Sur fond d’une chanson révolutionnaire de Julia Boutros, diffusée en boucle, à travers des hauts parleurs, les employés de Tunisie Télécom se sont rassemblés, ce jeudi 12 mai 2011, au siège du secrétariat d’Etat aux Technologies de la communication. Un sit-in qu’ils observent déjà depuis deux jours au siège de l’opérateur mais aussi dans toutes les agences, s’agissant de leur troisième depuis la chute de l’ancien régime.
De grandes affiches ornent les murs de l’établissement, s’attaquant au partenaire stratégique de l’opérateur et appelant à la suspension des contrats des salariés, objet de la discorde. Les raisons, cette fois-ci, selon Mongi Ben M’barek, président de la Fédération Général des Postes et des Télécoms relevant de l’UGTT, concernent le désengagement des autorités concernées quant à l’application de l’article 10 de la convention arrêtée le 9 février 2011.
Situation bloquée…
Cet article stipule la suspension des contrats des employés à salaires élevés (communément appelés “Contractuels”) Une décision qui n’a pas été appliquée, selon les grévistes, suite à une opposition du partenaire stratégique, “Emirates International Telecommunications LLC” détenant 35% du capital, et accusé de tous les maux. «Ce sont des contrats illégaux qui enfreignent le code du travail. Le salaire le plus bas est de 4.000 dinars net; ajoutons à cela des primes complémentaires. Le partenaire émirati s’oppose à la décision d’arrêt des contrats alors que l’Etat tunisien est majoritaire dans le capital de la société, et c’est ce qui bloque la situation actuellement», souligne M. Ben M’barek.
Les grévistes contestent violemment la position de l’actionnaire émirati, estimant que ceci va à l’encontre de l’intérêt de Tunisie Télécom. D’ailleurs, la privatisation n’a pas profité, selon eux, à l’opérateur puisqu’aucune expertise n’a été apportée. «L’une des conditions des Emiratis était de réduire l’investissement à 10% alors qu’il dépassait les 30% auparavant. D’ailleurs, dans les réunions des conseils d’administration, les décisions n’étaient prise qu’après l’approbation absolue des Emiratis et non de la majorité. Je pense que ces derniers n’ont pas saisi que la révolution a tout changé en Tunisie et notamment à Tunisie Télécom. Ils ne sont pas parvenus à s’adapter à la nouvelle situation», affirme le président de la fédération.
Des dépassements…
Les contractuels auraient également intervenu dans des transactions malsaines, du temps de l’ancien régime, à l’instar de Bienvu et Havas. Bienvu, propriété des Trabelsi, aurait bénéficié, selon le responsable syndical, de paiements anticipés sans garantie. De même pour certains dossiers en dépouillement, signés par un expert qui n’appartient pas à Tunisie Télécom. «Et je peux vous citer une quarantaine de dossiers de ce type qui engagent les contractuels. Je vous informe que ceux-ci étaient également engagés par une autre société du groupe émirati «IST», ce qui est contraire aux lois sur le travail», ajoute-t-il.
Cependant, ces perturbations à Tunisie Télécom préoccupent beaucoup les clients de l’opérateur historique. Mais il semble que les grévistes essayent de rassurer en signalant que les équipements marchent malgré le sit-in. Les équipes tiennent à assurer la continuité du travail ainsi que la qualité des services. On apprend que certains employés ont été obligés d’observer le sit-in alors qu’ils s’y opposaient. M. Ben M’barek a répondu que ceci peut être vérifié en interrogeant les personnes présentes au sit-in. Une réponse peu convaincante, quoique…
Il assure également que les grands projets que l’opérateur historique a entrepris seront réalisés, à l’instar de la 3G, affirmant que ce projet sera fonctionnel prochainement.
Sur la publication des certains données confidentielles de Tunisie Télécom, telles que la grille salariale, il indique que ces données sont publiées dans l’intention d’informer le grand public sur les grands dépassements au sein du groupe.
Il est sûr que ces sit-in à répétition ne profitent aucunement à Tunisie Télécom, qui reste, malgré tout, un opérateur à haut potentiel dans un marché en effervescence. Espérons qu’un consensus sera enfin établi.