Plus jamais cela. C’est le message que les Brigades de l’Ordre Public (BOP) ont voulu livrer aux médias lors d’une table ronde informelle organisée samedi 30 juillet à Bouchoucha.
Plus jamais cela! C’est aujourd’hui un leitmotiv. Mettre fin au manque de communication entre un important maillon du système sécuritaire du pays, les responsable de la sauvegarde de l’ordre public, sa préservation et les médias, est un leitmotiv. Ceux-là mêmes qui éclairent l’opinion publique sur ce qui se passe sur le terrain. Dans l’invitation adressée aux représentants des médias, nous pouvons lire: «La rencontre traitera des différents points cherchant à défendre les libertés fondamentales d’expression des journalistes en les assistant dans leurs quêtes de vérité et en assurant leur sécurité dans l’exercice de leurs fonctions». Edifiant, on croirait entendre le syndicat de la presse et non celui des BOP.
La Tunisie ne sera plus comme avant, a assuré Lassaad Kchaou, secrétaire général d’un syndicat élu par 11.000 agents et cadres des Brigades.
La présentation qui a précédé les discussions entre les différents représentants des médias et ceux des BOP dénote d’un grand degré de professionnalisme. L’Organigramme de la direction a été clairement exposé tout comme un film décrivant les missions et les tâches dont sont chargées les sections des Brigades dont celle de libérer les otages ou de poursuivre de dangereux criminels.
«Nous sommes dans une phase délicate pour notre pays, nous ne voulons pas nous autoriser à faire marche-arrière, et nous estimons qu’il est capital pour nous de jouer la carte de la confiance, de la crédibilité et de la franchise. Nous ne savons pas encore ce qui nous attend dans l’avenir, mais nous pouvons vous promettre que rien ne sera plus comme avant. Nos brigades peuvent aujourd’hui gérer leurs rapports avec les médias dans le respect de la loi et des responsabilités qu’ils assument. Ce sont de nouveaux rapports qui s’offrent à nous et une nouvelle vision de ce que doit être la mission de la police: au service de la patrie, de l’Etat et de la Nation et non des individus».
La réhabilitation de l’image des BOP passe nécessairement par une meilleure connaissance de leurs modes de fonctionnement, mais également par la prédisposition des médias à laisser au seuil de la porte leurs préjugés et se mettre en position de juger les faits sans jugements préalables. La police doit être digne et fière car elle représente la prépondérance et l’autorité de l’Etat et la loi, elle doit respecter le citoyen et vice-versa.
L’ouverture de la police sur les médias et la rue ne veut pas dire qu’on doit s’accorder le droit de l’humilier ou de l’insulter. «C’est par le respect et l’application de la loi ainsi que des pratiques professionnelles de part et d’autres, police et médias que nous pouvons arriver à établir de nouveaux rapports entre nous».
Stages de formation des représentants de la presse
«Un code éthique?», propose un journaliste. Pourquoi pas, réplique le secrétaire général du syndicat des BOP, l’essentiel est que nous arrivions à nous comprendre, d’où nos propositions pour organiser des formations en direction des représentants de médias sur les méthodes d’investigation de la police nationale, les méthodes de couverture des scènes d’intervention ainsi que les techniques paramilitaires des unités d’élite.
La police a pour mission de maintenir l’ordre public. Pour y arriver, elle doit inspirer confiance à la population et pouvoir assurer. Paradoxalement et depuis l’avènement de la révolution, les policiers se sentent de plus en plus victimes de l’insécurité et dans certains cas incapables d’assurer leur propre sécurité. Parfois, ils observent une attitude attentiste devant certains débordements de la rue, d’autres fois, ils réagissent brutalement. «Nous aimerions, dans le cadre des stages de formation que nous proposons aux représentants des médias, vous suggérer de vous mettre dans la peau d’un agent de nos brigades, en portant la tenue et vous mettant en position, juste pour que vous compreniez les raisons de certaines attitudes que nous ne justifions d’ailleurs pas», invite Lassaad Kchaou.
Favoriser la promotion de méthodes et d’instruments participatifs et efficaces qui puissent améliorer les relations entre police, médias et citoyens, et développer une nouvelle approche des rapports en question, c’est ce qu’ambitionne le Syndicat des BOP à travers l’organisation de la table ronde. Car police, justice et médias ne s’opposent en rien. Leurs objectifs sont similaires: assurer l’ordre social et lutter contre les injustices. La police doit sécuriser et rassurer, elle doit également s’autoréguler; mais pas elle seulement, les médias sont autant concernés. Les dépassements de la part des médias, il y en a eu avant le 14 janvier, il y en a toujours autant aujourd’hui. Ce qu’il faut comprendre est que sans ordre et sans paix, aucun pays ne peut prospérer. Les différents syndicats du ministère de l’Intérieur ont déjà franchi un grand pas vers la remise en question de leurs comportements d’hier, ils ont tendu la main à leurs partenaires d’aujourd’hui, médias et pouvoirs publics: «Notre seul intérêt c’est la préservation des nouveaux acquis de la Tunisie, nous ne protégerons aucun de nous qui commettrait un acte illégal, nous ne vous dissimulerons aucune information qui puisse servir de base à vos écrits. Tout ce que nous vous demandons, c’est de vous adresser à la source, de ne pas diffuser sur nous des informations dont vous n’êtes pas sûrs. Nos portes vous sont ouvertes pour tout renseignement qui ne soit pas risqué pour l’ordre public ou le pays».
La police est en train de faire publiquement son autocritique et sa remise en question. A quand le tour des médias?