Un catamaran dans le port de Gdansk, en Pologne, le 22 juin 2011 (Photo : Janek Skarzynski) |
[08/07/2011 08:22:53] GDANSK (Pologne) (AFP) Le contraste est aussi saisissant qu’inattendu: un super yacht d’un luxe éblouissant se faufile dans le port de Gdansk au milieu des chantiers navals décrépits de l’époque communiste, symbole à la fois du renouveau de la Pologne et du déclin d’une industrie.
Lignes épurées et raffinement pour un prix intéressant: les yachts “made in Poland” font une percée sur le marché international, contribuant à relancer une industrie sinistrée après la disparition des chantiers navals géants qui ont été le berceau en 1980 du syndicat Solidarité de Lech Walesa.
“Nous sommes leader dans la catégorie des catamarans de luxe construits sur mesure”, se vante Rafal Lenartowski de la société Sunreef Yachts.
Un catamaran dans le port de Gdansk, le 22 juin 2011 (Photo : Janek Skarzynski) |
Dans un bâtiment de brique rouge entouré d’immenses grues rouillées, quelque 250 artisans assemblent minutieusement les yachts de rêve de Sunreef, qui loue une partie de ces chantiers navals historiques.
Créé en 2000 par un ingénieur français Francis Lapp avec son fils Nicolas, Sunreef a eu recours à la main d’oeuvre spécialisée de Gdansk pour se lancer dans la construction de bateaux à moteur et de voiliers pour des clients fortunés, de Monaco, Hong Kong ou Dubai.
Ces yachts de 58 à 114 pieds (17 à 35 mètres) coûtent entre 850.000 et 10,5 millions d’euros. Un modèle de prestige de 200 pieds pour 30 millions d’euros est également en catalogue.
“Pour nos clients, nous sommes comparables aux meilleures marques italiennes”, insiste M. Lenartowski.
Les amateurs de yachts de luxe apprécient la qualité de la fabrication polonaise “équivalente ou même supérieure à celle des autres chantiers en Europe” à des tarifs “légèrement inférieurs”, 15% en moyenne, ajoute-t-il.
Sunreef et trois autres chantiers polonais spécialisés dans les super yachts, Galeon, Conrad et YBM, font figure de stars parmi la centaine de chantiers navals polonais d’où sortent chaque année 20.000 bateaux à 9.000 euros l’unité en moyenne, embarcations à moteur ou voiliers, pratiquement tous destinés à l’exportation, selon la chambre de commerce Polboat de Varsovie.
Le secret le mieux gardé de l’industrie nautique
un catamaran de luxe dans le port de Gdansk, le 22 juin 2011 (Photo : Janek Skarzynski) |
“La Pologne est aujourd’hui un des leaders en Europe pour la production de bateaux jusqu’à 10 mètres, avec une part de marché significative”, la concurrence étant essentiellement française et italienne, indique le vice-président de Polboat, Philip Scott.
Aujourd’hui, environ un tiers des bateaux exposés dans les salons nautiques en Europe sont construits en Pologne mais ils sont commercialisés sous des marques de renommée internationale comme le français Jeanneau-Beneteau ou l’américain Brunswick Marine qui “comptent pour environ la moitié de la production polonaise”, ajoute-t-il.
“Je pense qu’il s’agit du secret le mieux gardé de l’industrie nautique en Europe – la production polonaise et la qualité polonaise”, dit en souriant cet expert britannique.
Vingt ans après l’effondrement du communisme, la plupart des Polonais ne peuvent pas s’offrir d’aussi beaux jouets.
Pourtant, explique Andrej Janowski, le président de Polboat, les Polonais ont la passion de la navigation comme tous les peuples épris de liberté.
Ainsi Wojciech Kot et son frère Piotr, deux mordus de voile, ont créé leur propre chantier naval, Delphia.
Nichée dans la pittoresque région des lacs de Mazurie, au nord-est de la Pologne, leur société emploie 450 salariés et produit chaque année 2.000 bateaux à moteur pour Brunswick Marine et 200 voiliers sous sa propre marque, certains frôlant les 300.000 euros.
Wojciech Kot souligne les atouts de Delphia, “une conception de classe internationale et un artisanat polonais de qualité avec un gros plus: des coûts de main d’oeuvre moins élevés qu’ailleurs, ce qui nous permet de passer plus de temps à personnaliser nos bateaux selon le goût du client”.
“On met plus d’âme dans nos yachts”, souligne ce passionné qui passe environ trois mois par an à naviguer pour “tester” les derniers nés de la gamme Delphia.