Bourget : la longue marche de la Chine et de l’Inde vers l’aviation de combat

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La foule du Bourget le 25 juin 2011 (Photo : Pierre Verdy)

[26/06/2011 14:15:09] LE BOURGET (AFP) Puissances rivales aux ambitions régionales et mondiales affirmées, l’Inde et la Chine tardent à s’imposer dans le club très fermé des pays constructeurs d’avions de combat, comme en a témoigné une présence plutôt symbolique au Salon du Bourget.

Mais l’une comme l’autre, animées par des antagonismes régionaux et la quête d’une souveraineté industrielle et stratégique, n’ont pas encore dit leur dernier mot.

Fruit d’une collaboration entre Pékin et Islamabad, le JF-17, un mono-réacteur léger multirôle devait participer aux présentations en vol du salon sous les couleurs de l’armée de l’air pakistanaise. Mais sa venue a été annulée in extremis.

Le 18 février 2010, l’escadron n°26 “Black Spiders” (araignées noires) de l’armée de l’air pakistanaise, basé à Peshawar, a été doté des quatorze premiers exemplaires opérationnels de cet appareil.

Mais au Bourget, la présence du JF-17 s’est finalement limitée à une maquette présentée sur le stand de la Chine aux côtés de celles d’un bi-réacteur et d’un drone armé, clone du célèbre Predator américain.

Cité par le site internet spécialisé FlightGlobal, Ma Zhiping, président de CATIC, la société d’import-export d’aéronautique civile et militaire chinoise, a attribué l’absence du JF-17 à l’instabilité politique au Pakistan. Mais cet incident de parcours n’aurait pas empêché, selon lui, plusieurs pays africains et du Moyen-Orient de manifester leur intérêt pour cet appareil.

Selon un expert occidental interrogé sous couvert de l’anonymat, le JF-17 est un avion “rustique et relativement bon marché, plutôt réussi et équipé d’un moteur russe Klimov RD-33, faute de moteur chinois au point”. Ses performances seraient cependant inférieures à celles d’un Mirage 2000, appareil conçu dans les années 70 et entré en service en 1984 dans l’armée de l’air française.

Le Pakistan a bien tenté d’appeler deux industriels à la rescousse, le français Thales, pour un radar, et l’européen MBDA, pour des missiles Mica. Mais, selon plusieurs experts, l’Etat français se serait opposé à cette vente, redoutant une fuite de technologies sensibles.

D’autant que la France est par ailleurs en lice pour vendre le Rafale de Dassault Aviation à l’Inde qui verrait d’un mauvais oeil une telle aide.

La montée en puissance de l’armée de l’air pakistanaise épaulée par la Chine qui a également créé la surprise en janvier avec le premier vol d’un démonstrateur d’avion furtif, n’est pas sans inquiéter le frère-ennemi indien, en conflit depuis 1947 avec Islamabad sur la question du Cachemire. New Delhi tente de répliquer avec le Tejas.

Mais point de stand ou de maquette du Tejas au Bourget et encore moins de démonstration en vol. “Cet appareil qui se situe entre un Mirage F1 et un Mirage 2000 a été enfanté dans la douleur, mettant près de 20 ans à effectuer son premier vol”, explique un expert. L’Inde se débattrait toujours avec un problème de moteur et aurait “appelé l’Occident à l’aide”.

New Delhi a d’ailleurs préféré lancer un appel d’offre pour 126 avions de combat qui oppose en dernier lieu le Rafale à l’Eurofighter d’un consortium européen où figure EADS.

Pour la Chine comme pour l’Inde, l’obstacle majeur dans cette aventure technologique reste l’intégration des systèmes. “Radar, autodirecteur des missiles, contre-mesures, radios et liaisons de données peuvent très bien fonctionner séparément mais une fois réunis, ils créent une véritable soupe électronique”, explique un spécialiste.

Faire fonctionner ensemble tous ces systèmes, véritable Graal de l’aéronautique militaire contemporaine, n’est donné qu’à quelques nations comme les Etats-Unis, la Russie ou la France. “On ne brûle pas les étapes en aéronautique militaire”, souligne-t-il.