Une compétition semble s’installer en vu de faire le plus de mal possible au pays. Ses manifestations sont bien visibles. Mais attention, tout le monde risque de perdre au change.
Il s’agit d’une expression française qui daterait des années trente. Elle est utilisée lorsque, dans «une compétition (électorale, hiérarchique,…), parfois puérile, tous les moyens sont bon pour arriver le premier» (dixit le site www.expressio.fr – Les expressions françaises décortiquées.)
L’expression en question? «La course à l’échalote». Force est de constater aujourd’hui que cette expression s’applique bien au vécu quotidien de la Tunisie dans laquelle une course-poursuite semble s’installer en vue de faire le plus de mal possible au pays.
L’épisode des déclarations de l’ancien ministre de l’Intérieur, Farhat Rajhi, illustre bien cette situation. Il est à remarquer, à ce niveau, qu’à chaque fois que le pays arrive à dépasser un accro, un problème ou sort d’un conflit, il y a toujours une partie qui met le feu aux poudres ravivant de nouveau la flamme de la discorde. Comme si ce qui arrive au pays n’était pas déjà assez pénible à vivre.
Tout vouloir et tout de suite
Il est inimaginable de penser que les troubles occasionnés, ici et là, ne sont pas ourdis par des parties qui gagnent –ou pensent, plutôt, gagner- au change. Le Premier ministre du gouvernement de transition, Béji Caïd Essebsi, l’a clairement signifié dans l’entretien accordé, dimanche 8 mai 2011, à trois chaînes de télévision tunisiennes.
Sur le plan politique, d’abord, nombre d’acteurs ne semblent être d’accord sur rien. Chaque fois qu’une initiative, une proposition, une décision sont évoquées, des voix se lèvent pour dire bruyamment non. Les réactions étant accompagnées par une mobilisation à longueur de colonnes de journaux ou carrément dans la rue.
Ce qui est du reste de bonne guerre. L’apprentissage de la démocratie ne pouvant se faire autrement. Il est, toutefois, à remarque que le niet est souvent catégorique. Et que, «dans les coulisses», des manifestations pacifiques se cachent souvent des casseurs qui s’attaquent aux édifices publics et aux biens privés.
Sur le plan social, alors que le pays traverse une situation sécuritaire des plus difficiles, il y a toujours ceux qui continuent à tout vouloir et tout de suite. Exigence de nouveaux recrutements, de nouvelles augmentation de salaires, de primes diverses…: les demandes affluent de partout. Leurs «initiateurs» veulent imposer un dictat. Sit-in, grèves et barrages: les moyens sont sans cesse expérimentés pour faire plier la hiérarchie.
Sur ce plan, c’est aussi de bonne guerre. Mais à condition qu’une négociation s’installe. Et que les partenaires s’entendent sur ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Car, toutes les revendications ne peuvent être satisfaites. Le Premier ministre du gouvernement de transition l’a également clairement signifié dans le même entretien cité plus haut.
Après avoir joué «collectif» pour faire «dégager» le dictateur et son clan, les Tunisiens semblent, aujourd’hui, jouer –égoïstement- «le chacun pour soi». Et ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. Pas plus loin que leur intérêt propre!
Des «échéances sociales» qui font bien mal au porte-monnaie
C’est élémentaire: l’économie est basée sur des équilibres que s’ils viennent à être rompus peuvent faire couler bien des édifices. Lorsque les coûts dépassent les recettes, par exemple, les entreprises coulent. Il est vrai que les entreprises ont toujours des solutions. Mais jusqu’à quand, notamment lorsque l’économie connaît des difficultés structurelles et momentanées?
N’est-ce pas suicidaire? Faut-il attendre que les argentiers annoncent une cessation de paiement pour que l’on saisisse la gravité de la situation? Des secteurs entiers de l’économie sont, à ce propos, sinistrés. Leur quotidien est difficile. Mais également leur avenir. Parce qu’ils ne voient pas clair. Or, toute activité a besoin d’un minimum de prévision!
Les maux que le pays souhaite combattre comme le chômage, et qui ont fait bouger les jeunes en décembre 2010 et janvier 2011, pour une dignité combien légitime, risquent non seulement de perdurer mais aussi de grossir, rendant la situation plus pesante.
Bougera-t-on, enfin, lorsque les employeurs seront dans l’impossibilité de servir les salaires dans beaucoup de secteurs de l’économie? Catastrophique lorsqu’on sait que des «échéances sociales», qui font bien mal au porte-monnaie des Tunisiens, approchent à grand pas, comme Ramadan, l’Aïd et la rentrée scolaire.
Ceux qui ne veulent pas que le calme revienne ont-ils des plans de sauvetage? A moins qu’ils ne s’en soucient guère. Ou qu’ils aient un agenda qui leur dicte de faire pourrir la situation.