Le travail au noir, une fraude qui pénalise lourdement les caisses de la Sécu

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çois Fillon (D) et le ministre du Travail Xavier Bertrand visitent un centre Pôle emploi, le 8 avril 2011 à Vitré (Photo : Damien Meyer)

[15/04/2011 12:30:55] PARIS (AFP) Si les fraudes aux allocations défraient souvent la chronique, le travail dissimulé est la fraude sociale qui pénalise le plus lourdement les caisses exsangues de la Sécurité sociale, justifiant le déploiement de nouvelles parades par les pouvoirs publics.

Le préjudice financier lié au travail au noir, l’un des thèmes du déplacement vendredi à Rennes du ministre du Travail, Xavier Bertrand, est difficile à déterminer. Selon un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires de 2007, le manque à gagner pourrait se situer entre 6,2 et 12,4 milliards d’euros par an.

En comparaison, le montant des fraudes aux différentes prestations versées par le régime général de la Sécurité sociale est plus généralement évalué entre 2 et 3 milliards d’euros (Cour des comptes, 2010).

“Le travail dissimulé reste le sujet le plus lourd en termes financiers et d’enjeu global pour la protection sociale”, avait expliqué le directeur de la Sécurité sociale, Dominique Libault, fin octobre devant la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la Sécurité sociale (MECSS).

En plus des cotisations non versées, le travail au noir peut déclencher par ricochet le versement de prestations sociales indues pour les personnes qui n’ont pas déclaré leurs ressources illégales.

Les Français feraient-ils preuve d’une certaine indulgence face à ce phénomène? “Si les ateliers clandestins sont unanimement dénoncés, le travail dissimulé chez les particuliers ou certains employeurs bénéficie encore d’une tolérance forte”, a jugé M. Libault, plaidant pour plus de pédagogie.

Face à l’enjeu, le gouvernement a accentué ces dernières années les contrôles et les sanctions. Un plan national lancé en 2010 cible l’agriculture, le BTP, la restauration, les services aux entreprises et le monde du spectacle, des secteurs où le travail dissimulé est particulièrement développé.

De nouveaux outils ont aussi été créés: pénalités pour les employeurs quand survient un accident du travail, échange d’informations entre agents des différents organismes ou encore habilitation des agents de Pôle Emploi pour verbaliser les infractions à l’assurance chômage et au travail dissimulé.

Les premiers résultats sont là: en 2010, les redressements mis en recouvrement après des contrôles ont atteint le niveau record de 185 millions d’euros, soit une hausse de 40% par rapport à l’année précédente.

Mais ce motant reste modeste par rapport à la dizaine de milliards d’euros de fraude estimée.

M. Bertrand veut donc accélérer le mouvement, en fixant des objectifs chiffrés aux contrôleurs, a expliqué son entourage à l’AFP. Pour 2011, il a, par exemple, fixé la barre des procès verbaux à dresser à 10.000 et celle des redressements à plus de 190 millions d’euros.

Et une batterie de nouvelles mesures est en cours d’adoption, par le biais notamment du projet de loi sur l’immigration, le travail au noir étant aussi pour le gouvernement un facteur d’immigration clandestine.

Il prévoit par exemple de nouvelles sanctions administratives, en écartant les entreprises fraudeuses d’appels d’offre publics. Les entreprises seront par ailleurs plus systématiquement sanctionnées, financièrement et pénalement, quand leurs sous-traitants emploient des clandestins.

Pour mettre en musique ces dispositifs qui s’accumulent, le gouvernement fonde beaucoup d’espoir sur les CODAF, de nouvelles commissions qui réunissent régulièrement dans chaque département tous les acteurs de la lutte contre la fraude.