avocat Benjamin Brafman et Dominique Strauss-Kahn le 16 mai 2011 au tribunal de New York (Photo : Emmanuel Dunand) |
[17/05/2011 04:59:44] NEW YORK (AFP) Dominique Strauss-KahnStrauss-Kahn, accusé de tentative de viol et d’agression sexuelle par une employée d’hôtel, devait passer la nuit de lundi à mardi dans la prison de Rikers Island à New York, la juge devant laquelle il a comparu ayant refusé sa libération sous caution.
Le patron du Fonds monétaire international (FMI), 62 ans, devait être conduit à l’immense prison située sur une île de l’East River, au nord-est de Manhattan, où il bénéficiera d’une cellule individuelle, a indiqué à l’AFP un porte-parole de l’administration pénitentiaire de la ville.
Après deux nuits aux mains de la police de Manhattan, DSK “va dormir ce soir à Rikers Island dans une cellule individuelle”, a déclaré ce porte-parole sous couvert d’anonymat. “Je ne peux pas vous dire s’il s’y trouve déjà mais il y sera ce soir”, a-t-il souligné vers 18H00 (22H00 GMT). “Il ne sera pas en contact avec les autres prisonniers”, a précisé le porte-parole. “Cela ne veut pas dire qu’il sera toujours dans sa cellule. Cela veut dire que quand il en sortira, il sera toujours accompagné d’un gardien”, a-t-il ajouté.
M. Strauss-Kahn, interpellé samedi, a été écroué lundi par une juge de New York. Il nie les faits qui lui sont reprochés.
La juge Melissa Jackson le 16 mai 2011 au tribunal de New York (Photo : Emmanuel Dunand) |
La juge Melissa Jackson a refusé de libérer l’ancien ministre français moyennant une caution d’un million de dollars, deux jours après son arrestation à l’aéroport Kennedy de New York alors qu’il se trouvait dans un avion en partance pour Paris.
La juge a pris cette décision juste après que l’accusation eut déclaré que Dominique Strauss-Kahn aurait été impliqué dans une affaire similaire dans “au moins un” autre cas. Il y a des “informations selon lesquelles il a eu une conduite similaire à celle-ci”, a déclaré le procureur devant le tribunal.
Dominique Strauss-Kahn a comparu portant un pardessus sombre et une chemise claire. Il est apparu fatigué et abattu, les traits tirés et le regard souvent dans le vague, assis sur un banc en bois à côté de petits délinquants, présentés comme lui devant la justice. Contrairement au tribunal fédéral où les photographes n’ont pas accès à la salle d’audience, photographes et cameramen ont pu saisir des images du directeur général du FMI dont la vie a brusquement basculé samedi.
é, escorté par des policiers à sa sortie du commissariat de Harleme le 16 mai 2011 (Photo : Jewel Samad) |
Il n’était pas menotté lundi, contrairement à dimanche soir, comme l’ont montré les images de sa sortie d’un commissariat de Harlem (nord de Manhattan) qui ont fait le tour du monde et provoqué une onde de choc.
La juge a évoqué un risque de fuite du patron du FMI pour ordonner son maintien en détention. La prochaine audience a été fixée à vendredi. La défense de l’ancien ministre a proposé qu’il remette son passeport à la justice et qu’il s’engage à résider à New York chez sa fille.
M. Strauss-Kahn est visé par sept chefs d’accusation, dont acte sexuel criminel et tentative de viol et de séquestration, suite aux accusations d’une femme de chambre de 32 ans, employée dans un hôtel Sofitel de New York.
L’acte sexuel criminel, qui recouvre une fellation forcée en droit américain, correspond en droit français à un viol. Le terme de viol ne recouvre en droit américain que la seule pénétration vaginale forcée.
“Il nie ces accusations. Il est présumé innocent selon la loi”, a souligné un de ses avocats Benjamin Brafman, ajoutant que son client bénéficiait d’une “ligne de défense forte” et qu’il était “tout à fait probable qu’il soit innocenté en fin de compte”. “Nous sommes évidemment déçus par la décision du tribunal”, a-t-il dit après que la juge eut décidé de le maintenir en détention. “Il est important de comprendre que cette bataille ne fait que commencer”, a poursuivi l’avocat. “L’intention de M. Strauss-Kahn est d’essayer de rétablir son nom et sa réputation”.
Son épouse, l’ancienne journaliste Anne Sinclair, devait arriver lundi à New York en provenance de Paris, a indiqué Me Brafman.
ère secrétaire du Parti socialiste Martine Aubry le 16 mai 2011 au siège du PS à Paris (Photo : Joël Saget) |
L’affaire a ébranlé la classe politique française à un an de la présidentielle, où DSK faisait figure de favori, dans le cadre d’une éventuelle candidature socialiste.
Elle a également plongé dans l’incertitude le FMI au moment où l’institution doit piloter la réponse à la crise de la dette dans plusieurs pays européens. Le FMI a annoncé lundi à l’issue d’une réunion de son Conseil d’administration qu’il allait “suivre les événements” et qu’il n’avait pris aucune décision pour le moment quant au sort de M. Strauss-Kahn, dont le premier adjoint, l’Américain John Lispky, assure l’intérim à la tête de l’institution.
La ministre française des Finances Christine Lagarde a refusé lundi de commenter les spéculations qui la donnent comme possible remplaçante au FMI de DSK, jugeant la situation “accablante et douloureuse”.
DSK a été formellement identifié dimanche par l’employée du Sofitel, une “femme noire de 32 ans”, selon la police. D’après le récit des enquêteurs, la victime était entrée samedi dans la suite 2806 croyant qu’elle était vide pendant que DSK prenait une douche: “Il s’est approché d’elle par derrière et l’a touchée de manière inconvenante. Il l’a forcée à accomplir un acte sexuel”.
S’il devait être condamné pour l’ensemble des chefs d’accusation dont il fait l’objet, Dominique Strauss-Kahn encourrait entre 15 et 74 ans de prison.
En France, la chute probable de M. Strauss-Kahn constitue un coup dur pour la gauche, qui a insisté néanmoins sur le nécessaire respect de la présomption d’innocence, tout comme le gouvernement qui a appelé à “la prudence”.
M. Strauss-Kahn a été nommé en septembre 2007 à la tête du FMI pour un mandat de cinq ans pour réformer en profondeur cette institution. En 2008, le FMI avait commandé une enquête sur son directeur à la suite d’une relation extra-conjugale entre l’ancien ministre des Finances et une ex-responsable du département Afrique, Piroska Nagy. L’enquête a établi qu’elle n’avait bénéficié d’aucun traitement de faveur, et qu’il n’y avait pas eu “de harcèlement”.