é à Damas en mars 2011 (Photo : -) |
[24/05/2011 11:03:30] BEYROUTH (AFP) Quand il a quitté sa Syrie natale, où pendant des années il a été opposant clandestin au régime de Bachar Al-Assad, Shaheen rêvait de pouvoir enfin mener sa lutte au grand jour.
Mais au Liban voisin, le journaliste doit encore se cacher lorsqu’il rassemble des images des manifestations en Syrie et les compile dans des rapports quotidiens utilisés par les sites internet et d’autres médias.
“Nous pensions que d’aller au Liban nous apporterait plus de liberté de mouvement et d’expression”, explique le jeune homme de 30 ans qui préfère s’exprimer sous un faux nom.
“Nous avons été surpris quand nous avons découvert que les Libanais ont encore plus peur des services de renseignements syriens que les Syriens eux mêmes”, raconte-t-il à l’AFP, installé chez un ami à Beyrouth qui l’héberge depuis qu’il a quitté son pays en mars.
La Syrie a retiré ses troupes du Liban, sous le pression internationale après le meurtre en février 2005 du Premier ministre Rafic Hariri, mettant un terme à 29 ans de domination militaire et politique sur son petit voisin.
à Qamishli en avril 2011 (Photo : -) |
Mais Damas continue d’exister au Liban à travers le Hezbollah et le puissant parti chiite, qui est soutenu par la Syrie et l’Iran, a fait tomber le gouvernement du Premier ministre Saad Hariri le 12 janvier.
“Quand j’appelle mes amis au Liban, il me disent +fais attention, ton téléphone est sur écoute+ ou +le Hezbollah est là+”, dit Shaheen.
C’est après l’arrestation d’un de ses amis, au début du mouvement de contestation en Syrie, que Shaheen s’est réfugié au Liban. En un peu plus de deux mois de manifestations dans le pays, des milliers de Syriens ont été arrêtés et plus de 900 civils ont été tués, selon des ONG.
Shaheen avait été invité par le bureau des renseignements syriens pour prendre “une tasse de café”, expression consacrée pour une convocation à un interrogatoire “politique”.
“Nous avions déjà été interrogés plusieurs fois, mais cette fois nous avons décidé que nous n’allions pas pouvoir continuer à nous battre pour notre cause à moins que nous ne quittions la Syrie”, explique-t-il.
“Maintenant on ne peut plus s’arrêter, quoi qu’il arrive”, ajoute-t-il. “Nous le devons à tous ceux qui risquent la mort et la torture, qui ont le courage d’aller à toutes les manifestations”.
Mujab Samra, 32 ans, un autre militant syrien basé à Beyrouth, se dit très déçu par le Hezbollah, pourtant un symbole de la résistance, celle à Israël, au Proche-Orient.
“Comment ce parti peut-il soutenir la liberté en Egypte, en Tunisie ou à Bahreïn et se dresser contre elle en Syrie, alors que les racines de ces révolutions sont communes: la tyrannie, l’oppression et l’injustice”, s’interroge Samra.
Pour Shaheen, même au Liban, sa plus grand crainte n’est pas la mort, mais la détention et la torture.
“La seule chose que je redoute est la torture, je ne sais pas ce que je suis capable de supporter”, confesse-t-il.
L’armée libanaise a arrêté plusieurs réfugiés syriens qui ont fui vers le Liban à travers des passages frontaliers illégaux dans le nord du pays.
Des organisations internationales des droits de l’Homme ont fait état de leur inquiétude concernant ces arrestations, Human Rights Watch appelant à la libération de tous ceux qui sont en garde à vue.
Mais les cyberdissidents syriens sont déterminés à lutter pour leur liberté dans leur patrie où depuis 48 ans le parti Baas est au pouvoir.
“Nous n’avons pas le choix. Soit nous poursuivons la lutte ou alors nous acceptons l’idée que nos enfants vivront sous le régime des enfants de Bachar Al-Assad, tout comme nos parents eux ont vécu sous celui de Hafez”, le père de Bachar, dit Samra.
“La Syrie a vécu dans le silence, et ce terrible silence est maintenant brisé”, estime Shaheen.