WMC : A quarante-huit heures de l’ouverture du Forum annuel de l’Association des Tunisiens des grandes écoles “ATUGE“, dans sa session parisienne, nous avons voulu en savoir plus en posant quelques questions à Maher Barboura, président de l’ATUGE France.
L’édition 2011 de l’ATUGE se propose de débattre de la Tunisie de demain, précisément “Quels modèles de développement pour la Tunisie de demain?” Pourriez-vous nous expliciter davantage?
Maher Barboura: Au fil des précédentes sessions du Forum de l’ATUGE, nous avons toujours traité des questions économiques sur des secteurs spécifiques: l’éducation, les banques, l’environnement, le secteur privé, etc. La révolution que nous vivons ouvre un chantier beaucoup plus profond. Le modèle de la Tunisie que nous connaissons jusque-là -«bonne élève» des institutions internationales-, ne peut plus continuer à ignorer la répartition des richesses, l’employabilité de ses ressources humaines, la transparence, l’image de marque qu’elle renvoie à l’international, etc.
Le chantier est immense et nous pensons que le moment est venu de bâtir un nouveau projet de développement pour les Tunisiens. Ce thème est d’ailleurs de plus en plus repris dans différents séminaires organisés par d’autres institutions. Notre but, en tant qu’association, est d’aider à faire avancer le débat à travers les intervenants que nous avons invités mais aussi à travers le débat en salle, sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter) et sur une plateforme participative que nous expérimentons www.tunagora.org.
Est-il possible d’en savoir plus sur les pistes de réflexion de cette rencontre?
En attendant la journée de Tunis, le 22 septembre prochain, nous avons choisi pour la journée parisienne des thèmes centraux. D’abord, les projets d’infrastructure de transport et leur rôle capital dans la répartition équitable du développement.
Ensuite, nous ouvrirons le dossier de l’externalisation des services en Tunisie, en nous interrogeant sur comment la Tunisie peut renforcer son positionnement et en profiter pour résorber réellement le chômage des diplômés. Des diplômes il sera également question et plus précisément des cursus de double diplôme entre les institutions tunisiennes et leurs partenaires français avec les premiers retours sur expérience.
A signaler deux thèmes nouveaux à l’ATUGE: l’agriculture et les perspectives de positionnement de ce secteur. Et enfin, la régulation des médias et la structuration du marché. Tous ces débats alimenteront l’état des lieux qui fera l’objet de la conférence de clôture avec une ouverture sur les solutions possibles.
Nous sommes décidés encore une fois à rendre ces débats constructifs et producteurs de propositions. J’invite tous vos lecteurs à participer à cette construction le 19 juin prochain.
En outre, en plus de l’espace de rencontres avec les entreprises tunisiennes participantes, nous consacrons un espace à la création d’entreprise; avis à tous ceux qui souhaitent se lancer. Ils trouveront institutions financières, conseil et appui dans cet espace.
Enfin, une vingtaine d’associations de Tunisiens en France seront présentes dans un forum associatif à l’image de celui organisé avec grand succès par l’ATUGE à Tunis le 02 avril dernier.
Quelles sont les personnalités tunisiennes et non tunisiennes qui prendront part à ce forum?
Une trentaine d’intervenants en majorité des Tunisiens ont accepté de participer à la journée par leur expertise, et leur retour sur expérience. M. Moncef Cheikhrouhou (économiste et professeur à HEC Paris) conduira la séance plénière de clôture au côté de M. Salah Hannachi (ancien secrétaire d’Etat), M. Hassine Dimassi (ancien ministre de la Formation professionnelle et conseiller de l’UGTT) et M. Ahmed Smaoui (ancien ministre et PDG de l’ONTT, Tunisair et SNCFT, etc.). Un beau panel en perspective mais nous ne nous en contenterons pas. Nous souhaitons que chacun prenne part à la réflexion à travers un commentaire ou une question en salle ou sur les moyens de communication qui seront mis en place (Twitter, Facebook, sms, etc.). La liste complète des intervenants est disponible sur le site du Forum http://www.atuge.org/forum
Est-ce que ce forum de l’ATUGE est à même de constituer un baromètre de l’estime et de la sympathie que jouit notre pays ? Si oui comment ?
La sympathie dont jouit la Tunisie n’est plus à prouver malgré quelques évènements passagers qui peuvent altérer l’image de cette nouvelle Tunisie en France. Ce que nous devons réussir ensemble c’est préserver cette sympathie et la transformer en opportunités. Le Forum de l’ATUGE est une démonstration de la Tunisie dynamique et ambitieuse. Je remarque en effet un intérêt plus important de la part de nos partenaires et invités, amis de la Tunisie, pour le Forum de l’ATUGE. Ils seront plus nombreux à participer cette année. Nous espérons des retombées tangibles de cet intérêt sur l’économie tunisienne.
Maintenant trois questions générales
Dans le gouvernement bis de Mohamed Ghannouchi, on a compté plusieurs atugéens au sein de l’équipe, ce qui nous a poussés à titrer… “L’ATUGE prend le pouvoir…“. Qu’en est-il aujourd’hui et surtout que ferez-vous demain, après les élections ?
En temps de crise, il est raisonnable et légitime de faire appel à des personnes compétentes et reconnues pour leur capacité à affronter des situations difficiles, qu’elles soient diplômées de Tunisie ou d’ailleurs. Soyons objectifs et jugeons sur les actes. Le mérite et la compétence doivent être a pouvoir avant et après les élections.
Quant à l’Association des Tunisiens des Grandes Ecoles, elle continuera à jouer son rôle citoyen en toute indépendance. En France cela se traduit par l’accueil des étudiants boursiers dans les classes préparatoires et écoles françaises mais aussi par la promotion du retour en Tunisie à travers l’emploi, l’entrepreneuriat et le débat économique en général.
En Tunisie cela s’illustre par des rencontres entre les membres dans le cadre des “Mardi de l’ATUGE” et les “jeudi entrepreneurs” par exemple. D’autres activités pourront voir le jour en fonction des besoins de nos membres.
Dans le même ordre d’idées, l’ATUGE a toujours été considérée comme une véritable force de proposition. Pourtant, sur le terrain les atugéens se font un discrets sans doute parce que souvent éloignés des réalités non… Quel est votre point de vue?
L’ATUGE est un réseau de Tunisiens originaires de toutes les régions de la Tunisie et aujourd’hui installés partout dans le monde. Chacun apporte jour après jour sa contribution dans les entreprises tunisiennes, dans les associations, dans les partis politiques, etc. Beaucoup d’Atugéens ont été moteurs dans la révolution du 14 janvier. L’ATUGE est un lieu de rencontre de tous ces individus et un lieu qui les rattache constamment à la mère patrie. En témoigne le nombre croissant des participants aux manifestations de l’ATUGE à Londres, à Paris ou à Tunis (plus de 5.000 membres aujourd’hui contre 4.000 membres en 2010).
Pour nos conférences, nous faisons toujours appel à des experts qui maîtrisent le contexte tunisien, et essayons de mettre le doigt sur les problématiques socio-économiques du moment: “l’éducation et l’employabilité”, “l’open sky”, “le financement de l’énergie”, “la Bourse”, etc.
Comment voyez-vous la Tunisie dans un, deux voire trois ans?
Tous les experts s’accordent à dire que bien malin celui qui sait prédire l’avenir. Je crois que sur cette question nous n’avons qu’un choix: l’optimisme et l’effort. Le résultat sera là tôt ou tard. A l’ATUGE nous maintenons le cap, fidèles à nos valeurs d’ouverture et de solidarité.