Les consommateurs tunisiens, bien qu’ils soient une forte communauté de 10 millions d’habitants, ne semblent pas intéresser les mouvements politiques, en cette période d’effervescence révolutionnaire et électorale.
Pourtant, à y regarder de près, ces consommateurs, pour peu qu’on s’engage à défendre leurs intérêts sur la base de nouvelles règles consacrant l’indépendance des structures d’encadrement, constituent un filon électoral qui peut orienter, de façon déterminante, les résultats des prochaines élections.
Par delà les consommateurs, la consommation constitue une importante source de croissance, autant que l’investissement et l’exportation.
Pour le moment, aucune force politique –ou peu- ne s’y intéresse. Les structures d’encadrement, l’Institut national de la consommation (INC) et l’Organisation de défense du consommateur (ODC), deux structures aux ordres du tandem patronat (UTICA) –administration (ministère du Commerce), continuent, même en cette période révolutionnaire, de diaboliser le consommateur tunisien.
Dans des communiqués rendus publics, de véritables prêchi-prêcha moralisateurs, repris généreusement et sans discernement par les médias, le consommateur est qualifié par l’ODC d’«irresponsable», de «gaspilleur», de «pollueur» et de «boulimique».
Il faut dire que cette organisation, dont le président est cautionné-désigné-intronisé par l’administration, n’a jamais été au service du consommateur. Au nom du slogan antiéconomique «consommer tunisien», elle a constamment occulté de dénoncer la hausse illicite des prix, le mauvais ciblage de la compensation qui, aux yeux de tout le monde, profite plus aux touristes et aux gens nantis qu’aux gens démunis, la mauvaise qualité du produit et du service, la tricherie commerciale (vente conditionnée, refus de vente, spéculation…), le non respect des normes des producteurs, l’importation non réglementaire des produits alimentaires et de santé…
Conséquence : le problème de la consommation en Tunisie réside dans la non crédibilité structurelle des institutions en charge du dossier et dans la sous – utilisation de cette source de croissance pour exercer la pression requise sur les producteurs et prestations de services et partant pour améliorer la qualité à tous les niveaux.
Pour y remédier, tout mouvement politique qui s’engagerait dans son programme à s’occuper des consommateurs et à garantir la neutralité des structures de défense de leurs intérêts a toutes les chances de gagner, non seulement, de précieuses voix mais également de contribuer à la croissance du pays sur des bases saines.
C’est que la non crédibilité structurelle des institutions en charge du dossier en tant que mécanismes devant exercer la pression requise sur les producteurs et prestataires de services pour améliorer la qualité à tous les niveaux, constitue, jusque-là, une frustration majeure qu’il importe de satisfaire en toute urgence.
Pour mieux comprendre ce déficit institutionnel, rappelons que l’INC français sur lequel a été calqué l’INC tunisien se distingue par son indépendance. Cette institution, qui réalise des essais comparatifs et produit des études juridiques et économiques, s’appuie sur un arsenal de médias indépendants.
Au nombre de ceux-ci, figurent le magazine sans publicité, Un million de consommateurs, Consomag, émission télévisée diffusée sur France 2, France 3, France 4 et RFO, le site électronique www.conso.net qui présente le mouvement consommateur, le site www.ctaconso.fr destiné aux jeunes consommateurs, la lettre hebdomadaire INC Hebdo consacrée à l’actualité du consumérisme.
Tout un programme pour les Tunisiens.