Qu’est-ce que cela peut nous faire que le Conseil supérieur de la magistrature,
réuni lundi après-midi, ait décidé de reporter au samedi 21 mai l’examen de la
demande de levée de l’immunité du juge Farhat Rajhi? Parce que, à un certain
moment, il a pesé dangereusement sur la sécurité de la Tunisie? Certes, mais
cette affaire pénible en tous points est aujourd’hui le cadet de nos soucis…
Car la Tunisie est en danger, aussi bien politiquement que sécuritairement.
A observer soigneusement la controverse sur la date du 24 juillet pour
l’élection de la Constituante, on se rend compte que si le consensus tend à la
garder inchangée, il n’existe aucune lecture d’aucune sorte sur ce qui se
passera après. Les conséquences de la diversité, les difficultés (auxquelles il
faut s’habituer) à s’accorder sur quoi que ce soit, le besoin de Congrès
nationaux pour les débats multipartis… sont parmi les dossiers à ouvrir
d’urgence si nous ne voulons pas finir dans une situation, justement, d’urgence.
D’autres sujets, s’ils ne sont pas affrontés en temps et lieu, peuvent se
transformer en détonateurs de crises durables entamant le peu de sérénité qui
reste: le financement des partis que l’Etat doit comprendre comme un jalon de
protection de la souveraineté nationale, la contribution des partis à la
sécurité par leur faculté essentielle de mobilisation qui doit prendre pied dans
les consciences, la réconciliation nationale qui est incontournable si nous
souhaitons parvenir à la stabilité et que nous avons à affronter
courageusement…
Sécuritairement, c’est une autre paire de manches et une autre échelle.
Le dossier le plus brûlant est, sans conteste, le danger de la
guerre civile
libyenne sur la stabilité de la Tunisie. Ne faisons pas semblant de ne pas
savoir que les deux personnes arrêtées au sud tunisien en possession de grenades
et d’une ceinture explosive appartiennent à une aile terroriste proche d’Al Qaïda. Ne faisons pas semblant de ne pas voir que trois autres éléments tout
aussi agressifs ont été découverts ensuite. Et surtout, ne faisons pas semblant
d’ignorer que, malgré les contrôles, un nombre impressionnant d’armes en tous
genres a certainement été infiltré en Tunisie en provenance de Libye et que ces
armes ont fini chez des Tunisiens…
Mais n’oublions surtout pas la crise des 20 mille
Tunisiens de Lampedusa, qui
sont éparpillés un peu partout en Europe, surtout en France où ils ont carrément
mené à une polémique sur l’espace Schengen. Les relations avec nos partenaires
européens pourraient en être radicalement changées, et pas vraiment dans le bon
sens.
Sur tout cela, nous avons à ouvrir l’œil et surtout à commencer rapidement
l’élaboration des réponses adéquates qui doivent aller au-delà de l’attitude qui
est aujourd’hui la nôtre et qui souffre d’un manque flagrant de communication,
là où l’éveil des consciences commence par la connaissance de la vérité.