La crise de la dette souveraine, avec le rebondissement du spectre d’un défaut de la Grèce fait entrer le marché de la dette internationale dans une phase d’expectative. Comment se tiendra le dinar dans ce contexte agité et quelles projections on peut s’autoriser à faire sur son cours face aux devises internationales et notamment l’euro. A ce sujet, nous avons consulté Mehdi Skandrani Trésorier de Citibank Ttunis. On peut y lire les confidences de l’expert et également le point de vue des banques internationales.
Le marché de la dette : Quelle évolution pour la prime de risque
Le marché de la dette internationale est nerveux et sur ses gardes. La Grèce ferait-elle défaut se demande-t-il? Il reconnaît que c’est une hypothèse « extrême ». A l’heure actuelle c’est le peuple grec qui est aux premières lignes. Refuserait-il de consentir les sacrifices nécessaires pour sauver le pays ? L’on ne sait trop. Mais s’il venait à se dérober s’interroge notre interlocuteur, le marché de la dette vivrait une situation de panique comparable à celle de Lehmann Brothers même si les entités ne sont pas comparables, là c’est un Etat et ci une banque, mais il y aurait une vague de relèvement des primes de risques, affirme-t-il catégorique. Le cas de la Grèce n’est pas isolé. Le cortège des PIGS prend du plomb dans l’aile, car le Portugal et l’Iralnde ont été déclassés par les agences de notation aux grades « Jonk » i.e. hautement risqué. Les primes de risques atteignent 300 points de base donc 30%, ce qui est prohibitif pour ne pas dire usuraire. Et là il reconnaît que la spéculation exploite ces situations à fond. Et il rappelle les attaques de Georges Soros contre la livre Sterling et le Franc Français qui ont profondément marqué les esprits pour avoir fait trembler les marchés et les états concernés. Dans ce contexte si la Tunisie devait lever de la dette en devises, il serait indument pénalisé, pour des faits exogènes et non pour des contreperformances locales. Et notre interlocuteur de rappeler que le pays, quoique déclassé, n’en conserve pas moins un « investment grade ». Et d’ajouter qu’il présente un profil de risque apaisant ce qu’il explique par les faits internes, qu’il développe ci-après.
Gestion macroéconomique : Des déficits « under control»
L’Etat a fait face à l’emballement des dépenses publiques. Et Mehdi Skandrani de citer l’augmentation des traitements des fonctionnaires, le dédommagement des entreprises sinistrées pour les vagues d’émeutes post 14 janvier, et pour les diverses subventions versées à certaines catégories sociales. Notre interlocuteur relativise le creusement du déficit budgétaire et rappelle que le Forcast du ministère des finances prévoit un déficit au 31.12.2001 à 5% du PIB. C’est selon lui une amplitude maitrisée et saine précisant que ce déficit a été couvert par de la dette locale. Pareil pour le déficit courant. Il se maintient à son niveau ordinaire. C’est donc « business as usual » en rappelant qu’un déficit n’est pas significatif en soi, il faut toujours l’appréhender dans con contexte. L’économie réalisée sur la facture céréalière, le rush des frères libyens, de même que la bonne tenue des exportations ont joué le contrepoids. Pas de panique, là encore.
Politique monétaire : Des initiatives en phase avec l’état de l’économie
C’est pour la première fois que la BCT baisse le TMM, qui a été ramené de 4,5 à 4 % depuis le 30 juin dernier, pour un objectif strictement monétaire et non sous la pression de tensions économiques. En allégeant les charges sur les crédits des ménages et des entreprises, précise notre interlocuteur, on leur procure un supplément de liquidités. Ce qui servira, en partie, à augmenter la consommation de ces deux agents économiques .Et Mehdi Skandrani de préciser que cette initiative est à mettre en rapport avec les trois baisses consécutives du taux des resserves obligatoires des banques lequel a été ramené de 12,5 à 2,5 %. Les 10 % de différence ont servi à accroitre la liquidité sur le marché et c’est bien en phase avec la conjoncture du moment qui a besoin que la consommation soit soutenue.
Le Dinar contre Euro : quels changements ?
Dans le contexte de turbulence sur le marché international comment se tiendra le cours du dinar et sera-t-il toujours déprécié de cette manière glissante, quoique soft, contre euro ? Mehdi Skandrani prend le pari que le Dinar ne sera plus déprécié de cette manière à peine perceptible que l’on connaît. Et, rajoute que le Dinar est convenablement valorisé parce qu’il reste compétitif, sur le marché. La tension sur le marché de la dette, même en dehors d’une catastrophe grecque, laisse prévoir un euro dollar en baisse de 1,40, son cours actuel à 1,25, cours probable. Dans ce contexte l’euro dinar ne ferait que suivre, mécaniquement la tendance. Les deux cours sont positivement corrélés précise Mehdi Skandrani. En clair le Dinar s’appréciera contre euro. Et, d’ailleurs il précise que depuis janvier 2011 il n’y a pas eu de tensions particulières sur le Dinar au niveau des salles de marché. Et, que le marché fonctionne correctement dans la bande (Spread) BCT. Toutes les banques de la place cotent en permanence et la BCT a toujours soutenu le marché. Et ce malgré la baisse des réserves de change précise notre interlocuteur. Ces dernières ont effectivement baissé de 13 milliards au 31.12.2010 à 9 milliards au 30.06.2011. Il faut y lire la conjonction de la diminution de moitié de nos recettes touristiques, de près de 10 % de nos flux d’économies sur les revenus du travail et des transferts de TRE, outre le remboursement des 700 MD de tombée de crédit souverain et le règlement de la participation de Princesse Holding dans Tunisiana (QTel) pour la contrevaleur de 700 millions de dinars . A l’heure actuelle le rythme des exportations dépasse celui des importations ce qui nous place en situation de résorption du déficit. Mais alors si le dinar s’apprécie, entreprises vous savez prendre vos dispositions en pareille situation pour vos achats à terme. A bons financiers…