à Marseille. (Photo : Bertrand Langlois) |
[08/07/2011 11:27:48] MARSEILLE (AFP) De la petite ville algérienne de Boufarik à Marseille, Jean-Claude Beton a transformé Orangina, la boisson préparée par son père avec les fruits de la Mitidja, en un soda mondialement connu, au rythme de publicités innovantes.
A l’occasion des 75 ans de la marque, la Chambre de commerce et d’industrie Marseille-Provence rend hommage dans une exposition à ce “grand capitaine d’industrie qui avait de l’Orangina dans les veines”, décrit Jacques Pfister, président de la CCI et ancien PDG d’Orangina-Schweppes.
M. Beton, aujourd’hui âgé de 86 ans, se souvient des débuts de cette aventure dont le succès l'”émerveille” encore. Tout commence à Boufarik, à une trentaine de kilomètres d’Alger, où l’entrepreneur, enfant unique, naît le 14 janvier 1925 dans une famille de commerçants prospères.
En 1936, son père, Léon Beton, sort la première bouteille d'”Orangina, soda de naranjina”, à partir d’une formule élaborée par un pharmacien de Valence en Espagne. Les ingrédients: concentré d’orange, eau sucrée gazeuse et un soupçon d’huile essentielle.
Mais la guerre civile espagnole, puis la Seconde guerre mondiale stoppent le projet. “Orangina, pendant toutes ces années, fut une chimère à laquelle nous rêvions tous”, relate, dans son ouvrage “Le goût des autres”, Jean-Claude Beton qui, diplôme d’ingénieur agronome en poche, ressort l’idée des cartons.
occasion des 75 ans de la marque. (Photo : Bertrand Langlois) |
Le projet se concrétise en 1951 avec la création de la société Naranjina Nord-Afrique qui fournit le concentré et gère la publicité, tandis que ses partenaires fabriquent le produit fini.
La bouteille s’arrondit et prend l’aspect granuleux des oranges. Devenue emblématique, cette forme n’est guère appréciée par les limonadiers et les embouteilleurs qui lui reprochent son ergonomie peu adaptée. Mais le jeune patron, décrit par un de ses anciens collaborateurs comme un homme à la fois “autoritaire et charmeur”, “terriblement exigeant”, s’entête.
Très tôt il prend la mesure de “la formidable puissance” de la communication. En dessinant un zeste d’orange en guise de parasol sur fond de ciel bleu, une table de bistrot et la bouteille ventrue, l’affichiste Bernard Villemot donne une identité graphique à la marque, inaugurant une collaboration de près de 40 ans.
Après avoir séduit le Maghreb, Orangina part à la conquête de la métropole où le groupe prend officiellement ses quartiers en 1961, à l’approche de l’indépendance de l’Algérie.
Dans un contexte favorable – croissance économique, marché des sodas en expansion – M. Beton crée le “buzz” en utilisant, outre la publicité, des techniques peu banales. Des employés, ou des étudiants embauchés pour l’occasion, sont réquisitionnés pour commander des Orangina dans les cafés. Bientôt les soldats revenus d’Algérie, où ils ont pris goût à cette boisson, leur prêtent main forte.
ésentée dans une exposition rendant hommage au créateur de la boisson Orangina (Photo : Bertrand Langlois) |
Cinquante millions de bouteilles vendues en 1957, dix fois plus en 1975: l’ascension est fulgurante et la structure familiale de plus en plus convoitée finit par être croquée en 1984 par le groupe Pernod-Ricard.
Pour son fondateur, qui gérait l’entreprise à l’ancienne, maternant ses employés (instauration des 39 heures avant 1982, intéressement et participation), une page se tourne.
Il reste à la présidence un temps, mais commence rapidement une seconde vie, tandis qu’Orangina change de mains à plusieurs reprises jusqu’à son rachat par le japonais Suntory fin 2009.
“Il a réussi à rebondir”, souligne sa fille Françoise Beton, évoquant ses investissements dans les oliviers et surtout le vin avec l’acquisition du château Grand Ormeau, dans la prestigieuse appellation bordelaise Lalande-de-Pomerol, “sa deuxième petite saga”…