à Londres (Photo : Geoff Caddick) |
[16/05/2011 15:15:24] BERLIN (AFP) La succession de Dominique Strauss-Kahn à la tête du Fonds monétaire international (FMI) n’est pas encore officiellement ouverte que déjà l’Allemagne a fait valoir lundi la prérogative de l’Europe de conserver ce poste stratégique.
“Dans cette phase, il y a de bonnes raisons pour dire que l’Europe a de bons candidats”, a ainsi déclaré la chancelière Angela Merkel alors que le directeur général français du FMI, inculpé pour agression sexuelle, attendait d’être présenté à un juge new-yorkais.
La chancelière a beau assurer qu’il est “important de ne pas prononcer des accusations” et son porte-parole juger que “toute discussion sur un successeur est hors de propos”, l’Allemagne, en ouvrant les hostilités dans la bataille à la succession, a bel et bien enterré l’actuel chef du FMI.
L’argument allemand: la crise de la dette qui agite l’Europe depuis maintenant un an accapare tant le FMI, co-architecte et co-financier des aides mises en place pour les pays en difficulté, qu’il serait logique qu’un Européen poursuive la tâche.
L’Allemagne, première économie européenne, est le plus gros contributeur aux aides accordées à la Grèce, l’Irlande et au Portugal. Face à une opinion publique très réticente, Berlin a tout intérêt à ce que la crise soit jugulée le plus rapidement possible. Et considère que “dans la situation actuelle”, c’est un Européen qui s’en acquitterait le mieux.
La Belgique lui a emboîté le pas, son ministre des Finances Didier Reynders estimant à son tour “préférable que l’Europe continue à occuper ce poste.”
Depuis sa création en 1944, le FMI a toujours été dirigé par un Européen, la présidence de la Banque mondiale revenant à un Américain. Mais cette répartition est de plus en plus contestée dans les pays émergents, dont l’importance pour l’économie mondiale n’a cessé de croître.
“A l’heure actuelle ce ne sont pas les économies les plus dynamiques qui sont aux manettes”, fait remarquer Sylvain Broyer, économiste de Natixis, “ce serait bien maintenant de tendre la main aux émergents”.
Sous la présidence de M. Strauss-Kahn, le FMI a d’ailleurs entrepris de se réformer, vers une plus grande représentativité des pays émergents. Mais de là à leur confier la direction, le pas est de taille et l’Allemagne n’est manifestement pas disposée à le franchir.
Berlin cherche-t-il déjà à placer un candidat?
Le député libéral Frank Schäffler s’est empressé de souffler à l’édition internet du magazine Der Spiegel le nom de l’ancien président de la banque centrale allemande Axel Weber. Le site internet lui-même spécule sur les chances de l’ancien ministre des Finances Peer Steinbrück, et sur celle de la ministre française de l’Economie Christine Lagarde.
L’Allemagne “a eu un chef du FMI il n’y a pas si longtemps”, Horst Köhler (2000-2004), “elle n’a donc pas les meilleures cartes pour remporter ce poste”, juge M. Broyer.
Rien ne dit d’ailleurs que M. Weber, qui a décliné la présidence de la Banque centrale européenne (BCE)alors qu’elle lui semblait promise, serait tenté par la direction du FMI.
Et l’Allemagne semble manquer de candidats pour des postes de haut niveau, comme l’a montré son incapacité à présenter un autre prétendant que l’ancien chef de la Bundesbank pour la BCE.
Celle-ci devrait revenir à l’Italien Mario Draghi, qui s’est empressé de faire savoir lundi qu’il n’avait aucune intention de partir à Washington plutôt qu’à Francfort.
Il y a quelques semaines, la presse allemande prêtait à Mme Merkel l’intention de barrer la route de la BCE à M. Draghi en le poussant vers la direction du FMI.