros qui valent maintenant un euro”, relève Patrick Merson.