Allemagne : la Cour constitutionnelle passe au crible les aides aux Européens

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äuble devant la Cour constitutionnelle, à Karlruhe, le 5 juillet 2011 (Photo : Uli Deck)

[05/07/2011 14:30:20] KARLSRUHE (Allemagne) (AFP) Le ministre allemand des Finances est venu mardi se justifier devant les juges suprêmes allemands des milliards d’euros d’aides accordées par Berlin à ses partenaires européens, espérant les convaincre de la légalité de ces soutiens.

Devant les juges de la Cour constitutionnelle, plus haute instance judiciaire allemande, Wolfgang Schäuble a insisté sur les dangers que courait l’euro au printemps 2010, les bénéfices de la monnaie unique et la communauté de destin qui unit l’Allemagne à l’Europe.

M. Schäuble, juriste de formation, a aussi assuré que les aides consenties à Athènes, puis à Dublin et Lisbonne par le biais du fonds de stabilité européen (FESF), étaient non seulement nécessaires mais conformes à la loi.

S’il est clair pour le président de la Cour Andreas Vosskuhle que l’an dernier la politique “se battait pour l’avenir de l’Europe”, il est uniquement question pour elle “de définir les limites que la loi impose à la politique” en la matière.

C’est l’enjeu de cette procédure dont le verdict, attendu à l’automne, sera décisif pour l’architecture des futurs mécanismes d’aide. Il statuera en effet aussi sur la légalité du mécanisme européen de stabilité (MES), fonds de secours permanent qui doit assurer après 2013 le rôle de pompier de la zone euro.

S’il apparaît peu probable que les aides passées et futures soient jugées illégales, les juges pourraient bien les encadrer plus sévèrement, par exemple en renforçant les droits du Parlement dans les processus de décision et de contrôle.

Or “si la Cour devait limiter la marge de manoeuvre du gouvernement, les conséquences pour l’Union européenne et les marchés financiers seraient extrêmement graves”, prévient Eckart Tuchtfeld, économiste de la Commerzbank.

Plusieurs euro-sceptiques notoires ont porté plainte en mai 2010 contre l’aide à la Grèce. A mesure des autres engagements de Berlin, de nombreux autres ont fait de même, dont au moins un élu de la majorité.

Les développements récents en Grèce, à nouveau au bord de la faillite, les confortent dans leur rejet des décisions prises l’an dernier.

Pour l’un des avocats entendu mardi, Albrecht Schachtschneider, les aides successives étaient “économiquement erronées”. “Et ce qui est économiquement erroné ne peut pas être juridiquement juste”.

En 2010, la Cour avait rejeté la demande de référé des plaignants, qui visait à empêcher le versement de l’aide. Cette décision laisse supposer qu’elle “soutient la ligne du gouvernement”, veut croire M. Tuchtfeld. Mais elle n’a pas encore jugé le fond de l’affaire.

Les juges examinent la conformité des aides à la fois aux traités européens -notamment à l’interdiction pour un Etat membre de se faire renflouer par les autres-, et à la Loi fondamentale allemande.

Pour Peter Gauweiler, député conservateur, les plans de soutien successifs et la mise sur pied du MES constituent “une abrogation de fait de la souveraineté budgétaire” du Parlement.

L’Allemagne, première économie européenne, est le plus gros contributeur aux plans d’aide. Sa part dans celui décidé en 2010 pour Athènes s’élève à 22 milliards d’euros, sa contribution maximale au FESF pourrait dépasser les 200 milliards.

L’urgence dans laquelle ont été prises les décisions et l’ampleur des sommes engagées donnent le vertige à plus d’un député.

Mardi, M. Schäuble a assuré qu'”aucune mesure significative pour la stabilisation de la zone euro n’était prise sans l’aval du Parlement”.

Mais il se pourrait bien que les juges ne l’entendent pas de cette oreille, et permettent aux élus, comme ils le demandent, de voter au cas par cas sur chaque utilisation qui sera faite du FESF et du MES.