L’aéronautique civile française voit l’avenir en rose… pour l’instant

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Un Airbus A 380 au Bourget le 26 juin 2011 (Photo : Pierre Verdy)

[09/09/2011 10:36:02] PARIS (AFP) L’industrie aéronautique civile française affiche son optimisme avec des carnets de commandes bien remplis et répète à l’envi que la tempête financière actuelle ne l’atteindra pas, un paradoxe alors que les compagnies aériennes sont, pour certaines, touchées de plein fouet.

Avec 1.015 commandes enregistrées cette année, Airbus dispose d’un carnet de commandes record de 4.233 avions à livrer. De quoi assurer sept ans de production aux cadences actuelles.

Sa maison-mère, l’européen EADS, réalise même la meilleure performance du CAC 40 depuis le début de l’année (+25% environ).

“On est dans cette conjoncture financière pas satisfaisante (…) et nous sommes dans un secteur industriel qui a au contraire une très forte accélération de ses perspectives de développement”, s’est félicité Pierre Gadonneix, président du conseil de surveillance de l’équipementier aéronautique Latécoère, lors d’une conférence de presse mercredi.

Oui mais voilà, la demande des compagnies aériennes “repose sur des fondamentaux datant de plusieurs mois, au moment où le trafic se reprenait après la crise de 2008-2009”, commente Christophe Ménard, analyste aéronautique chez Kepler, interrogé par l’AFP.

“L’industrie aéronautique réagit en décalé par rapport aux marchés financiers car les compagnies planifient leurs augmentations de capacités plusieurs mois en avance”, prévient-il.

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Un Airbus A 380 au Bourget le 26 juin 2011 (Photo : Pierre Verdy)

Donc l’industrie aéronautique civile subira dans quelques mois les répercussions éventuelles de la crise actuelle. D’autant que les compagnies aériennes sont très exposées à la conjoncture.

Air France-KLM a déjà prévenu qu’elle allait mettre en place des mesures d’économies supplémentaires. Son action a fondu cet été et aujourd’hui le groupe franco-néerlandais ne vaut plus que 1,9 milliard d’euros en Bourse, soit seulement le prix catalogue de neuf A350.

“Et si d’autres compagnies d’envergure mondiale tenaient le même discours, ça pourrait avoir des répercussions comme des annulations ou des reports de commandes”, prévient l’analyste.

De plus, dans le contexte, il faut que “les compagnies puissent trouver des financements à des taux pas trop élevés pour acheter de nouveaux appareils”, rappelle M. Ménard.

Néanmoins, quelques annulations ou reports de commandes ne devraient pas avoir d’impacts trop importants pour les géants du secteur. “Airbus et Boeing ont des chaînes de production optimisées, ce qui leur permet de réallouer facilement des créneaux de production”, souligne l’analyste.

Des avionneurs plus modestes comme “le brésilien Embraer et le canadien Bombardier sont moins rompus à cet exercice”, relève-t-il.

Les sous-traitants, très nombreux, seraient encore plus fragilisés par un retournement brutal de la demande. D’autant plus s’ils augmentent leurs cadences de production — gros enjeu du secteur alors que les carnets de commandes débordent — car ils auraient alors des investissements lourds et coûteux à gérer en plus.

Jeudi, le président du Medef Haute-Garonne, département qui réunit la plupart des entreprises aéronautiques françaises, Philippe Robardey, continuait à valider ce scénario: “Ici, les chefs d’entreprise ne se disent pas on arrête tout, ils continuent d’investir”.

Airbus, dont le siège est à Toulouse, pourrait aussi décider très prochainement une augmentation de ses cadences sur sa chaîne A320, face au succès du Neo.

Des engagements lourds à gérer, particulièrement pour les petites structures. D’autant que le climat actuel repousse à des jours meilleurs les projets de fusions-acquisitions dans le secteur qui a pourtant besoin de se consolider pour faire face à la concurrence mondiale.

“Les projets d’acquisition sont différés”, a confirmé mercredi Latécoère, qui cherche un repreneur ou un partenaire.