G8 : la succession à la tête du FMI s’invite dans les coulisses de Deauville

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à Paris (Photo : Eric Piermont)

[25/05/2011 06:46:33] DEAUVILLE (AFP) Officiellement, le sujet n’est pas à l’ordre du jour. Mais le choix du futur patron du FMI va s’inviter dans les coulisses du sommet du G8, jeudi et vendredi à Deauville, où la France tentera d’obtenir l’adoubement américain pour sa ministre Christine Lagarde.

“Je ne serais pas surpris que le sujet soit évoqué à Deauville”, glisse à l’AFP un ministre français. La succession de Dominique Strauss-Kahn pourrait être discutée “en marge” du sommet des dirigeants des principaux pays industrialisés dans le nord-ouest de la France, confirme le sous-secrétaire d’Etat américain aux Affaires économiques Bob Hormats.

En fin de semaine dernière, dans la foulée de la démission du directeur général du Fonds monétaire international (FMI) inculpé à New York pour crimes sexuels, les Européens ont multiplié les soutiens en faveur de la ministre française des Finances, qui fait figure de favorite.

Berlin, Londres et Rome ont appuyé son éventuelle candidature. “Lagarde est quasiment intronisée” au niveau de l’Union européenne (UE), affirmait même vendredi une source européenne, prédisant “un signal” dès le sommet de Deauville.

Depuis le début de la semaine, les Européens sont plus silencieux et la candidature Lagarde ne semble pas devoir être officialisée avant le G8.

L’intéressée, elle, botte en touche: la décision, “prématurée”, ne lui appartient pas, a-t-elle assuré lundi. Le porte-parole du gouvernement français François Baroin, tout en se targuant d’un prétendu feu vert de la Chine, a renvoyé la balle à l’UE, jugeant que Paris ne devrait pas “se positionner en premier”.

Or les Européens semblent attendre que les Etats-Unis, dont le soutien est crucial, et dans une moindre mesure le Japon prennent position, alors même que ces deux grandes puissances n’ont pas l’air pressées de se prononcer.

“J’ai une très bonne opinion de Christine Lagarde”, assure ainsi Bob Hormats à l’AFP. “Mais nous n’avons encore pris aucune décision sur ce dossier”, ajoute-t-il aussitôt, résumant la position de Washington qui souhaite un processus “ouvert” et se dit prêt à soutenir un candidat “capable d’obtenir un large soutien parmi les membres du Fonds”.

Le sommet de Deauville sera donc l’occasion pour le pays hôte de sonder les intentions américaines et japonaises, voire de pousser l’avantage de sa candidate potentielle.

Rien ne dit toutefois qu’une position commune en émergera officiellement.

“Bien sûr il y aura des discussions en marge”, mais “le G8 n’est pas le bon endroit” pour se mettre d’accord sur un candidat car “tous les pays qui jouent un rôle dans le processus ne sont pas représentés”, fait-on valoir de source proche du gouvernement allemand.

Introniser Christine Lagarde à Deauville risquerait d’en faire la candidate des pays riches au moment même où plusieurs Etats émergents avancent leur pions pour briser la règle tacite qui voit un Européen diriger le FMI et un Américain présider la Banque mondiale.

Attendre au-delà du G8 permettra aussi à la France et à ses alliés de gagner du temps. La justice française pourrait en effet annoncer le 10 juin, jour de la clôture des candidatures au FMI, si elle ouvre une enquête sur Christine Lagarde pour sa gestion controversée d’une affaire tentaculaire liée à l’homme d’affaires Bernard Tapie – ce qui ruinerait ses chances et pousserait in extremis ses soutiens actuels vers d’autres champions.

“La candidature de Christine Lagarde ne sera annoncée que si on a le sentiment qu’elle rassemble”, résume un ministre français, faisant valoir qu’en cas de “consensus” et de “coalition globale autour de son nom”, ce serait “une formidable façon pour la France de sortir par le haut de cette méchante affaire”.