Fidélité, devoir, respect, service désintéressé, honneur, intégrité et courage personnel… voilà les valeurs et les qualités du bon soldat. L’Armée nationale a prouvé sa capacité à être fidèle à la nation et à son héritage. Avant nous ne la connaissions pas ou si peu. «Lors d’un récent déplacement en France, nous avons donné une leçon au monde entier en matière de droits de l’homme, de civisme, et de savoir-faire. Nous avons suscité l’admiration de nos vis-à-vis étrangers», témoigne un Colonel, cadre médical de l’armée.
L’armée, qui s’est beaucoup investie dans le maintien de l’ordre, la préservation de l’unité nationale et la protection des institutions et biens publics depuis la révolution, n’a pas eu le temps de reprendre son souffle qu’elle devait déjà gérer les camps des réfugiés arrivant de Libye.
550.000 réfugiés ont franchi les frontières depuis le mois de février. Nombre d’entre eux sont rentrés dans leur pays, d’autres en provenance de pays africains refusent de partir. Parmi eux, il y en a qui sont atteints de maladies contagieuses et ont besoin de toute l’aide et l’assistance, non pas de l’armée tunisienne, mais de celles du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), de l’Organisation internationale pour les migrations et celles des ONG et autres organisations humanitaires.
Dans le statut du HCR, nous pouvons lire: le Haut Commissariat pour les Réfugiés doit chercher des solutions au problème des réfugiés en collaboration avec les gouvernements, les organisations intergouvernementales et les organisations privées. Ce travail est rendu indispensable en cas d’augmentation du nombre des réfugiés. Le rôle des ONG est fondamental dans l’action du HCR. Les ONG locales servent d’antenne de renseignements et assurent l’assistance des réfugiés. Dans des situations d’urgence, comme celle de la Tunisie, les grandes ONG internationales, au fonctionnement plus souple que le HCR, et disposant de ressources importantes, peuvent apporter très rapidement les premiers secours.
Des ONG hyper payées, absentes du terrain
Sur terrain, la situation est loin d’être aussi idyllique. Les ONG, leurs représentants, leurs personnels hyper payés, résident dans des hôtels climatisés, se déplacent dans des véhicules confortables, et présentent des shows très convenables, dès qu’il y a des représentants des médias. Le mondain, ça les connaît, assure Siwar, journaliste de Radio Gafsa qui s’est rendue à Ras Jédir et qui a enregistré des témoignages de militaires sur place: «Seules les ONG qui viennent des Emirats arabes unis assurent».
Est-ce à l’armée tunisienne d’assumer la charge des réfugiés, d’assurer leur hébergement, leur nourriture et les soins médicaux? «Ce n’est pas notre rôle», déclare un colonel de l’armée de terre. «Nous avons le devoir de protéger nos frontières, de nous occuper de nos soldats et de préserver notre souveraineté, notre honneur, le sol national et la sacralité de nos frontières. Aujourd’hui, nous sommes contraints de manager nous-mêmes ces camps, juste pour protéger le pays des épidémies, du sida, de l’hépatite, de la tuberculose, et j’en passe. Et c’est ce qui nous pousse à travailler jusqu’à épuisement».
Ce que ne dit pas ce haut gradé, c’est qu’ils sont sous-payés et que dans l’armée, on ne compte ni les heures ni les efforts supplémentaires. Chez eux, le service est désintéressé, le bien-être de la nation passe avant le leur, c’est le leitmotiv. Pendant ce temps, les ONG paradent devant les télévisions et les radios faisant des déclarations et annonçant des réalisations, sans oublier bien sûr d’organiser des conférences. Il faut bien dépenser l’argent et justifier les dépenses! L’armée, elle, n’a pas des traditions de communication ou de publicité. A l’armée, on travaille et on se tait!
220 blessés ont été opérés à Chiba, par les chirurgiens de l’armée nationale au prix de leur santé eux-mêmes et dans des conditions d’hygiènes difficiles. C’est la foi dans la patrie et dans le système qui motive soldats, sous-officiers et officiers. Le devoir du système est de ne pas les abandonner et reconnaître leurs actions.
«C’est notre pays, et notre terre, ils méritent tous les sacrifices»
«Dans une situation telle que celle que traverse aujourd’hui la Tunisie, il devrait y avoir un haut responsable pour gérer les ONG. Il superviserait deux structures: l’une chapeautant les organismes nationaux qui comprennent le Croissant rouge tunisien, la santé publique et la Samu et l’armée. L’autre dédiée aux organismes internationaux sans oublier des personnes qui s’occuperaient des médias et des politiciens. Dans toutes ces structures, il faut qu’il y ait des représentants des ministères de la Santé publique, des Affaires sociales, de l’Environnement, de l’Equipement et des autres ministères. Quelqu’un s’est-il seulement posé la question sur où vont les aides qui arrivent tout le temps dans les camps. Comment elles sont comptabilisées, vers qui elles sont orientées si elles sont utilisées à bon escient et dans quel cadre organisationnel?», déplore un officier en poste à Choucha qui ajoute: «Et tous ces comités de protection de la révolution, de soutien à la Libye, d’aides et d’autres qui arrivent ici et installent des camps, qui nous assure qu’ils sont aussi patriotes qu’ils le prétendent, quelles sont nos garanties que ce ne sont pas des espions? Ou des personnes mal intentionnées? Devons-nous croire et donner carte blanche à tous ceux qui se présentent aux camps et disent être des médecins, des chirurgiens ou des cadres médicaux? Il est grand temps de désigner des responsables pour gérer tout ce va et vient».
Au Camp de Réfugiés de Choucha, il n’y a pas de représentants du ministère des Affaires sociales pour gérer les aides, il n’y a pas de pharmaciens pour décider si un médicament doit ou non être utilisé. «Il y a des médicaments qui arrivent de partout, quelles sont nos garanties qu’ils ne sont pas nocifs? Et que les dates de prescription, les effets secondaires y sont vérifiés et respectés?»
Les organisations internationales qui se déplacent dans les camps veulent des chiffres. C’est ce que vient de faire l’OMS (Organisation mondiale de la Santé) laquelle, au lieu de se ramener avec ses staffs, sa logistique et les moyens énormes dont elle dispose pour observer et évaluer par elle-même ce qui s’y passe, a voulu tout juste s’informer auprès de…l’armée: «Un responsable de l’OMS s’est présenté au camp et nous a demandé de lui remettre les statistiques des personnes que nous avons examinées. Ne devait-il pas être présent avec nous sur terrain? Nous avons dû éclairer sa lanterne en lui précisant que parmi les 3.500 personnes examinées, 70% étaient atteintes du Sida!».
En matière de communication, les représentants des organismes internationaux sont très forts. Des présentations en 3D des chiffres et des faits, mais sur terrain, rien, nothing, niente… Leurs soucis sécuritaires personnels prévalent alors que «dans une situation d’exception, l’insécurité existe. Dans pareil cas, les réfugiés sont des personnes complètement désemparées et fragilisées sur le plan psychologique».
A Dhiba ou Ramada, les ONG sont totalement absentes, les soldats, eux, passent leurs jours et nuits dans des fossés pour protéger les frontières bravant les morsures des vipères, des scorpions ainsi que les tempêtes de sable et des conditions climatiques difficiles. Mais plus grave que cela, Kadhafi pourrait, au titre de représailles, ordonner l’ouverture des frontières laissant le champ libre aux mercenaires et milliers de réfugiés. Et là nous ne parlons pas d’une hypothèse, le risque existe bel est bien.
Malgré toutes ces conditions difficiles, l’armée résiste, ne lâche pas, ne se plaint pas, ne dénonce pas…«C’est notre pays, et notre terre, ils méritent tous les sacrifices, vous n’avez aucune idée sur ce que représente pour nous la Tunisie». Laquelle armée qui, en temps ordinaires a pour mission principale de surveiller les frontières, passe aujourd’hui la plupart du temps à gérer des camps de réfugiés. «Parmi nous, il y en a qui n’ont pas vu leurs femmes et leurs enfants depuis 5 mois et ils tiennent encore le coup».
L’armée tunisienne a prouvé qu’elle porte la nation dans son cœur, il est temps que la nation lui prouve qu’elle la porte elle aussi dans son cœur en témoignage pour la postérité. Que cette reconnaissance soit le baume au cœur de ceux qui ont été marginalisés depuis plus de 50 ans parce que leurs valeurs effrayaient la tyrannie.