Le tsunami au Japon, coup de grâce pour les Saint-Jacques du Chili

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ésente des coquilles Saint-Jacques dans la baie de Tongoy, à 450 km au nord de Santiago, le 11 avril 2011 (Photo : Romina Ortega)

[26/04/2011 06:44:16] TONGOY (Chili) (AFP) A l’autre bout de l’Océan Pacifique, des centaines de conchyliculteurs chiliens s’apprêtent à changer de vie, victimes distantes du tsunami du 11 mars au Japon, dont l’onde, à 17.000 km, a donné le coup de grâce à la production locale de coquilles Saint-Jacques.

“Je ne crois pas que je vais continuer. Il y a trop de pertes. Il y avait toutes les Saint-Jacques qu’on voulait, et là, regardez…” Patricio secoue la tête en montrant la poignée de mollusques ramenée de sa sortie dans la baie de Tongoy, à 450 km au nord de Santiago.

Comme le reste du littoral chilien, ce village de 5.000 habitants a été placé en alerte tsunami le 11 mars, après la catastrophe meurtrière du Japon.

Et comme ailleurs sur la côte, l’alerte a été levée après le passage de faibles vagues 24 heures après le séisme, sans victime “ni dégâts significatifs”, selon les autorités.

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Vue de la baie de Tongoy, au Chili, le 11 avril 2011 (Photo : Romina Ortega)

Mais après un voyage de 17.000 km, la force de l’onde était réelle. Sous la baie de Tongoy, elle a envoyé promener des blocs de béton de près d’une tonne, qui arrimaient les filets ou “lanternes”, dans lesquelles les coquilles suspendues en étages serrés attendent la maturité, au terme d’un cycle de deux ans.

“Jamais on n’aurait imaginé que cela ferait tant de dégâts. On pensait que la vague mourrait avant d’arriver, ou que viendrait juste une vaguelette”, raconte Eduardo Briones, un autre conchyliculteur de Tongoy.

“Mais ce n’était pas une vaguelette, c’était un courant sous-marin qui a laissé tout sens dessus-dessous”, ajoute-t-il, en décrivant les filets emmêlés et les mollusques prêts à la récolte entraînés au fond de la baie.

Les autorités n’ont pas encore chiffré les pertes à Tongoy, mais elles s’éléveraient à 3 milliards de pesos (4,4 millions d’euros) selon la presse locale, et les conchyliculteurs assurent qu’entre 50 et 100% de la production est perdue à cause du tsunami japonais.

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êcheurs tirent des filets abritant des coquilles Saint-Jacques, le 11 avril 2011 en baie de Tongoy (Photo : Romina Ortega)

La baie de Tongoy était devenue le fief de la Saint-Jacques au Chili, l’un des premiers producteurs mondiaux.

Depuis les années 80, les pêcheurs du village s’étaient peu à peu initiés à l’élevage artificiel du mollusque, nourrissant une demande mondiale en hausse, et délaissant la pêche traditionnelle, plus aléatoire et dangereuse.

En 2006, le kilo de Saint-Jacques rapportait à peu près 15 dollars (10 euros) aux producteurs de Tongoy. Mais le prix avait déjà baissé ces dernières années, à 8,3 dollars, en raison de la concurrence du Pérou voisin, premier fournisseur de marchés européens très friands, comme la France et l’Espagne.

En raison d’une main d’oeuvre moins coûteuse, d’un milieu marin aidant une maturation plus rapide des mollusques, de facilités administratives, “la Saint-Jacques péruvienne est beaucoup moins chère”, explique Franklin Munoz, administrateur de l’entreprise conchylicole Sacmar.

Deux producteurs ont dû fermer l’an dernier, avec 700 licenciements à la clé, sous l’effet de la concurrence du Pérou et de la baisse des cours. Et les cinq restant, contre onze au plus fort du boom, tiennent surtout grâce au marché chilien, dont la demande a augmenté lors de la décennie écoulée.

“Mais on ne pourra plus continuer”, sait déjà Briones. Comme ses collègues, il ne voit d’autre alternative que la reconversion, le retour à la pêche en mer sans doute, après le coup de grâce qu’ils n’ont pas vu venir, depuis l’autre versant de l’océan.