Après la BCE, le FMI : l’Allemagne bredouille dans la course aux postes clés

photo_1305890572781-1-1.jpg
ère allemande Angela Merkel à Berlin, le 19 mai 2011 (Photo : John Macdougall)

[20/05/2011 11:26:05] BERLIN (AFP) L’Allemagne, puissance économique mais nain politique? Ce cliché ressurgit en raison de son incapacité à aligner un candidat pour les postes prestigieux, à la tête du FMI ou de la BCE.

La chancelière Angela Merkel a du bout des lèvres vendredi apporté son soutien à la ministre française de l’Economie Christine Lagarde pour la direction du Fonds monétaire internationale, en assurant qu’elle avait pour elle “une estime particulière”.

Cette tournure précautionneuse rappelle la réticence longtemps manifestée par Mme Merkel face à la candidature de l’Italien Mario Draghi à la tête de la Banque centrale européenne. Elle n’a finalement pas eu d’autre choix que de le soutenir.

Dans les deux cas, la presse allemande a loué le choix de personnalités compétentes. Et dans les deux cas, elle a regretté l’incapacité de Berlin à présenter un candidat.

Vendredi, le quotidien économique Handelsblatt publiait en Une la photographie de Mme Lagarde, “La candidate de l’Allemagne”, en soulignant: “Ce choix est aussi une défaite”.

“Les Etats sont aussi mesurés à leur capacité à pourvoir des postes internationaux de premier rang. L’Allemagne, de loin la plus forte économie européenne, n’en occupe actuellement aucun”, regrettait le journal.

Et c’est le cas depuis que Horst Köhler a dirigé le FMI. C’était entre 2000 et 2004.

Harcelé de questions vendredi lors d’une la conférence de presse régulière du gouvernement, le porte-parole de Mme Merkel Steffen Seibert n’a pu que promettre que “un jour viendrait” où l’Allemagne occuperait à nouveau un poste de haut rang.

Mais jusque dans les rangs du parti Union chrétienne-démocrate (CDU) de Mme Merkel, certains n’ont plus envie de patienter.

“Je demande au gouvernement de faire campagne pour installer un Allemand à la tête du FMI”, a ainsi déclaré Hans-Peter Flosbach, expert en questions financières du groupe parlementaire CDU.

Le libéral Frank Schäffler (FDP, partenaire minoritaire de la CDU au gouvernement) a proposé l’ancien président de la banque centrale allemande, Axel Weber.

Mais M. Weber s’est lui-même disqualifié lorsqu’à la surprise générale, et pour le plus grand embarras de Mme Merkel, il a décidé récemment ne pas prétendre à la présidence de la Banque centrale européenne, qui lui paraissait promise.

Un autre candidat évoqué dans la presse, Peer Steinbrück, ancien ministre des Finances social-démocrate (SPD) dans la “grande coalition” de Mme Merkel, semble davantage préoccupé par la campagne pour les législatives de 2013.

“Depuis la Deuxième guerre mondiale, l’Allemagne est très prudente quand il s’agit de jouer les premiers rôles politiques” et a accumulé “du retard” dans l’occupation des postes à responsabilité, explique à l’AFP le sociologue Michael Hartmann, spécialiste de l’étude des élites allemandes.

Sans compter qu’à l’heure actuelle, Berlin tente d’imprimer sa marque au futur mécanisme de secours permanent en zone euro et que “dans cette ambiance tendue (…) l’Allemagne préfère renoncer à un poste et mener à bien ce processus”, ajoute M. Hartmann. Il assure que “pour les Allemands, le prestige est secondaire”.

“Tout voir à travers la lorgnette allemande est réducteur et trop nationaliste”, estime le numéro deux du groupe des députés sociaux-démocrates, Joachim Poss, dans le Handelsblatt. Et d’affirmer qu’il importe peu “que le candidat (à la tête du FMI) vienne de Chine, d’Indonésie et d’Europe”.

Un type de réaction qui suscite l’ironie du quotidien de centre-droit Die Welt: “Voilà qui ressemble au renard de la fable de La Fontaine qui déclare que les raisins sur la treille sont trop verts, juste parce qu’il n’arrive pas à les atteindre”.