C’est ainsi que s’est exprimé Mustapha Kamel Nabli, gouverneur de la BCT lors du point de presse organisé lundi 06 juin pour clarifier un certains nombre de points relatifs au G8.
La réunion entre les dirigeants des pays les plus industrialisés vise à identifier les problèmes, économiques et sociaux à l’échelle planétaire, à effectuer des propositions, dessiner des orientations ou suggérer des solutions plausibles aux questions les plus importantes. Aucune mesure obligatoire n’est prise au G8, tout au plus, des promesses.
C’est ce qui devrait calmer les ardeurs des uns et des autres. Ceux là même qui ont commencé soit à évoquer un complot international visant à rendre la Tunisie postrévolutionnaire dépendante des grandes puissances mondiales ou qui rêvent déjà de voir les $ et € couler à flots dans notre pays et toutes nos difficultés économiques ou existentielles disparues.
C’est ce qu’a voulu expliquer le gouverneur de la BCT à l’occasion du point presse : « Le G8 joue simplement un rôle d’impulsion et d’orientation politique. Les Chefs d’Etat se réunissent dans un cadre informel pour échanger des points de vue et discuter des questions qu’ils estiment importantes. Il ne s’agit en aucun cas de négocier, de discuter des contreparties, de définir des conditions pour l’octroi de prêts, de soutien ou de conclure des accords définitifs ». Conclusion, il est prématuré de lancer des polémiques relatives à la part qui reviendra à la Tunisie des 40 milliards de $ des Fonds annoncés par Sarkozy et il n’est pas sûrs que toute la somme débloquée concrètement. Ni comme elle s’articulera et sous quelles configurations. Différentes formules qui peuvent se présenter sous formes de prêts, de financements de grands projets, et peut être dans une infime partie en dons fixes. Rien n’a été défini et rien n’est définitif.
Il va de soi que le soutien du G8 aux deux pays invités au dernier Sommet du G8 tenu à Deauville en France va dans le sens de conforter le processus démocratique dans lequel ils sont tous les deux impliqués. « …Nous avons renouvelé notre engagement à soutenir les réformes démocratiques partout dans le monde, et à répondre aux aspirations des citoyens à la liberté, y compris à la liberté religieuse, et à l’émancipation, en particulier des femmes et des jeunes. La démocratie est la meilleure voie pour accéder à la paix, à la stabilité, à la prospérité, à une croissance partagée et au développement. Nous avons rencontré les Premiers Ministres de l’Égypte et de la Tunisie, et nous avons décidé de lancer un partenariat de long terme avec les pays qui choisissent de lancer une transition démocratique, et en faveur de sociétés tolérantes. Notre objectif commun est d’agir en faveur de l’état de droit et de l’implication des citoyens, et d’encourager les réformes économiques et sociales, afin de répondre aux aspirations des peuples… » peut-on-lire dans la déclaration du G8.
Réunion des ministres des Affaires étrangères et des Finances d’ici juillet
La présence de la Tunisie et de l’Egypte a permis de faire le point sur les situations économiques et sociales et de présenter leurs programmes économiques et leurs plans de développement. En échange, les membres du G8 s’engagent à fournir les efforts nécessaires pour mobiliser les ressources nécessaires en faveur de ces pays là. La Tunisie a présenté à l’occasion un plan d’action sur cinq ans évalué à 25 milliards de $. Les fonds dont a parlé le Président français Nicolas Sarkozy dans son allocution pourraient être accordés par des Institutions financières internationales, multilatérales ou bilatérales et qui pourraient ne pas être des bailleurs de fonds potentiels tels la Banque africaine de Développement, la Banque européenne d’Investissement, la Banque Mondiale et autres.
Tout reste sujet à des discussions et à des négociations qui porteront sur des thèmes plus concrets et dont les parts des fonds qui reviendront à l’un ou à l’autre. D’autant plus que les pays partenaires des deux pays sont aussi concernés par l’octroi de prêts ou de fonds.
Ce sont d’ailleurs les ministres des Finances et ceux des Affaires étrangères qui pourront entrer plus dans le détail et travailleront dans le cadre de propositions concrètes et des plans d’actions précis qui déboucheront sur des actions tangibles. Leur première réunion devrait se tenir au mois de juillet prochain.
D’ores et déjà une partie des fonds a été débloqué dans un souci d’urgence dont les 350 millions d’€ accordés par la France « Nous savons que l’union européenne a déjà accordé à la Tunisie, une aide de 140 millions d’€ mais tout n’est pas connu. Cela dépendra des moyens et des possibilités des pays eux-mêmes…Cela se fera suivant un cadrage macroéconomique et budgétaire mis en place par les pays concernés. L’idéal sera le déblocage des fonds au moment voulu, soit sur des tranches en 2011, 2012, et 2013 ».
Autant de fonds bilatéraux ou multilatéraux, s’ils se concrétisent, ne pèseront-ils pas de tout leur poids sur l’économie ?
La Tunisie devrait régler une dette de 790 millions de dollars pour l’exercice 2011 et la prochaine échéance a lieu au mois de septembre. « Je respecte les points de vue des personnes qui ont appelé à effacer la dette de la Tunisie, mais je suis à un poste de responsabilités et je suis là pour redynamiser l’économie et non pour la tuer » a rétorqué M.Nabli répondant à une question à propos de la dette lors du point de presse.
Les difficultés existent, il est vrai mais le pays peut honorer sa dette. « J’ai le devoir de faire en sorte que l’économie fonctionne et qu’il y ait pas de catastrophe économique et financière. Tant que je suis là, je ferai en sorte de payer la dette pour pouvoir emprunter de nouveau le cas échéant. Le pays a besoin des ressources mobilisables au national et à l’international et ce n’est pas en appelant à ne pas rembourser la dette que nous pourrions les contracter »…
C’est d’ailleurs valable à petite échelle. Un particulier ou une entreprise qui ne règle pas ses dettes sont classés personnes physique ou morale à risque et ne seront pas éligibles à de nouveaux prêts.
Si elle ne peut emprunter à l’international, il y a deux solutions qui s’offrent à la Tunisie : limiter les importations en faisant du rationnement en contrôlant les importations ou réduire les revenus pour entrainer une contraction de l’économie et c’est suicidaire pour une économie de marché.
Toutefois, s’il y a des propositions volontaires de la part des bailleurs bilatéraux pour rééchelonner les dettes, convertir ou en transformer une partie en dons ou en participations dans des projets de développement, cela sera appréciable, a indiqué M.Nabli. Sachant que les dettes du secteur privé et les dettes multilatérales doivent impérativement être acquittées.
La Tunisie est en marche et peut reprendre sa croissance, en dépit des difficultés restant à surmonter, encore faut-il faire des choix réfléchis, raisonnés et anticiper. Il ne s’agit pas de se lancer dans des décisions impulsives suscitées par la passion du moment. Aujourd’hui, il y va de l’avenir du pays et pour cela, il faut réfléchir aussi froidement et rationnellement que possible et surtout éviter de prendre nos désirs pour des réalités.