Une pensée particulière sera réservée à la Tunisie ainsi qu’à l’Egypte et au Japon lors du festival de Cannes qui se tiendra du 11 au 22 mai 2011. C’est réjouissant. Mais a-t-on pris le temps de penser à une participation plus retentissante afin d’exploiter ce grand rendez-vous mondial et mettre en avant la nouvelle Tunisie et son tourisme -mais pas seulement?.
A cette 64ème édition de Cannes, la participation tunisienne se déploiera autour du pavillon national au village international du festival ainsi que de spectacles de folklore et du patrimoine musical de Tunisie dans la ville. On croit savoir qu’un nombre important de films est attendu au marché du film organisé par la Chambre syndicale des producteurs tunisiens, membre de l’UTICA. Certains films sont retenus dans la compétition officielle du «Short Film Corner» et on y attend le documentaire de Mourad Ben Cheikh sur la révolution, produit pour l’occasion.
Qu’à cela ne tienne! Pourtant et au vu du peu d’informations que l’on dispose sur les détails de cette participation, il semble que le programme reste assez similaire à celui des précédentes participations. Dans cette dimension, il permettra difficilement à la Tunisie de briller à un moment où notre pays continue d’attiser encore beaucoup de curiosités.
Hichem Ben Khamsa est directeur d’une agence en événementiel, un habitué de Cannes et fondateur d’un festival, “Views of America“. A quelques jours de la manifestation, il se demande pourquoi «même avec des compétences tunisiennes qui ont travaillé sur des productions mondiales comme l’ouverture de l’hotel Atlantis à Dubaï et tant d’autres événements, nous tardons à profiter pleinement de notre présence pour briller et donner une nouvelle image à notre pays. Pour générer du business, nous savons le faire, il faut dépoussiérer une bonne fois pour toutes les procédures habituelles et mettre en valeur nos atouts».
Depuis plus de 35 ans, les professionnels tunisiens du cinéma participent au festival de Cannes et malgré leurs entrées, ils peinent à marquer les esprits. Hichem Ben Khamsa tente d’expliquer: «Pourquoi des opérateurs économiques tunisiens ne viendraient-ils pas sur le pavillon pour des réunions d’affaires avec les pros du tourisme ou de n’importe quel autre secteur d’ailleurs? C’est une pratique très courante dans le milieu. Le jour où l’on réalisera la part de revenus du cinéma dans le monde par rapport à d’autres secteurs on changera notre approche. Pourquoi ne pas prendre en compte que le 7ème art est une industrie et qu’il rappporte plus de revenus au Maroc que l’export de tomates, sachant que ce pays est tout de même dans le Top Five des producteurs mondiaux. Le jour où des industriels ou des banquiers seront à Cannes pour faire du réseautage, là nous réaliserons que les choses sont finalement en train de changer».
Du côté du ministère du Commerce et du Tourisme, Slim Chaker, secrétaire d’état au Tourisme, planche sur le dossier. La nouvelle campagne du tourisme tunisien sera lancée sur le marché français début mai et elle coïncidera avec le festival. Amel Kallala, à la direction du marketing, est effervescence. «Notre participation sera massive cette année à Cannes. Je ne peux vous en dire plus mais sachez que nous pensons à une grande soirée et avons plusieurs événements…».
Il faut préciser qu’en marge des compétitions et du festival, Cannes est un des rendez-vous mondains et d’affaires des plus courus du monde. Un rendez-vous qui enregistre le plus grand nombre d’accréditations de journalistes au monde après les Jeux olympiques. Cannes est aussi le lieu où l’on vante les mérites d’une destination touristique mais pas seulement! Les pays ne s’y présentent-ils pas massivement sous leurs plus beaux attraits!
Dans le cercle des initiés, on vous dira que les amis de la Tunisie sont motivés pour valoriser une nouvelle image de la Tunisie. C’est d’ailleurs pour cette raison que Hisham Ben Khamsa s’accroche. L’occasion est en or. Non seulement parce que «nous savons faire mais aussi parce que beaucoup d’amis de la Tunisie veulent nous aider et je vous garantis qu’ils sont autrement plus efficaces que les vieux réseaux de l’ancien régime et même Frédéric Mitterrand. Il est temps de réfléchir avec audace. Arrêtons de réfléchir au moins coûtant, au devis le moins cher».
A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Pour se sortir de la crise, le tourisme tunisien dispose cette année de moyens conséquents pour frapper haut et fort. Il s’agit maintenant de se libérer des vieux réflexes et proposer une nouvelle façon de faire et de présenter la Tunisie.
A j-15 jours, les questions qui s’imposent sont nombreuses: Quand saurons-nous profiter des grands événements internationaux pour donner la plus belle des visibilités à notre pays? Comment traduire le potentiel de la Tunisie et le convertir en nouvelles images? Comment marquer les esprits et révéler au monde cette Tunisie que l’on porte tous en nous? Cette Tunisie d’après le 14 janvier; Une Tunisie inventive, énergique et créative?
La relation entre le cinéma et le tourisme n’est plus à démontrer. Alors que la Tunisie est considérée comme un fabuleux plateau de tournage, elle est aussi un lieu d’événementiel de qualité. Les opérateurs de l’événementiel et du cinéma portent de grandes ambitions et de nombreux projets pour faire en sorte que notre pays brille des 1.000 feux. Leurs compétences additionnées pourraient effectivement donner naissance à la plus belle des participations.
«Profiter de Cannes est primordial. C’est le cœur de notre premier marché, c’est glamour et c’est la plus belle des vitrines pour notre tourisme. Pourquoi ne pas emmener un bout de la Tunisie sur la croisette ? Surprendre et séduire c’est un métier. Cantonner la Tunisie aux mêmes approches serait la réduire. Ce regard démissionnaire et passéiste n’est plus permis», déclare M.K, opérateur dans le tourisme.
Cannes est aussi une occasion pour promouvoir la Tunisie en tant que destination de tournages et potentiel centre régional de production et postproduction pour développer l’industrie du cinéma. En mettant en valeur son riche patrimoine naturel, historique et culturel au même titre que ses ressources humaines et techniques hautement compétitives, cela porterait en avant une industrie en souffrances qui ne chercher qu’à se développer.
Reste à se demander si Cannes et tous les autres grands événements seront un jour considérés comme de vrais outils pour notre image de marque et diplomatie d’influence. Pour le moment, on observe avec attention le mariage tant attendu entre le ministère de la Culture et celui du Tourisme. Espérons que pour Cannes, on annoncera rapidement et prochainement les fiançailles en grandes pompes.