évrier 2011 à Riyad (Photo : Fayez Nureldine) |
[23/06/2011 16:08:56] PARIS (AFP) La guerre en Libye va contraindre les pays membres de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) à puiser dans leurs réserves stratégiques de pétrole, une décision exceptionnelle visant à contrer les menaces de “pénurie” à l’entrée de l’été dans l’hémisphère nord.
“Pour la troisième fois de l’histoire de l’AIE, ses membres ont décidé de puiser dans leurs réserves” en mettant sur le marché “60 millions de barils de pétrole sur une période d’un mois,”, a déclaré son directeur général Nobuo Tanaka lors d’une conférence de presse impromptue au siège de l’organisation à Paris.
Ceci “afin de répondre aux perturbations affectant l’approvisionnement en pétrole en provenance de Libye”, qui ont privé le marché à fin mai de 132 millions de barils de pétrole brut, a-t-il ajouté.
L’agence, créée après le premier choc pétrolier, n’a touché à ses stocks stratégiques qu’à deux reprises, après l’invasion du Koweït par l’Irak en 1990 et après l’ouragan Katrina qui avait frappé les Etats-Unis en 2005.
Après ce prélèvement, les stocks stratégiques de l’Agence permettront encore de couvrir l’équivalent de 90 jours d’importations pétrolières des pays membres.
Outre la “poursuite de la crise libyenne”, l’agence invoque la perspective d’une forte hausse de la demande de pétrole alors que s’ouvre la “saison automobile” dans l’hémisphère nord, allusion aux migrations estivales aux Etats-Unis et en Europe.
Au delà des circonstances, l’Agence se montre soucieuse de ne pas contrarier la “reprise fragile” de l’économie mondiale, sur laquelle l’envolée des cours depuis novembre fait peser une “menace inacceptable”, selon M. Tanaka.
Immédiatement après cette annonce de l’AIE, les cours du pétrole se sont fortement repliés, lâchant plus de 8 dollars à Londres et près de 6 dollars à New York. Le baril de Brent de la Mer du Nord continuait toutefois d’évoluer non loin du niveau élevé de 110 dollars.
“L’AIE a totalement pris par surprise les investisseurs avec cette décision qui est une tentative pour faire baisser les cours”, trop élevés aux yeux des pays consommateurs, a relevé Myrto Sokou, analyste du courtier Sucden.
L’AIE a également été contrainte à agir en raison de l’échec, le 9 juin à Vienne, des pays de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) à s’entendre sur un relèvement de leurs quotas de production, fixés depuis janvier 2009 à 24,84 millions de barils par jour (mbj).
L’Arabie Saoudite avait toutefois indiqué son intention d’accroître sa production pour apaiser les tensions sur le marché.
M. Tanaka a indiqué que l’AIE avait été en “contact étroit” avec l’Arabie Saoudite et que son initiative visait à “assurer la transition” jusqu’à l’arrivée sur le marché des barils saoudiens, et ainsi “écarter tout risque de pénurie à court terme”.
Dans le détail, les 28 membres de l’AIE, qui regroupe les pays industrialisés, libèreront 2 millions de barils par jour pendant une période de 30 jours, les premiers barils extraits des réserves stratégiques devant arriver sur les marchés à partir de la fin de la semaine prochaine.
Les Etats-Unis participeront à cet effort à hauteur de 50%, les pays européens de 30% et les pays asiatiques de 20%.
Le département américain de l’Energie a confirmé son intention de puiser 30 millions de barils dans ses réserves, actuellement au niveau “historiquement haut” de 727 millions de barils.
Il s’est dit prêt en outre à “prendre des mesures additionnelles, si nécessaire”.
De son côté, “la France va contribuer au prorata de sa consommation, soit 3,2 millions de barils, ce qui correspond à environ 2% des stocks stratégiques français”, a précisé le ministre de l’Energie Eric Besson.