La Révolution tunisienne est-elle en danger?


revolution_22072011-art.jpgLe bilan des six premiers mois de la révolution (14 janvier-14 juillet 2011) est
des plus complexes. Si le pays a plongé dans le chaos, les faits ont nourri des
espoirs.


«Comment voulez-vous gouverner un pays où il y a 300 sortes de fromage?»,
s’interrogeait le Général De Gaulle pour expliquer comment la France était
ingouvernable. Paraphrasant le libérateur de la France de l’occupation nazie,
peut-on s’interroger autrement s’agissant de la Tunisie: «Comment gouverner un
pays où il y a 94 partis politique pour à peine 11 millions d’habitants?»

La prolifération des partis politiques, l’expression, du reste, d’un pluralisme
qui caractérise les sociétés démocratiques, a remplacé, depuis la Révolution du
14 janvier 2011, un monopartisme de fait qui a accompagné la Tunisie depuis son
indépendance.


Tout et tout de suite

Et avec la disparition du monopartisme, l’unanimisme de façade a donné lieu à
l’expression de divergences souvent aigües entre les partis politiques, chacun
prêchant pour ses crédos et sa paroisse.

D’où l’apparition d’un certain opportunisme qui surfe sur l’impatience des
Tunisiens ou du moins une partie d’entre eux qui veulent tout et tout de suite:
effacer le déséquilibre régional né, il faut le reconnaître, bien avant
l’indépendance du pays; créer des emplois; développer les infrastructures;
asseoir une démocratie; régulariser des milliers d’employés; mettre fin à la
corruption et aux inégalités; revaloriser les salaires; combattre la cherté de
la vie…

A ce stade, le gouvernement de transition, que tout le monde sait provisoire,
est tantôt soumis à des pressions pour être un «gouvernement d’affaires
courantes», avec, donc, des compétences limitées –pas en termes de
qualifications cela s’entend- et exerçant le pouvoir d’une façon réduite. Il
est, par moment, et bien au contraire, soumis aux pressions, et souvent de la
part des mêmes acteurs, pour régler au plus vite tous les problèmes et maux de
la société tunisienne.

Un gouvernement soumis aux pires rumeurs. Des rumeurs qui ont fait éclater des
jacqueries dans nombre de régions: à Métlaoui, à Gafsa, à Gabès, à Menzel
Bourguiba, à la Cité Ettadhamen… Avec des attaques en règle d’édifices publics.
Lesquelles attaques n’ont pas épargné –loin s’en faut- les locaux de la police.

Le pays tiendra le coup

Des événements marqués par la résurgence du communautarisme, «Larouchia», que
l’on croyait disparu. Et de la violence aussi, heureusement bien verbale que
physique.

Cela dit, les grèves, sit-in, manifestations et autres barrages sur les routes…
prennent quelquefois la forme d’ultimatum: soit tu réponds positivement à mes
revendication, soit je mets le feu!

Mais, il y a plus grave: l’«argent politique». Certains partis seraient riches
recevant même des sommes d’argent de l’extérieur. Ce qui leur faciliterait la
tâche non seulement en matière de lobbying, mais aussi d’achat des allégeances
et pour alimenter les discordes.

En la matière, tous ceux qui contestent ont raison. Ceux auxquels ils
s’adressent –ou s’attaquent- sont les seuls et uniques, évidement, à avoir tort.
Même si certaines revendications semblent créées de toute pièce. Comme cette
«normalisation» avec Israël, priorité des priorités, aux yeux de quelques-uns,
devant être inscrite dans la Constitution.

Et peu importe si la satisfaction des revendications peut alourdir les charges,
notamment lorsque les administrations et les entreprises ne carburent plus à un
rythme acceptable.

Les médias assument-ils une quelconque responsabilité dans la situation qui
prévaut dans le pays? Le débat est largement ouvert. Certains reprochent
notamment aux médias des manquements à la déontologie (partis pris, mensonges,
diffamation, atteinte à la vie privée…)

Un contexte nouveau, fruit d’une transition qui n’a, aux yeux de quelques-uns,
que trop duré. Mais demain sera-t-il meilleur? Beaucoup de Tunisiens
appréhendent toujours l’avenir. Même s’ils restent optimistes! Le pays tiendra
le coup.

Réflexion d’un citoyen lambda: «Il n’y a pas eu de perturbation notoire: les
magasins sont ouverts, les stations de services alimentent les voitures,
l’électricité fonctionne, comme l’eau courante et l’administration fonctionne
quand même! Tout cela se calmera dans moins d’une année et le pays respirera un
autre air».

L’espoir quand tu nous tiens!