un tabac (Photo : BORIS HORVAT) |
[18/05/2011 15:47:11] PARIS (AFP) Contrebande, contrefaçon, achats à l’étranger: les cigarettiers, longtemps accusés d’alimenter les réseaux officieux, affichent désormais leurs efforts pour lutter contre le marché parallèle du tabac, qui représente une cigarette sur cinq fumée en France.
Pendant que la filiale française de British American Tobacco (BAT) lance sur internet un “observatoire du marché parallèle”, Philip Morris dote chaque paquet de sa marque phare Marlboro d’un code unique pour faciliter la lutte contre la contrefaçon et la contrebande.
Ce changement d’attitude est progressif de la part de fabricants, longtemps soupçonnés d’alimenter les réseaux officieux, au point que l’Europe avait obtenu, en 2004, un milliard d’euros d’indemnités du leader mondial Philip Morris.
Il a été contraint autant par des accords nationaux et européens et par l’ampleur du phénomène.
“Les cigarettes sont les premiers produits contrefaits dans le monde”, souligne Bernard Brochand, député UMP et président du Comité national anti-contrefaçon (Cnac), sur le site maptabac.com, lancé mercredi par BAT France.
Les douanes ont saisi en 2010 près de 350 tonnes (+30% sur un an) de tabac et de cigarettes.
20% des cigarettes fumées en France ne viennent pas d’un des 28.000 bureaux de tabac de l’Hexagone mais sont achetées sous le manteau, sur internet, ou plus ou moins légalement à l’étranger, selon plusieurs enquêtes menées par les fabricants et récemment corroborées par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT).
Cela représente un manque à gagner de “3,4 milliards d’euros pour l’Etat (80% du prix du paquet de cigarettes lui revient, NDLR) et de 340 millions pour les buralistes”, selon BAT.
Principale cause de ce marché illicite, selon BAT: la différence de prix “entre la France et ses pays limitrophes” du fait des taxes.
Quand un paquet coûte plus de 8 euros en Irlande, plus de 5 en France, il ne vaut qu’entre 30 centimes et un euro en Ukraine. Ainsi, “un carton de 10.000 cigarettes (soit 50 cartouches) acheté en Ukraine 400 euros et revendu à 50% du prix de vente en France rapportera plus de 880 euros nets, soit un retour sur investissement de 200%”, détaille le site.
Un exemple que les cigarettiers brandissent pour critiquer les hausses de prix. “Augmenter les prix de 10%”, comme le réclament les associations anti-tabac pour faire baisser la consommation, “fait surtout augmenter le commerce illicite”, estime Yves Trévilly, porte-parole de BAT France.
Et en rendant ce marché noir plus attractif, on augmente l’offre de tabac moins cher, argumente-t-il encore, “ce qui va à l’encontre des principes de santé publique”.
Autre initiative: un code unique figure depuis peu sur chaque paquet de Marlboro, et permet, sur simple appel, aux douaniers ou aux consommateurs qui l’ont acheté à la sauvette, de savoir s’il s’agit ou non d’une contrefaçon.
“C’est fini le temps où il y avait des fautes d’orthographe” sur les faux paquets, explique Klaus Berg, responsable du service de protection des marques pour Philip Morris en Europe. “La plupart sont indétectables par un oeil non averti”.
Les fabricants se sont engagés auprès des douanes à former les agents à repérer les faux paquets.
La lutte contre la contrefaçon est enfin l’un des arguments des fabricants pour refuser les paquets génériques (sans logo et de couleur neutre identique), souhaités par les associations anti-tabac.
De son côté, le Comité national contre le tabagisme (CNCT) a lancé mardi une campagne “pour dénoncer les profits de l’industrie du tabac sur le dos des fumeurs”.
En France, le tabac est à l’origine de 60.000 morts pas an.