écurité tunisiennes, le 11 janvier 2011 à Tunis. Cette photo est devenue le syombole de la révolte en Tunisie (Photo : Fred Dufour) |
[08/07/2011 08:29:52] TUNIS (AFP) Quelque 180.000 Tunisiens raffolent des aventures d’un personnage d’animation diffusé sur les réseaux sociaux. Chéchia sur la tête et cape sur le dos, visage masqué et cigarette au bec, “Captain Khobza” distille sa vision impertinente de l’actualité tunisienne.
Deux à quatre épisodes sont mis en ligne chaque semaine, suivant l’inspiration des créateurs.
Constituée de cinq jeunes travaillant dans la communication, l’équipe a créé Captain Khobza le 7 février. “On se retrouve à 17h00 après le boulot et on reste parfois jusqu’à 3h du matin”, raconte l’un d’entre eux, qui souhaite garder l’anonymat.
Tout est parti d’une photo prise le 14 janvier, date de la fuite de l’ex président Zine El Abidine Ben Ali.
Elle montre un homme tenant une baguette de pain en guise de mitraillette et visant les policiers anti-émeutes sur l’avenue Habib Bourguiba.
De cette baguette est né le surnom “khobza”, le pain en arabe, clin d’oeil à ce symbole de la révolte en Tunisie. En 1984, des “émeutes du pain” avaient éclaté dans le pays après la décision de Habib Bourguiba d’augmenter les prix de produits de base.
L’homme à la baguette, “c’est l’image d’un Tunisien qui n’a pas peur. De cette photo là , on a fait un personnage virtuel sur facebook, qui s’exprime à la tunisienne, en utilisant l’humour…” explique l’un des créateurs.
Ces derniers, nourris au lait des Simpson et de South Park, se présentent aux médias sous les pseudos de “Boulanger 1, Boulanger 2…”
Dans le dix-septième épisode, dernier en date, Captain Khobza est invité sur un plateau télé où le présentateur, l’invité et les micro-trottoirs chantent les louanges du propriétaire de la chaîne.
Cible visée: la chaîne privée Hannibal TV, propriété de l’entrepreneur Larbi Nasra, lancée avant la fuite de Ben Ali.
Cette chaîne est la risée des internautes qui dénoncent le manque de recul de ses journalistes et leurs commentaires hagiographiques vis-à -vis de leur patron.
L’ironie de Captain Khobza peut-elle décrasser des médias rompus à la langue de bois pendant plus de cinquante ans?
“On essaye de faire bouger les choses, d’être spontanés mais pour que les médias changent, il faut des années. Ils n’ont pas évolué aussi vite que la société tunisienne”, répond Boulanger 1.
Quant aux partis politiques, ils acceptent “globalement”, selon lui, les sarcasmes de Captain Khobza.
“Il y eu quelques critiques de partisans du mouvement islamiste Ennahda, qui nous en voulaient d’avoir caricaturé le président de leur parti, Rached Ghannouchi”. Mais “nos fans les ont remis à leur place”, conclut-il.
Captain Khobza pourrait bientôt se retrouver sur les écrans de télévision.
“Rien n’est conclu, mais nous avons plusieurs propositions de chaînes tunisiennes et arabes”. Quinze épisodes devraient être diffusés pendant le mois de Ramadan (en août), période durant laquelle les Tunisiens regardent beaucoup la télévision.
Le montant du contrat n’est pas encore déterminé, pour l’instant. Boulanger se veut rassurant et transparent: “Nous donnerons tous les chiffres. Ce qui compte, c’est que nous ne vendrons que des épisodes, jamais le concept”. Il s’explique: “Captain Khobza est la propriété de tous les Tunisiens”.
Prochain épisode de la série: Ben Ali et la justice.