Arnaud,
un excellent petit nageur de 11 ans, s’est noyé, aspiré dans une piscine sous
les yeux de sa maman dans un hôtel en Tunisie. Selon RTL info, c’est le système
de filtration qui s’est remis en route qui a aspiré l’enfant. Celui-ci n’était
pas fermé par une grille et la piscine n’était pas surveillée par des maîtres
nageurs. L’enfant qu’on a tenté de réanimer a été transporté dans une ambulance
qui était dépourvue de matériel adéquat pour la réanimation. Arnaud est décédé
quelques heures après son admission à l’hôpital. Avec de pareilles pratiques et
autant de laisser aller, de démission et de négligence, la saison aurait coulé,
révolution ou pas! Retour sur un secteur qui ne cesse de prendre l’eau.
Ce tragique accident trahit une fois encore la situation d’un secteur qui n’est
plus à analyser. Tout a été disséqué et il faut agir, travailler, trancher,
choisir… A quoi cela sert-il de continuer à se voiler la face et communiquer
quand le fruit est meurtri et le corps sclérosé?
Il ne s’agit plus de sauver la
saison touristique 2011. Elle a déjà coulée, prenant une vague meurtrière
qui a mêlé insécurité, mauvaises appréciations, méconnaissance du secteur,
conjoncture internationale, rapacité des tours opérateurs, manque d’engagement
des professionnels aux problèmes chroniques dont souffre le tourisme tunisien
depuis longtemps.
Il ne s’agit plus non plus de savoir si nous sommes sur une mauvaise pente. Il
est juste question d’en connaître le degré d’inclinaison. Avec le report de la
date des élections, c’est l’arrière-saison qui est passée à l’as. Avec la
signature des contrats de 2012 qui sont en cours et des prix défiant tout
entendement, ce sont au moins les trois prochaines années qu’on est en train
d’hypothéquer. Avec les dépenses des budgets promotionnels de 2011, ce sont 60
millions qu’on a gaspillés. Tirons la sonnette d’alarme pour que les prochains
55 millions de dinars annoncés ne soient pas accordés ou qu’un comité de sages
veille à leur judicieux déploiement. Sommes-nous au bord du gouffre? Nous sommes
en plein dedans.
Hormis les belles déclarations, que fait-on pour sauver le tourisme tunisien?
Qui payera la facture de cette phase de transition? Combien cela coutera de
remettre la machine en marche? Combien de temps cela prendra-t-il? Qui en aura
encore les moyens et la volonté? A titre indicatif, une réunion s’est tenue
entre administration et professionnels à Sousse lundi 4 juillet pour évoquer
l’activité touristique dans la région qui enregistre une régression des nuitées
de 57% depuis le début de 2011, par rapport à 2010, et une baisse du chiffre
d’affaires de 70%.
Cette réunion a été conclue par l’engagement du département du tourisme «à
assurer une bonne saison touristique, en mobilisant les médias et les agences de
voyages pour la promotion de la destination Tunisie, appelant les professionnels
à tirer profit de la nouvelle image du pays après la révolution du
14 janvier
2011». Cela n’évoque plus que le dépit! Le divorce entre la profession et son
administration, consommé depuis quelques temps, n’en est plus à sa première
expression. La réforme du secteur et sa réhabilitation ne se feront qu’avec la
paire réunifiée. Pour le moment, les deux sont aussi démotivées l’une que
l’autre.
C’est pourquoi, il est urgent de mettre sur pied un comité de Salut touristique
car l’heure est grave. Le Premier ministre provisoire réalise-t-il seulement
qu’il s’agit de bien plus que de sauver l’exercice d’un gouvernement de
transition? Il est indéniable que ses urgences sont aussi ailleurs. En ce qui
concerne le tourisme, ce sont les prochaines années que nous engageons fort
maladroitement.
Le secteur va mal depuis au moins deux décennies. Faut-il pour autant continuer
à laisser pourrir la situation et insulter l’avenir? L’efficacité en termes de
promotion et de produit touristique de la destination Tunisie est complètement
caduque. Le secteur souffre d’un grand retard de modernité par rapport aux
attentes des clientèles et il ne parviendra pas à se rénover dans ces
conditions. Pourtant, son salut en dépendra.
Face à la crise, le secteur continue de prendre l’eau. Et celui-ci semble
n’avoir pour seules réponses que des incantations utopiques doublées de
réductions de prix et de mutisme administratif qui ne peuvent mener qu’à un
effondrement socio-économique. L’abaissement des prix était une étape plus
lointaine vers la faillite. Pour une grande partie de l’hôtellerie tunisienne,
celle-ci devient de moins en moins lointaine.
Entre ceux qui pensent que l’aide du gouvernement pour reprendre les perfusions
des opérateurs en souffrances et ceux qui apprécient la politique de
pourrissement qu’on semble encourager afin que ne restent que les plus
résistants faute des meilleurs, s’agit-il de jeter le bébé avec l’eau du bain?
Face aux profondes turbulences que vit notre pays, il n’est pas opportun de
faire la fine bouche. Chaque millime compte autant que chaque poste d’emploi.
Le tourisme est un stabilisateur et un enjeu vital pour nous et stratégique pour
la Méditerranée. Sa survie est garante de l’ouverture de notre pays et le
gouvernement doit rapidement entreprendre des mesures exceptionnelles pour le
sauver du bord de l’effondrement. Un comité de salut touristique doit rapidement
se mettre en place pour traiter de l’avenir. Sauf que pour ce secteur en
particulier, l’avenir c’est hier.
La minable prestation de cette année coûtera cher et pèsera lourd sur la
décennie à venir. Le
24 octobre, du côté de l’administration, la situation sera
terriblement endeuillée aussi car doublée d’un staff dépité qui n’a réussi ni à
travailler ni à être écouté. Désappointé, celui-ci ne parvient pas à faire sa
mutation.
Au lendemain du 14 Janvier, le principal acquis du
tourisme tunisien
semblait être sa dépolitisation. Tout porte à croire que nous sommes revenus à
la mainmise du politique sur le domaine touristique. S’il y a une vague qu’il
fallait précisément éviter, c’était bien celle-ci. Elle risque de provoquer un
vrai tsunami!