Et oui c’est une phrase qui revient de plus en plus dans la bouche des gens. Devant les poubelles qui s’accumulent, les grèves à télécom, l’autoroute bloquée, etc. C’était mieux avant, comme quoi, sous la dictature «personne ne pouvait ouvrir la bouche»…littéralement.
Mais de quoi parle-t-on au juste? Quel modèle de société voulons-nous? Pourquoi, et par qui, a été faite cette révolution? Est-ce que c’était juste pour déloger un président?
Non, le président n’est rien. C’est le symbole d’un système, d’un modèle de société. Non pas celui du capitalisme… mais celui du capitalisme corrompu, limite féodal, voire mafieux. Et donc plus sauvage que le capitalisme le plus libéral des USA et Cies. Cette révolution a été faite par des gens qui en ont marre.
Marre de la misère des salaires indécents. Est-ce normal qu’un être humain touche 200 d à l’heure d’aujourd’hui? Est-ce que le métier d’agent de municipalité est condamné à être mal payé? Est-il donc moins digne que celui de médecin? Ou de prof?…
Des gens qui en ont marre du chômage. Parce que l’Etat n’a pas fait son rôle de catalyseur de l’économie, de stratège qui aurait dû installer des infrastructures adaptées dans chaque région, pour lancer et booster l’économie dans chaque région, selon la spécificité de la région, c’est-à-dire l’agriculture là où il le faut, l’industrie des mines là où il le faut, etc. Parce que l’Etat n’a pas pensé à adapter le système scolaire aux demandes du marché du travail. Etc.
Des gens qui en ont marre de subir le diktat des grandes entreprises qui, elles, ont des objectifs à remplir, un bénéfice à faire. C’est vrai que ces gens, en majorité, ne comprennent pas toute la complexité de l’économie mondiale aujourd’hui, et ne savent pas que les rapports de force sont très délicats. Parce que, mondialisation oblige, toute la planète se fait concurrence pour attirer les entreprises, et donc l’emploi.
Mais, mais….Je constate, et je suis heureuse de constater, que ces gens ont une telle fougue, un tel refus de l’esclavagisme moderne (essayez donc de vivre avec 200 d par mois), et des diktats du système dans sa globalité… que ces gens nous disent qu’ils n’ont pas fait la révolution juste pour déloger Ben Ali.
Ces gens, ces petites gens, qui sont chômeurs, ou qui travaillent mais qui ont des salaires indécents, indignes, ou qui subissent la pollution qui dépasse les normes internationales autorisées, etc. veulent et tiennent à se faire entendre. Et tant mieux.
Parce que mon idéal pour la Tunisie n’est pas d’être un pays super riche, mais avec toujours (voire plus) d’inégalités sociales, qu’avant. Une espèce de Dubaï de l’Afrique du Nord. Non merci.
Mon idéal de la Tunisie, c’est un pays développé dans le vrai sens du terme, c’est-à-dire où la qualité de vie des gens, de tous les gens, est meilleure. Un pays où l’école et l’université jouent leur rôle formateur et éducateur, où la primauté est à l’emploi, et aux salaires dignes, non pas aux dividendes. Un pays avec des rues propres, et où l’agent de la municipalité est digne, ses enfants vont à l’école et il est propriétaire de son logement. Mon idéal serait un pays comme la Norvège, la Suède ou la France, non pas les USA ou Dubaï. Et justement, la France, par exemple, n’aurait pas pu construire et préserver son modèle social si les Français n’étaient pas aussi «râleurs» dit-on…! Sous-entendre conscients, et fervents défenseurs, de leurs droits.
Où est l’erreur?
C’est dans la façon de le revendiquer. Juste la façon. On n’a pas encore compris la gravité, sur le plan économique et social, des arrêts de travail. Tout le monde a le droit et doit revendiquer ses droits, pour une vie meilleure. Pour que le progrès ait lieu. Simplement on doit le faire avec un brassard rouge sur le bras. En étant à son poste, au travail. Et ça aura bel et bien de l’impact. Elle est juste là l’erreur. Et ça va être simple à corriger, si tout le monde en prenait conscience. Puisque naturellement et évidemment… ça n’était pas mieux avant! Oh que non!