un franc suisse, sur un billet de 50 euros (Photo : Fabrice Coffrini) |
[17/08/2011 14:52:17] GENEVE (AFP) Rien n’y fait : en dépit d’une série de mesures annoncées mercredi matin par la Banque nationale suisse pour le faire baisser, le franc suisse reste sous le seuil de 1,20 CHF pour 1 euro, un objectif non déclaré de la Banque nationale.
Mercredi, la Banque nationale (BNS) est intervenue pour la troisième fois en quinze jours, en injectant des liquidités dans les circuits financiers. Cela n’a pas découragé les investisseurs étrangers, qui continuent à acheter du franc suisse.
Selon une source proche du marché, cet intérêt pour la monnaie helvétique s’explique par le fait que “l’UE n’arrive pas à adopter une politique claire et prendre des mesures pour redresser la situation économique, alors les investisseurs continuent à acheter du franc suisse”.
Depuis le 3 août dernier, date de la première intervention de la BNS, le franc suisse a progressé de 3,92% par rapport à l’euro, alors que théoriquement il aurait dû baisser.
Actuellement, le franc suisse tourne autour de 1,14 CHF pour 1 euro, soit une progression de 6% par rapport à l’euro depuis début juillet, et de 25% depuis début janvier.
Cette situation devient intenable pour les grandes entreprises suisses qui exportent, car leurs produits sont devenus trop chers.
Sur le marché intérieur, d’autres secteurs souffrent, comme le tourisme. Avec un cours aussi élevé, les touristes hésitent à venir passer quelques jours en Suisse, préférant des pays alpins voisins, comme l’Autriche ou l’Allemagne.
Le commerce de détail souffre aussi, car les Suisses font leurs courses dans les régions frontalières, où leur caddie coûte bien moins cher que chez eux.
Pour les investisseurs étrangers en revanche, la Suisse est un paradis, dans la mesure où le pays connaît une grande stabilité politique, qu’il n’a pas connu de grandes catastrophes, et que les mouvement sociaux sont rarissimes car le système en place est globalement accepté par la population.
En outre, le taux de chômage du pays est faible, avec 2,8% de la population active, et la dette publique ne représente que 39% du produit intérieur brut, un niveau bien éloigné des 85% en France ou des 100% aux Etats-Unis et des 120% en Italie.
Face à cette situation, la Banque nationale suisse essaye de réagir tant bien que mal depuis début août. A trois reprises, y compris celle de ce mercredi, la Banque nationale a annoncé qu’elle allait prendre des mesures pour lutter contre ce niveau de change “extrêmement surévalué”, notamment en injectant des liquidités dans les circuits financiers.
Le niveau de liquidités est ainsi passé en 15 jours de 30 milliards de CHF à 200 milliards de CHF.
Selon la BNS, les mesures “montrent leurs effets, mais le franc suisse reste toutefois extrêmement surévalué”.
Pour Daniel Kalt, chef-économiste pour la Suisse de la banque UBS, la BNS est entrain de jouer une partie très difficile. “La BNS a choisi de jouer jusqu’au bout la carte des liquidités, mais c’est possible que ce soit insuffisant” pour faire baisser le franc suisse, et qu’il faille recourir à un arrimage du CHF à l’euro, a-t-il estimé.
Les marchés attendaient mercredi une telle mesure, qui n’est pas intervenue.
“La BNS est confrontée à un dilemme, car choisir l’arrimage peut être une mesure très coûteuse, et susceptible d’entraîner de lourdes pertes pour la banque centrale”, a-t-il ajouté. Dans une telle hypothèse, la banque nationale s’engagerait en effet à acheter des euros en masse, jusqu’à ce que le cours monte au niveau de change escompté.
La banque nationale est engagée dans une “partie de poker”, et jusqu’à présent “elle ne se débrouille pas si mal”, a-t-il conclu.