Un billet de 100 yuans (Photo : AFP) |
[09/05/2011 08:01:10] PEKIN (AFP) Confrontée à une pression incessante pour réévaluer sa monnaie de la part des Etats-Unis, qu’elle retrouve lundi pour des discussions de haut niveau, la Chine a récemment paru davantage disposée à les entendre, l’appréciation du yuan lui permettant aussi de combattre l’inflation.
Depuis que Pékin a réinstauré une fluctuation quotidienne du yuan en juin dernier, le renminbi (“la monnaie du peuple”) a gagné environ 5% par rapport au billet vert.
Dans le cadre du dialogue stratégique et économique (SED) sino-américain qui se tient lundi et mardi à Washington, l’administration Obama va renouveler ses appels à une appréciation plus rapide du yuan, mais Pékin ne cédera pas.
“Sur ce sujet, pour être francs, nous avons des points de vue différents qui rendent la discussion nécessaire”, a déclaré la semaine dernière à la presse le vice-ministre chinois des Finances, Zhu Guangyao.
Il y a néanmoins eu “un vrai changement ces derniers mois” de la part du gouvernement chinois, estime Alistair Thornton, économiste chez IHS Global Insight à Pékin.
Les Chinois “reconnaissent davantage ce qui alimente l’inflation (chez eux), à savoir le lien entre le dollar et le yuan, générateur de liquidités dans l’économie”, selon cet analyste.
En échange des énormes réserves de change accumulées par la Chine, qui ont dépassé cette année les 3.000 milliards de dollars, la banque centrale injecte l’équivalent en yuans dans l’économie. Si le yuan vaut plus, cela permettrait d’en injecter moins.
Les dirigeants chinois “sont prêts à laisser la monnaie s’apprécier si cela permet de combattre l’inflation — mais seulement modérément”, explique Patrick Chovanec, professeur d’économie à l’université Tsinghua de Pékin.
Mais “ils restent inquiets de l’impact que cela va avoir sur les exportations. S’ils pensaient avoir réussi à maîtriser l’inflation, leur volonté de laisser la monnaie s’apprécier pourrait en être quelque peu diminuée”, d’après l’universitaire.
La hausse des prix s’est accélérée en Chine pour atteindre 5,4% sur un an en mars, son plus haut niveau depuis juillet 2008.
Comme souvent avant des rendez-vous délicats avec les Américains, Pékin a laissé lundi le yuan atteindre un sommet face au dollar, fixant son cours pivot à 6,4988 yuans pour un billet vert.
Les Etats-Unis vont faire pression pour que la Chine “laisse le taux de change s’apprécier plus vite afin de corriger la sous-évaluation substantielle” du yuan, que des parlementaires américains évaluent entre 20% et 40%, a indiqué un haut responsable du Trésor américain, David Loevinger, avant le dialogue économique et stratégique.
“Il y a 18 mois, le taux de change de la monnaie chinoise était gelé: aujourd’hui il bouge”, a toutefois reconnu M. Loevinger.
Pékin a en effet de plus en plus de mal à contenir l’inflation avec les leviers de la politique monétaire que sont les hausses de taux d’intérêt et le relèvement des réserves obligatoires des banques.
Un yuan réévalué permettrait aussi de donner du pouvoir d’achat aux Chinois en rendant les importations moins chères, alors que le gouvernement veut que la croissance dépende plus de la consommation et moins des exportations et des investissements.
Le mois dernier, le gouverneur de la banque centrale Zhou Xiaochuan a estimé que le niveau des réserves de change “excédait les exigences raisonnables” en la matière.
Et selon le vice-gouverneur de l’institut d’émission chinois, Yi Gang, cité mardi par le China Daily, l’accumulation des réserves de change est devenue la principale raison de l’excès de liquidités dont souffre la Chine.
Pour M. Thornton, ces commentaires montrent que “la seule façon de limiter ces réserves est de laisser le yuan s’apprécier un peu plus vite”.