Tunisie : Va-t-on vers la responsabilité collective en matière d’emploi?

emploiu-29082011-art.jpgL’emploi devrait-il rester seulement la responsabilité du gouvernement? A vrai
dire, cette question ne demande pas trop de réflexion. Dans les temps qui
courent, il n’est plus à démontrer que l’Etat n’arrivera pas à absorber le
nombre croissant de chômeurs d’une année à l’autre. Il est vrai que les
solutions stratégiques ne pourraient être appliquées instantanément mais
faudrait-il encore que les acteurs concernés par la question de l’emploi soient
également réactifs pour contribuer à leur élaboration.

Le secteur privé est un grand employeur de main-d’œuvre, de diplômés du
supérieur ou de la formation professionnelle. A lui seul, le tissu industriel
compte 3.200 entreprises et
emploie 300 mille personnes. On n’a pas de chiffre
sur le pourcentage des diplômés de l’enseignement supérieur, mais tout porte à
croire qu’il est en hausse surtout avec la montée en gamme et le recours aux
nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Rôle d’appui…

Une situation qui devrait mobiliser encore plus les entreprises à assumer leur
rôle, de plus en plus important, en matière d’emploi, surtout dans cette période
cruciale. Huit mois après le déclenchement d’une révolution qui a été baptisée
“Révolution de la dignité“, tout se joue sur la responsabilité collective. Le
gouvernement provisoire n’est parvenu à mettre à disponibilité que 24.280 postes
dans la fonction publique, un chiffre loin de combler la demande, qui est
estimée cette année à 700 mille chômeurs. Et avec les demandes additionnelles
chaque année, l’équation sera plus compliquée encore dans les années à venir.

Le secteur privé devra appuyer les politiques publiques que ce soit dans cette
période transitoire ou dans l’avenir. L’événement “Le mois de l’emploi et du
développement régional“ suffira-t-il à atteindre cet objectif? C’est ce que le
ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle du gouvernement
provisoire entreprend de faire. Un événement qui associera également la société
civile, les institutions de formation et les demandeurs de l’emploi.

Mois de l’emploi…

«L’objectif est de créer une dynamique positive dans le pays, de se poser les
questions fondamentales et de faire participer tous les acteurs concernés par la
problématique de l’emploi et aussi de concrétiser les promesses du gouvernement
en la matière», affirme Ramla Jaber, conseillère en communication au sein du
ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle.

L’événement se déroulera du 12 au 30 septembre 2011 et comportera des actions
ciblées. Il s’agit premièrement de journées sectorielles visant à promouvoir le
développement d’un secteur dans la région prédéfinie et concrétiser les actions
de chaque ministère concerné. Cette action touchera tous les gouvernorats et
concernera les secteurs de la santé, l’industrie, l’énergie, la logistique, les
TIC, le tourisme, l’agriculture, l’artisanat et les services financiers.

Des journées de l’entreprenariat seront également organisées, associant la BTS,
la
BFPME, les investisseurs, les entrepreneurs et les incubateurs. Ajoutons à
cela une journée des associations, une journée de la formation et une journée du
partenariat international qui comportera des pavillons de France, du Qatar et de
la Belgique.

Selon Mme Jaber, l’événement sera aussi l’occasion d’annoncer la rentrée
effective dans la fonction publique. Une cérémonie de bienvenue sera organisée
dans les différents ministères concernés, sachant que plusieurs résultats finaux
de certains concours d’entrée à la fonction publique ont déjà été annoncés.
D’ailleurs, on nous indique que pour le ministère de l’Emploi et de la Formation
professionnelle, onze concours ont été annoncés. L’Agence Tunisienne de
Formation Professionnelle et l’Agence Nationale de l’Emploi et du Travail
Indépendant ont recruté respectivement 300 et 280 personnes. De même pour les
entreprises publiques qui fêteront la rentrée de leurs nouveaux employés, à
l’instar de la Compagnie de Phosphate de Gafsa, la
STEG et le Groupe Chimique
Tunisien.

Repenser la formation…

D’un autre côté, Mme Jaber affirme que des conventions ont été signées avec des
instituts de formation étrangers, qui devraient bientôt s’installer en Tunisie.
Il s’agit du Centre national des arts et métiers (France), Education for
Employment (Etats-Unis d’Amérique) et Demos (France). Ainsi, l’institut
américain apportera une contribution au ministère de l’Emploi et de la Formation
professionnelle et au ministère de l’Enseignement supérieur pour repenser les
stratégies de formation.

Ces partenariats ont été motivés par la réalité du marché, nous signale notre
interlocutrice: une inadéquation entre l’offre et la demande, un nombre de
chômeurs et de diplômés du supérieur en progression et un niveau de formation
qui ne répond pas aux besoins du marché. Pour pallier à ces lacunes, le
ministère compte lancer des formations complémentaires pour les diplômés en TIC,
l’off shore, la câblerie et toute spécialité que le marché demande. Ces
formations se dérouleront en partenariat avec le secteur privé pour sélectionner
les personnes qui en bénéficieront avec un engagement de recrutement.

Un programme de reconversion a été également lancé, visant les diplômés dans des
filières «difficiles à intégrer» (telles que l’histoire ou la géographie qui
n’ont qu’une seule issue, celle de l’enseignement). Ce programme offrira des
formations dans les secteurs où il y a une demande sur le marché du travail.
Espérons que les résultats seront probants.

Mais est-ce qu’il y a eu déjà des conventions avec le secteur privé pour le
recrutement de ces personnes. Mme Jaber nous confie qu’une convention a déjà été
signée avec un groupement de sociétés tunisiennes off shore. L’engagement porte
sur le recrutement de 350 personnes par an sur les trois années à venir.
D’autres conventions sont en cours d’étude. Alors reste à savoir si les
entreprises tunisiennes seront assez réactives pour se lancer dans cette
démarche et contribuer à la recherche de solutions pour le chômage même sur le
court terme.