Il s’agit du Conseil national indépendant de l’information et de la communication (CNIIC), une structure créée à l’initiative de Hassen Mensi, ex-président de l’Association des journalistes tunisiens (AJT des années 80) et ancien rédacteur en chef à l’Agence Tunis Afrique Presse.
Soutenu par l’Union générale du travail de Tunisie (UGTT) et la Ligue des droits de l’homme, le CNIIC a tenu le 30 juillet 2011 son assemblée constitutive avec la participation de ses membres, pour la plupart des journalistes chevronnés, des universitaires, chercheurs, syndicalistes, juristes, enseignants et étudiants. Webmanagercenter y était.
L’objectif du CNIIC est de défendre autrement les intérêts de la presse et des journalistes. Contrairement aux autres structures, l’Instance nationale indépendante pour la réforme de l’information et de la communication (INIRIC), le Syndicat des journalistes tunisiens (SNJ), le syndicat de l’information (UGTT), la sous-commission de Ridha Jenaieh chargée de la réforme de l’information…, le CNIIC ne va pas chercher à arracher des réformettes, mais entend coller plus aux objectifs de la Révolution du 14 janvier 2011, et «révolutionner» le secteur de l’information et de la communication qualifiée de «nerf central de l’agir social» par Abdelakader Ben J’dira, chercheur en communication et membre du CNIIC.
Selon lui, «on ne réforme pas ce qui a été déformé, durant plus de cinq décennies, mais le révolutionner en y introduisant un changement radical touchant la globalité du système de l’information-communication du point de vue de la législation, de la formation, du personnel et de la direction».
Pour son fondateur, le CNIIC se veut indépendant du gouvernement et de tout autre lobbysme. Membre du CNIIC, M. Youssef Seddik, journaliste, penseur et essayiste, a révélé que lorsque le gouvernement Ghannouchi lui avait proposé, le premier, l’INIRIC, il avait exigé une indépendance totale du pouvoir exécutif, une proposition qui n’avait pas plu à l’époque aux forces politiques en place.
Néanmoins, empressons-nous de relever que le CNIIC est loin d’être aussi indépendant que son fondateur et ses membres cherchent à le faire croire. Il est lui-même soutenu par deux grosses pointures de la société civile: la Ligue tunisienne des droits de l’homme et surtout l’UGTT qui, depuis sa création, n’a jamais défendu les intérêts des journalistes et des intellectuels d’une façon générale. Les journalistes, tout comme les écrivains, les juges et autres professions intellectuelles ont mis plus de 50 ans pour «arracher» leurs syndicats. La Ligue, pour sa part, muselée depuis sa création, ne pouvait objectivement se distinguer par des actions spectaculaires en faveur des journalistes. Moralité: le CNIIC est une précieuse opportunité pour s’afficher «pro-liberté de presse».
Pour revenir à la réunion constitutive de ce Conseil, les participants ont été unanimes pour considérer, dorénavant, le secteur de l’information et de la communication comme «un quatrième pouvoir», au même titre que les trois autres pouvoirs. Abdessattar Ben Moussa, ex-bâtonnier, a proposé d’intégrer cette recommandation dans la prochaine Constitution sous forme d’articles «non négociables».
Par ailleurs, les participants ont rejeté à l’unanimité le projet du Code de la presse, «des œuvres complètes (75 articles) à travers lesquelles des juristes aux ordres de forces contrerévolutionnaires cherchent à justifier, non pas un idéal, mais des honoraires auprès de la Commission de protection des objectifs de la révolution».
Ils ont proposé de se limiter à inscrire dans la prochaine Constitution trois principes:
– la presse est libre et personne ne peut l’interdire,
– la clause de conscience en vertu de laquelle le journaliste peut refuser d’écrire sur des thèmes contraires à ses convictions,
– la garantie de l’accès à l’information et de la sécurité des professionnels lors de l’exercice de leur métier.
Ils ont en outre souligné la nécessité de faire de telle sorte que le 4ème pouvoir soit indépendant des entreprises capitalistiques, principaux financeurs, jusque-là, des entreprises de presse. La promulgation, à cet effet, d’un texte de loi peut garantir cette autonomie. L’objectif est de dissuader l’ingérence des forces financières considérées comme des «industries culturelles» régies par la loi du profit dans la ligne éditoriale des médias dont l’ultime finalité est de constituer un audimat et non d’attirer à tout prix des annonceurs.
Cela dit, le CNIIC se veut une force de propositions, voire un complément aux autres structures en place et entend contribuer, en prévision de la Constituante, à la création d’un réseau et d’un lobbysme en faveur du 4ème pouvoir.