La sécheresse s’installe et la solidarité s’organise dans le monde agricole

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ïs desséchés le 5 mai 2011 dans un champ à Grenay, près de Lyon (Photo : Philippe Desmazes)

[03/06/2011 15:29:59] PARIS (AFP) La pluie fait toujours défaut sur une grande partie du pays, à l’exception du Midi, et les éleveurs en appellent à la solidarité nationale pour obtenir de la paille face à une situation jugée catastrophique alors que l’usage de l’eau est limité dans 60 départements.

En Lozère, région où le déficit des pluies d’hiver a aggravé la sécheresse record du printemps, certains agriculteurs risquent de perdre “80 à 90% de la récolte de fourrage” a averti Franck Bouniol, co-président des Jeunes agriculteurs. Aussi les éleveurs, “pour arriver à garder leurs bêtes jusqu’à avril 2012, vont devoir acheter entre 8 et 9 mois de stock de fourrage, sinon on les abat ou on dépose le bilan”, a-t-il ajouté.

Dans les autres régions frappées par la sécheresse, le scénario est identique: entre 50 et 80% de pertes des récoltes de fourrage en Rhône-Alpes, jusqu’à 70% en Auvergne, un tiers des récoltes en Dordogne, selon les responsables agricoles locaux.

Il est possible de “combler les besoins en fourrage par de la paille” certes “naturellement très pauvre en protéine et peu riche en énergie”, souligne Christian Huygues, directeur de recherche à l’INRA. Il conseille aussi aux éleveurs de “resserrer les animaux sur une surface extrêmement limitée” afin de “préserver les prairies en place” pour que les plantes redémarrent dès les premières pluies.

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é à Grenay, près de Lyon, le 5 mai 2011 (Photo : Philippe Desmazes)

Les appels à la solidarité se multiplient et les premières initiatives ont vu le jour.

“La première solidarité c’est de ne pas broyer la paille que les céréaliers utilisent en temps normal comme engrais”, a rappelé Franck Sander, président des jeunes agriculteurs du Bas-Rhin.

Ainsi “une bourse à la paille” vient d’être créée par les syndicats agricoles du Tarn pour enregistrer demandes et offres. “Certains céréaliers sont même prêts à donner leur paille gratuitement”, selon Cédric Carcenac, président des jeunes agriculteurs.

Les syndicats d’agriculteurs du Pas-de-Calais, “région plus habituée à l’excès d’eau qu’à la pénurie”, selon Christophe Polin de la FDSEA, ont “établi des listings pour mettre éleveurs et céréaliers locaux en relation (…) et répondre aux demandes des autres départements.”

Ailleurs, dans l’Aisne, on a recours à des solutions de remplacement comme la fourniture de “pulpe surpressée” de betteraves ou de cossettes de pois livrées à des prix symboliques aux éleveurs.

En Camargue, les riziculteurs devraient entrer dans la chaîne de solidarité cet automne en fournissant leur paille de riz, “normalement broyée et qui ne sert à rien”, selon André Boulard, président de la Chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône. Cela servira de litière et permettra de réserver le foin à l’alimentation.

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épond aux journalistes dans une exploitation à Carentoir le 01 juin 2011 (Photo : Thomas Bregardis)

Malgré ces efforts, la file d’attente des bovins à l’abattoir de Thiviers en Dordogne s’allonge, la demande d’abattage ayant été multipliée par deux. L’établissement a lancé un appel à la raison des éleveurs.

Le même appel a été adressé aux céréaliers pour éviter la spéculation et maintenir le prix de la paille dans des limites acceptables, “entre 25 et 35 euros la tonnes” selon Cédric Carcenac. Cela correspond au coût de la matière organique à répandre dans les champs à la place de la paille broyée.

En dehors de l’aide prochaine promise par la SNCF pour acheminer fourrage et paille aux éleveurs, le président de la FNSEA, Xavier Beulin, a demandé au gouvernement d’étudier une éventuelle aide de l’armée “comme en 1976 et 2003”.

Enfin, si le Midi de la France reste l’une des rares régions bien arrosées, la sécheresse y provoque des dégâts d’une autre nature. Le niveau du Rhône étant très bas, l’eau de la Méditerranée remonte jusqu’à Arles. Cela provoque un excès nocif de salinité dans les rizières irriguées avec l’eau de surface.