Les entreprises d’insertion déplorent l’érosion de leurs moyens

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évrier 2009 (Photo : Pierre Andrieu)

[21/07/2011 09:31:23] PARIS (AFP) Alors qu’elles ont “plutôt résisté” à la crise, les entreprises d’insertion s’estiment menacées par le tassement depuis dix ans des aides de l’Etat et le nombre limité de personnes qu’elles peuvent accompagner.

“Le secteur est en difficulté. Le financement de l’Etat est fixe depuis dix ans: 9.680 euros par an par Equivalent Temps Plein”, indique Olivier Dupuis, secrétaire général du Comité national des entreprises d’insertion.

Le CNEI fédère 600 des quelque 1.250 EI ou Entreprises de travail temporaire d’insertion (ETPI), une minuscule partie des 215.000 coopératives, associations, mutuelles, fondations composant la trame de l’économie sociale et solidaire et de ses 2,3 millions de salariés (10% de l’emploi total).

“En dix ans, le SMIC a augmenté de 40%. La différence, on la prend dans la rentabilité économique”, poursuit-il.

Car l’accompagnement et la rémunération, au moins égale au SMIC, de ces personnels aux difficultés sociales et professionnelles particulières coûtent cher. Ce que ne compense pas, selon M. Dupuis, l’aide annuelle de l’Etat.

Pourtant, “le secteur a plutôt résisté à la crise, parce que nos stratégies de développement sont plus pérennes”, ajoute-t-il, en concédant que certaines activités en ont plus souffert que d’autres, comme le bâtiment ou l’interim.

Un jugement que ne démentirait pas Jean-Marc Borello, pionnier de l’économie sociale, patron du groupe SOS, qui a fait le choix de services haut de gamme — restaurants, traiteur, édition, voitures de luxe hybrides avec chauffeur — dans un secteur traditionnellement dévolu aux métiers peu qualifiés.

“En 2009, avec la crise, le marché parisien du traiteur s’est effondré de 40%. Nous, nous avons fait +20%”, affirme-t-il.

Il avance une explication: le solidaire a le vent en poupe, sous la pression d’un public de plus en plus sensible aux arguments du beau, du bon et du bien.

“Quand je débats avec les patrons du secteur traditionnel, je sens une préoccupation sincère. Je ne pense pas qu’ils aient été touchés par la grâce. Mais ils l’ont été par la crise. Or leurs clients, leurs actionnaires et leurs salariés ne se satisfont plus de discours: ils veulent des actes”.

“Il y a dix ans, j’aurais pensé que la voiture électrique, c’était un jouet. Aujourd’hui les gens qui s’adressent à Alterauto, notre entreprise de location de voitures hybrides avec chauffeur, veulent une voiture hybride. Et quand ils apprennent que c’est une entreprise d’insertion, c’est encore mieux”, affirme-t-il.

Le modèle “social”, qui s’éloigne du canevas associatif d’origine et se professionnalise, fait des émules. Actuellement, SOS aide ainsi un entrepreneur chevronné, qui a une quarantaine d’ouvertures de restaurants à son actif. Le prochain sera une entreprise d’insertion. “Le gars a envie de redonner un peu à la société”, observe un responsable du groupe.

Cette envie se constate aussi dans le personnel: selon M. Borello, “un HEC recruté à SOS gagne en moyenne 35% de moins qu’ailleurs. Ils viennent en quête de sens et pour le professionnalisme exigé”.

81% des salariés en insertion dans les entreprises du CNEI ont un niveau inférieur ou égal au CAP/BEP. Le “vivier” est le chômeur de longue durée. 40% ont moins de 26 ans.

Cependant, le développement des entreprises d’insertion n’est pas extensible: “On ne manque pas de clientèle. Mais seuls 15.000 postes par an sont financés par l’Etat”, indique M. Dupuis. “C’est regrettable, car nous produisons de la richesse, avec un projet social”.